Si les symptômes non spécifiques pouvant faire éventuellement évoquer une maladie grave ou un cancer sont légions en médecine générale, leur valeur prédictive positive est, en revanche, très faible. Par ailleurs, seulement la moitié des patients ayant un diagnostic tardif de cancer avaient des symptômes d’alarmes spécifiques initialement. Dans ce contexte, l’interprétation qu’en fait le médecin de premier recours et son « intuition » sont capitales et plutôt fiables comme le démontre une étude danoise publiée dans le British Journal of General Practice (1).
› Selon ce travail, la suspicion d’une maladie grave par un médecin généraliste aurait une forte valeur prédictive positive et justifierait des investigations supplémentaires même en l’absence de symptôme ou de signe clinique spécifiques.
› Pour arriver à ces conclusions, les auteurs ont demandé à 404 médecins généralistes d’enregistrer sur une journée les données précises concernant chaque patient venu au cabinet et d’indiquer s’il suspectait ou non une maladie grave ou un cancer à l’issue de la consultation. Au total 4 518 consultations ont été passées au crible et consignées tandis que le devenir ultérieur des patients était suivi grâce à un registre national.
› Parmi toutes ces consultations, 256 (soit 5,7 %) ont donné lieu à une suspicion de cancer ou de maladie grave par le médecin généraliste. Ces suspicions concernaient en priorité les hommes, les patients âgés, les patients atteints de maladies chroniques et les retraités. Par ailleurs, elles étaient plus fréquentes en cas de symptômes digestifs, hématologiques ou gynécologiques.
› Le diagnostic de maladie grave ou de cancer dans les deux mois suivant la consultation était plus fréquent lorsque le médecin avait suspecté quelque chose : HR = 2,98 pour toutes les maladies graves confondues, et HR = 7,55 pour les cancers seuls. Parmi les 42 patients pour lesquels la suspicion du médecin avait été confirmée, seulement 22 avaient des symptômes relatifs au diagnostic (HR = 52,4). La valeur prédictive positive de la suspicion des médecins était respectivement de 9,8 % dans les 2 mois et de 16,4 % dans les 6 mois suivant la consultation initiale.
› Pour les auteurs, ces résultats confirment qu’il est utile de donner suite au doute d’un médecin généraliste même en cas de symptômes mal définis ou aspécifiques. Et plaident pour que ces derniers puissent avoir, en cas de suspicion de maladie grave, un accès rapide aux investigations complémentaire ou aux consultations de spécialistes, ce qui ne serait pas toujours le cas au Danemark. Plus globalement, ces données montrent aussi que le « filtre » médecin généraliste, qui intègre les données cliniques pures à une connaissance plus globale du patient, avec une part d’intuition, fonctionne plutôt bien.
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