Infectiologie

UNE HISTOPLASMOSE PULMONAIRE

Publié le 30/03/2018
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L’histoplasmose est une affection fongique d’importation rencontrée principalement en Amérique du Nord asymptomatique dans plus de 70 % des cas. Elle nécessite un traitement antifongique systémique chez les sujets immunodéprimés ou ayant une forme chronique.
Photo cas clinique

Photo cas clinique
Crédit photo : Dr Pierre Frances

Frédéric, 42 ans, consulte pour une asthénie qui fait suite à un épisode de dyspnée, toux et hyperthermie. Cette symptomatologie a débuté un mois auparavant, époque où il était au Canada (vallée du Saint Laurent) où il réaménageait de vieilles bâtisses. L’examen objective des adénopathies axillaires, et quelques sibilants diffus des deux champs pulmonaires. La radiographie montre une légère surcharge de la trame péri-bronchique para-hilaire droite et gauche (cf. cliché 1). Le bilan biologique (NFS, CRP, plaquettes, ionogramme, bilan hépatique et rénal) est normal. Compte tenu de l’apparition de ces manifestations au décours d'un séjour au Canada dans des lieux susceptibles d'héberger des fientes de volatiles, nous avons demandé une sérologie pour l’histoplasmose. Cette dernière s’est révélée fortement positive.

ÉPIDÉMIOLOGIE ET TRANSMISSION

L’histoplasmose est une pathologie infectieuse fongique du poumon secondaire à une contamination par Histoplasma capsulatum. C'est la plus fréquente des mycoses opportunistes d’importation, observée aux USA, au Canada (vallée du Saint Laurent), aux Antilles, en Amérique centrale ou du Sud et en Australie. Plus d'une dizaine de nouveaux cas issus de zones d'endémie sont décelés chaque année en France métropolitaine.

Moins grave, l'histoplasmose à Histoplasma duboisii est retrouvée en Afrique ou à Madagascar ; elle est responsable d’une atteinte cutanée ou sous-cutanée.

► La transmission s’effectue par voie aéroportée via les spores du champignon présents dans les sols enrichis en fientes d'oiseaux (pigeons, volailles, etc.) et de chauves-souris. Les patients contaminés sont surtout les agriculteurs ayant des élevages ou des poulaillers, les paysagistes manipulant du fumier de volaille, les ouvriers en bâtiment qui rénovent d’anciennes bâtisses occupées par des oiseaux. Les spéléologues qui visitent des cavités occupées par des chauves-souris peuvent également être contaminés.

La transmission interhumaine n’existe pas.

LA SYMPTOMATOLOGIE

► Suite à la contamination par H. capsulatum, les symptômes apparaîssent le plus souvent dans les 2 à 4 semaines après une exposition.

► Cinq formes cliniques sont identifiées :

— La forme asymptomatique (dans 70 à 80 % des cas). Seuls les examens complémentaires permettent de poser le diagnostic.

— La forme disséminée qui est objectivée chez les jeunes enfants. Il existe dans ce cas une dissémination à d’autres organes que le poumon. Cliniquement on observe une toux, une hépatosplénomégalie et une importante altération de l’état général.

— La forme respiratoire bénigne et aiguë. Il existe dans ce cas une toux, une asthénie, un train fébrile. Cette forme s’apparente à un syndrome grippal.

— La forme chronique disséminée. Elle se rencontre chez les immunodéprimés (dont VIH +), et touche tout le système réticulo-histiocytaire. Dans ce cas il existe une atteinte multiviscérale (buccale, cardiaque, hépatique, neurologique, ORL). Cette forme est rare, et grave (taux de mortalité avoisinant les 20 %).

— La forme pulmonaire chronique. Elle est présente chez les sujets ayant des pathologies fonctionnelles respiratoires (BPCO notamment). Elle se rencontre chez les sujets de plus de 40 ans en prenant la forme d’une tuberculose. 

LE DIAGNOSTIC

► Il repose avant tout sur l’interrogatoire du sujet. En ce qui concerne notre patient, la contamination sur les bords du Saint Laurent est connue de la population et des autorités sanitaires.

► Il est également possible d’effectuer un examen direct ou une mise en culture (selon la localisation : lavage broncho-alvéolaire, LCR, ponction de moelle, sérosités, frottis d’ulcérations).

Le laboratoire doit être informé de la possibilité d'une histoplasmose car le mycélium est très contaminant.

► Une recherche d’antigènes au niveau urinaire est possible. Cependant, il existe des réactions croisées avec les blastomycoses.

► Il est également possible (comme dans notre situation, mais aussi chez les patients immunodéprimés) de recourir au sérodiagnostic.

► La radiographie pulmonaire et la TDM thoracique peuvent objectiver des micronodules, des adénopathies médiastinales ou latéro-trachéales, des images de condensations alvéolaires, soit des éléments peu spécifiques.

LE TRAITEMENT

Pour les formes peu symptomatiques ou aiguës, il n’est pas indiqué.
Par contre, chez les patients ayant une histoplasmose pulmonaire chronique, il faut prescrire de l’itraconazole (400 mg/j durant 1 ou 2 ans).
En cas de formes disséminées, on peut administrer soit de l’itraconazole (400 mg/j), soit de l'amphotéricine B (3 à 5 mg/kg/j).

Bibliographie

1- Pilly E. Maladies infectieuses et tropicales. Ed. Vivactis plus 2017.
2- E-Pilly TROP. Maladies infectieuses tropicales. http://www.infectiologie.com/site/medias/enseignement/ePillyTROP/ePilly….
3- Nyffenegger L, Abbas L, Gex G, Boffi E, Schrenzel J, Bouchuiguir-Wafa K, Hirschel B. Cas importés d’histoplasmose. Revue Médicale Suisse 2009 ; 5 : 2418-2423.
4- Bourée P. Histoplasmose en forêt. Médecine et santé tropicale 2013 ; 23 (3) : 270-271.
5- Nyffengger L, Abbas M, Gex G, et al. Cas importés d’histoplasmose. Revue Médicale Suisse 2009 ; 5 : 2418-2423. 

 

Dr Pierre Frances Pierre (médecin généraliste, Banyuls-sur-Mer). Alvaro Ramos Fernandez (Interne en médecine générale. Programme Hippokrates. Madrid. Espagne). Nicolas Perolat (interne en médecine générale, 93 000 Bondy). Alisée Albert (externe, Mont

Source : Le Généraliste: 2829