TOUT RESTE à faire sur la question explosive des comptes épargne temps (CET) des médecins hospitaliers. Fin décembre, le ministre de la Santé Xavier Bertrand avait tenté d’apaiser le courroux des quatre intersyndicales (1) à travers un accord-cadre pacificateur sur les conditions d’exercice à l’hôpital, censé (entre autres) régler la question des deux millions de jours de RTT hospitalières non posées depuis une décennie. Selon ce document, signé du bout du stylo par les syndicats, chaque praticien hospitalier (PH) ayant ouvert un CET se voyait proposer trois possibilités : poser ses jours stockés, se les faire racheter à 300 euros brut la journée ou les transformer en points retraite. Avenir hospitalier, « nouvelle » intersyndicale dont la représentativité n’a toujours pas été établie (malgré une deuxième place aux élections professionnelles), a été laissé au bord de la route des négociations.
Aujourd’hui, cette même intersyndicale s’alarme des propositions du ministère dans un projet de décret relatif aux CET des personnels médicaux, envoyé par e-mail il y a quelques jours aux syndicats, sans nouvelle date de concertation ni perspective aucune.
300 euros par jour, une mesure « ridicule ».
« On nous propose 300 euros brut par jour, explique le Dr Nicole Smolski, présidente d’Avenir Hospitalier. Moi, mon ancienneté m’offre un salaire au 13e échelon, le dernier, et cette somme est moitié moins importante que ce que je gagne actuellement. Cette mesure est ridicule car intéressante pour les jeunes médecins… pour qui le problème de RTT se pose fatalement moins que pour les PH plus âgés ». Une somme jugée également « dérisoire » pour le Dr Jean-Claude Penochet, nouveau président de la CPH et successeur du Dr Pierre Faraggi, qui souhaite « une valorisation de ce montant indexé au salaire du PH ». Pragmatique, le Dr Norbert Skurnik, président de la CMH, rappelle de son côté qu’« ayant signé l’accord-cadre, la CMH ne pratique pas le double langage. Certes, 300 euros, c’est peu, mais au moins c’est concret ».
Un coup d’épée dans l’eau.
Sur la possibilité de transformer ces jours de CET en points retraite, seul la CPH n’émet « pas de réserve particulière ». Le Dr Penochet n’apprécie guère le manque de choix accordé aux PH. « On ne peut épargner qu’auprès de deux organismes, explique-t-il, le Prefon et le Corem, et les avantages sont maigres. Autant placer son argent ailleurs ». Pour la présidente d’Avenir Hospitalier, « c’est de l’arnaque totale, puisque dans la proposition du ministère, l’employeur est déchargé de sa part patronale. On a fait des simulations, et on gagne presqu’autant en empochant les 300 euros, argent qui va générer des cotisations Ircantec, notre caisse de retraite habituelle, qu’en disant oui à leur système ».
Désormais, le contre-la-montre est lancé. À moins de trois semaines de l’élection du prochain président de la République, les syndicats ne se voilent pas la face. « Jamais le Conseil d’État n’avalisera ce projet de décret en si peu de temps, estime le Dr Smolski. C’est un coup d’épée dans l’eau ». Contacté par le Quotidien, le ministère n’a pas été en mesure de nous répondre.
(1) Coordination médicale hospitalière (CMH), Syndicat National des médecins, chirurgiens, spécialistes et biologistes des hôpitaux publics (SNAM-HP), Confédération des praticiens des hôpitaux (CPH), Intersyndicat National des Praticiens Hospitaliers (INPH).
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