« Vous savez ce que c'est, vous, cette pause qu'on nous annonce sur la réforme du financement des transports sanitaires ? Ça veut dire quoi ? Le lundi, on transporte les gens et le mardi non ? Cette réforme nous met tous dans la panade et nous rend même un peu ridicule. Voilà bien l'exemple d'une mesure pensée entre "technos" et le résultat d'un pouvoir qui avance sans écouter ! »
Lors de ses vœux ce jeudi à la presse, le président de la Fédération hospitalière de France (FHF) Frédéric Valletoux a ironisé sur le principe de « pause » dans la réforme des transports hospitaliers, suggérée par les experts de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) dans leur rapport ad hoc, rendu en fin de semaine dernière, et décidée ce mardi par le gouvernement.
Cette réforme transfère aux seuls établissements de santé (à l'origine de la prescription) la prise en charge financière des frais de transport interhospitaliers, coût partagé jusque-là entre la ville et l'hôpital. Initialement prévue dans le budget de la Sécurité sociale (LFSS) 2017, elle est entrée en application le 1er octobre 2018, exaspérant le secteur sanitaire et entraînant un mouvement de colère en fin d'année.
La disposition qui fâche le plus les entreprises de transport sanitaire est celle relative à l'attribution des marchés. En généralisant les appels d'offres pour attribuer l'activité des transports sanitaires, l'article 80 de la LFSS 2017 est accusé de provoquer une forme de dumping social à laquelle seuls les très grands groupes pourront résister, certaines petites entreprises ou indépendantes étant lésées.
L'IGAS réclame une clarification
« Nous allons travailler avec les services, avec les transporteurs pour améliorer les points de mise en œuvre qui posaient problème », a déclaré Agnès Buzyn qui exclut pour autant d'abandonner la mise en place de cette mesure. « Nous allons reprendre dans les semaines qui viennent cette réforme, évidemment avec les modulations qui auront été apportées [...]. Cela ne devrait pas durer des mois non plus parce que nous avons besoin de cette réforme. »
Dans son rapport, l'IGAS recommande non seulement « une pause temporaire dans son déploiement » mais fait également le diagnostic des dysfonctionnements qui ont causé une telle levée de boucliers de la profession.
Les experts recommandent ainsi de clarifier le champ d'application de la réforme, notamment en excluant la dialyse à domicile, en levant les doutes sur l'hospitalisation à domicile (HAD) et en réexaminant les permissions de sortie. L'IGAS dénonce aussi le manque de déclinaison territoriale de la réforme, causant un problème général de gouvernance et invite pour cela les pouvoirs publics à développer un mode de pilotage et d'accompagnement adapté à chaque territoire. Enfin, elle appelle à une véritable prise en compte de la diversité des offreurs de transport sanitaires et des établissements afin de ne pénaliser personne dans la mise en œuvre de la réforme.
Sur la méthode, l'IGAS préconise la publication d'un nouveau décret qui compilerait les différentes mesures correctives qu'elle propose. Il serait accompagné d'une circulaire d'application « comprenant notamment les étapes devant être retenues dans la conduite du projet, le cadre de pilotage et de gouvernance de la réforme, des questions - réponses opposables sur les différents volets utiles ».
En fin de semaine dernière, la Fédération hospitalière de France (FHF) a approuvé les conclusions du rapport, « à défaut d'une abrogation de la réforme pourtant souhaitée par la totalité des acteurs ». « Si l'IGAS, comme le ministère, répètent à l'envi que cette réforme ne présente pas d'objectifs d'économies, la FHF se pose alors cette question : pourquoi s'entêter ainsi ? » avait alors ajouté l'organisation.
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