Ce sont des chiffres inquiétants. D'après une enquête* sur la précarité étudiante menée par l'Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf), 42 % des carabins de second cycle ont déjà pensé à renoncer à leurs études pour des raisons financières. En 2019, lors de la sortie de la première édition de l'enquête précarité, ce chiffre s'établissait à moins de 25 %.
« En quatre ans, nous constatons une nette dégradation de la situation financière des étudiants et, ce, malgré les revalorisations qui ont été actées au moment du Ségur », a regretté, ce lundi 2, Jérémy Darenne, président de l'Anemf, à l'occasion d'une conférence de presse.
Coût de la rentrée et loyers
Autre constat alarmant révélé par l'étude : 65 % des étudiants interrogés ne recommandent pas à un proche de suivre cette voie, évoquant en particulier des motifs financiers. Ce chiffre s'établissait à un peu plus de 40 % dans la précédente enquête 2019. De manière générale, l'étude révèle que plus de la moitié (52 %) des étudiants de second cycle considèrent être confrontés régulièrement à des difficultés financières. Un étudiant sur dix est à découvert chaque mois et un sur deux l'a déjà été au cours de l'année.
Dans son enquête, l'Anemf explique ce phénomène par l'augmentation constante du coût de la vie pointant la forte hausse (8,5 %) du coût de la rentrée estimée en moyenne 4 400 euros pour les étudiants entrant en second cycle des études médicales (et optant uniquement pour le tutorat).
L'explosion des coûts de loyer explique aussi cette situation. Ce poste représente 50 % des frais des étudiants, évalue l'Anemf, soulignant que près de 30 % des carabins rencontrent des difficultés à assumer cette dépense (25 % des étudiants en premier cycle et 32 % en second cycle). En 2019, cette proportion s'élevait à seulement 20 %.
Dans ce contexte inflationniste, 80 % des répondants ont déjà été amenés à limiter leur consommation de gaz ou d'électricité pour faire des économies. Un chiffre en augmentation de 30 % par rapport à 2019.
Répercussions sur la santé
Faute de moyens suffisants, les carabins sont aussi exposés à des problèmes de précarité alimentaire. D'après l'Anemf, plus d'un étudiant sur deux (55 %) ne mange pas à sa faim (contre 43,2 % en 2019). Et seuls 43 % d'entre eux déclarent disposer de ressources suffisantes pour manger équilibré. « Il existe bel et bien une offre de restauration à moindre coût mais certains étudiants n'ont pas toujours accès aux campus universitaires. Il est nécessaire d'étendre cette offre à tous les terrains de stage », plaide Jérémy Darenne.
La précarité sanitaire est également une réalité pour les externes. Depuis 2019, 27 % d'entre eux renoncent à des produits d'hygiène primaires pour des motifs financiers, révèle encore l'Anemf. Ils sont 18 % à éprouver des difficultés à payer leur complémentaire santé. Au total, 54 % des carabins considèrent leur situation financière comme une source d'anxiété, résume l'association.
Effort attendu sur les gardes
Pour changer la donne, l'Anemf appelle les pouvoirs publics à engager des mesures fortes. Elle appelle d'abord à un alignement de la rémunération des étudiants hospitaliers sur celle des autres étudiants stagiaires de même niveau d’étude, soit un équivalent de « 4,05 euros net par heure » contre 2,76 euros actuellement. L'ouverture du droit au maintien des bourses durant la période estivale pour les étudiants de second cycle figure aussi parmi les revendications. L'Anemf réclame de surcroît que l'indemnité de transport pour les stages soit basée sur la grille kilométrique de la fonction publique afin de s'adapter aux frais réels des étudiants qui effectuent des stages en périphérie.
Alors que 75 % des étudiants considèrent que l'indemnisation des gardes est essentielle parmi leurs sources de revenus, l'association revendique une revalorisation de 50 % des gardes au cours du second cycle (à l'instar de ce qui a été pérennisé pour les médecins hospitaliers). « Il est inacceptable qu’une partie du personnel, pourtant indispensable au service de garde de nuit n'ait pas accès à cette revalorisation, de plus lorsqu’il s’agit d’un public précaire ! », se désole Julie Le Saux, vice-présidente des affaires sociales. L'association doit rencontrer un des conseillers d'Aurélien Rousseau pour présenter son enquête et faire part de ses revendications.
* Plus de 5 000 étudiants ont répondu à l'enquête menée par l'Anemf du 17 février au 27 juin 2023. Ces résultats ont été validés par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil).
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