Lucien, 69 ans, souffre depuis cinq mois de son genou droit qui a été opéré deux fois par ostéosynthèse du fait d’une gonarthrose évoluée. La dernière intervention a été effectuée il y a 26 mois de cela. Nos collègues consultés lui ont administré des antalgiques, AINS, sans succès. Un bilan radiographique prescrit alors s’était révélé satisfaisant. Seule une élévation de la CRP à 36 (N <10 mg/l) était objectivable.
En examinant ce patient, nous notons une douleur lors de la palpation du compartiment interne du genou et lors de la flexion. Nous avons donc demandé un scanner et une scintigraphie osseuse (cf. photo 1). Cette dernière a permis de retrouver la présence d’une hyperfixation périprothétique diffuse à composante inflammatoire. Le chirurgien orthopédiste consulté a effectué une reprise chirurgicale, et a posé le diagnostic d’infection secondaire à la prothèse (identification d’un Staphylococcus aureus sur un prélèvement).
L’INFECTION LIÉE A LA PRÉSENCE DE MATERIEL
Actuellement, près de 90 % des patients opérés d’une prothèse de genou présentent de bons résultats.
Deux types de complications ont été répertoriées suite à la pose d’un matériel d’ostéosynthèse :
- Les complications précoces. Il peut s’agir d’une phlébite, d’un hématome d’un syndrome neuro-algo-dystrophique, d’une raideur du genou (favorisée par une mauvaise mobilisation créant des adhérences, par l’existence d’un important hématome ou par une inflammation).
- Les complications tardives sont des raideurs nécessitant une mobilisation, voire parfois une arthrolyse pour éliminer les adhérences. Des complications mécaniques peuvent survenir : instabilité du genou, usure prothétique, descellement ou fractures.
Hormis ces complications, l’infection peut survenir aussi bien en phase précoce que tardive, favorisée par l’interface entre la prothèse et le tissu osseux sous-jacent. Ce couple induit de nombreux remaniements, et la formation d’un biofilm (lieu de prolifération bactérienne dans une matrice extracellulaire).
La fréquence de ces infections est évaluée entre 0,5 et 5 % des cas pour des prothèses de genou.
- L’infection peut survenir de manière précoce (3 mois maximum après l’intervention) et dans ce cas l’inoculation de l’agent infectieux est exogène, peropératoire ou postopératoire. Le tableau clinique est alors bruyant : douleur du site d’intervention, hyperthermie, érythème, cicatrice anomale (désunie) et, parfois, présence d’un écoulement.
- Tardivement (entre le 4e et le 24e mois), le germe inoculé est moins virulent et, cliniquement, on ne retient qu’une douleur mal systématisée de la région opérée. La présence d’une douleur permanente suite à l’intervention doit alerter sur cette possible complication.
LE DIAGNOSTIC
Il est posé suite à l’isolement du germe pathogène (identification positive dans 10 % des cas). Il faut insister sur la qualité du prélèvement qui doit être effectué par ponction du foyer ou lors d’une réintervention.
Au niveau biologique, on retrouve dans plus de 95 % des cas une augmentation de la VS et de la CRP.
Au niveau paraclinique, on demandera surtout une TDM couplée à la tomographie à émission de positons, la scintigraphie osseuse simple ou aux leucocytes marqués.
LE TRAITEMENT
Il repose sur un nettoyage chirurgical. Dans le cas d’une infection objectivée précocement, le plus souvent avant 3 semaines.
Dans le cas d’une infection tardive, une reprise chirurgicale est aussi nécessaire. Elle peut s’effectuer en un temps dans le cas d’une documentation bactériologique de l’infection (en l’absence de germes multirésistants), et en l’absence de détérioration du tissu osseux, et en deux temps dans les autres cas. Une fenêtre thérapeutique de 15 jours avant la mise en place d’une nouvelle prothèse doit être observée. De cette façon on pourra effectuer des prélèvements et adapter le traitement antibiotique.
Le choix de l’antibiothérapie est conditionné par l’antibiogramme et la diffusion de la molécule au niveau du tissu osseux germe et sa résistance. Dans les cas complexes (germe multirésistant, destruction osseuse importante, échec d’une prise en charge précédente), on demandera conseil à une équipe pluridisciplinaire (infectiologues, biologistes, orthopédistes...).
Le plus souvent un traitement par voie IV est effectué initialement durant 15 jours ; traitement relayé par son équivalent par voie orale durant 2 à 3 mois.
Dans notre situation du fait de la présence d’un staphylocoque, nous avons administré une bi-antibiothérapie avec rifampicine (recommandée à titre systématique dans ce cas) et une fluoroquinolone sur une durée de 3 mois.
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