« C’est un refus du principe de légalité ! » Un mois après, Alexandre Brudon, vice-président du Syndicat des internes des hôpitaux de Paris (SIHP), ne décolère pas. Car, alors que le service des urgences adultes du CHU du Kremlin-Bicêtre n'était plus censé accueillir d’internes suite à son retrait d’agrément de stage par l'ARS en juillet dernier, la direction entend bien passer en force et imposer des gardes aux internes des étages et aux FFI. En théorie donc, lundi prochain, 1er novembre, les internes pourront à nouveau assurer les permanences de soins nocturnes dans ce service.
Pour rappel, après des mois d'alertes répétées, l’état des urgences de cet hôpital était devenu « inacceptable pour les internes comme pour les patients », rappelait le SIHP en juillet. Organisation anarchique, sous-effectifs, manque de matériel adapté… Des dizaines de témoignages d’internes passés par le service faisaient état de défaillances chroniques.
Après un mois de conciliation avec la direction, Alexandre Brudon estime que « nous avons été menés en bateau ». Les internes ont pourtant dressé une liste de revendications claires pour faire tourner le service. « Déjà, nous demandions de considérer le fait que les internes, n’étant plus dans un stage pourvu d’un agrément, ne pouvaient faire l’objet d’une simple affectation, détaille Alexandre Brudon. Car sans agrément ni subordination au chef de service, cela place les internes dans un exercice illégal de la médecine. »
Le syndicat demandait ainsi que les internes réalisant des gardes aux urgences de Bicêtre puissent l’être sur la base du volontariat. Une proposition refusée par la direction. Tout comme la demande d’une rétribution supplémentaire pour les internes volontaires. Le SIHP réclamait 400 euros brut par mois pour ce stage « qui n’a aucun intérêt pédagogie pour les internes », rappelle Alexandre Brudon.
« Une grève d’une insoupçonnable lourdeur »
Les internes reprochent notamment aux services des urgences un manque d’encadrement flagrant des juniors. « À partir de minuit, les internes sont quasiment seuls pour assurer le circuit long, pour le reste de la nuit, racontait par exemple un médecin en formation passé par le service. Les internes deviennent chefs et les externes internes. » Les syndicats ont ainsi exigé de la direction du CHU des embauches de seniors. Une promesse qui n'a, elle aussi, pas été tenue. « Il manque au moins la moitié des équivalents temps plein dans le service », souligne Alexandre Brudon. Soit 12 postes de plus pour ce pôle qui brasse plus de 60 000 patients par an.
Après l’échec des premières négociations, le SIHP vient d’annoncer au « Quotidien » le dépôt d’un préavis de grève, à partir du lundi 1er novembre, date théorique du début des stages du second semestre. En pratique, « tous les internes des étages, mobilisés aux urgences de façon illégale, vont pouvoir déposer une déclaration individuelle de grève, pour ne pas faire les gardes », précise Alexandre Brudon.
En d’autres termes, après une journée de travail dans les étages, au lieu de prendre sa garde à 18 h 30, l’interne gréviste rentrera chez lui. « Une grève à la fois invisible mais très pensante, d’une insoupçonnable lourdeur », prévient le vice-président du SIHP, qui avertit : « Nous attaquerons toute assignation qui sera faite aux internes. »
La seconde partie de la mobilisation se passera devant les tribunaux. Un référé en suspension vient d’être déposé aujourd’hui au tribunal administratif de Paris, « en vue de faire suspendre cette décision de permanence des soins illégale », ajoute Alexandre Brudon. En attendant, les internes restent ouverts aux contre-propositions de la direction et à la poursuite des négociations.
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