Dans le SII il n’y pas un mais plusieurs mécanismes physiopathologiques qui s’expriment par une même symptomatologie douloureuse à laquelle d’autres manifestations s’associent à des degrés divers.
Les troubles de la motricité
Les anomalies motrices ne concernent pas que le côlon mais aussi l’intestin grêle ; les mieux caractérisées ont été décrites au niveau de l’intestin grêle, surtout chez les patients diarrhéiques, avec une hyperactivité motrice survenant en période interdigestive et des salves de contractions jéjunales et de grandes contractions iléales.
Les troubles moteurs coliques sont moins nets et s’observent surtout en post-prandial. Ces troubles favorisent la rétention intestinale des gaz. Les perturbations motrices digestives ne peuvent résumer la physiopathologie des SII car leur coïncidence avec les symptômes, notamment les douleurs, est inconstante.
Une hypersensibilité viscérale « élément clé » dans la survenue des symptômes.
Au cours du SII, 50 à 60 % des patients souffriraient d’une hypersensibilité digestive. Il s’agit d’une hypersensibilité vraie puisque l’abaissement du seuil douloureux s’observe en dehors de toute modification des propriétés mécaniques de la paroi digestive.
Cette hypersensibilité s’observe surtout dans les SII à forme diarrhéique, 80 % des cas contre 52 % dans les formes SII constipés. Cette hypersensibilité n’est pas constamment limitée au seul intestin, elle peut concerner la partie haute du tube digestif, expliquant pourquoi le SII est souvent associé à une dyspepsie douloureuse ou un pyrosis fonctionnel.
› Plusieurs mécanismes, éventuellement associés, sont envisagés :
– une hypersensibilité périphérique avec sensibilisation des neurones afférents primaires de la paroi digestive par des médiateurs libérés notamment par les mastocytes situés au contact des terminaisons sensitives qui abaisseraient le seuil de la sensibilité de ces neurones.
– une hypersensibilité centrale secondaire à une hyperexcitabilité neuronale dans la corne postérieure de la moelle amplifiant les messages sensitifs d’origine digestive et/ou une perturbation de l’intégration de ces messages sensitifs dans le cerveau. L’IRM fonctionnelle a montré que l’hypersensibilité pourrait résulter d’un trouble de l’intégration cérébrale des afflux sensitifs digestifs avec la mise en jeu inhabituelle de certaines régions cérébrales impliquées dans l’intégration corticale de la douleur (2).
– les patients avec SII, les femmes en particulier, présentent un phénomène d’anticipation de la réponse douloureuse qui les conduit à rapporter une sensation douloureuse pour des stimuli de moindre intensité que les sujets normaux.
– l’hypersensibilité peut enfin résulter de perturbations du système des contrôles inhibiteurs diffus (CIDN) qui modulent la douleur en exerçant une activité analgésique.
Comment expliquer cette hypersensibilité ?
– Activation immunitaire. Une des hypothèses avancées serait un afflux dans la muqueuse des cellules immunocompétentes, de mastocytes et lymphocytes, ou leur activation accrue. Elles sensibiliseraient les neurones afférents primaires. Il existe une étroite corrélation entre le nombre de mastocytes, leur degré de dégranulation et la sévérité des symptômes. D’autres phénomènes sont décrits : expressions réduites des cytokines anti-inflammatoires, libération de sérotonine…
– Augmentation de la perméabilité intestinale. Une perméabilité intestinale accrue est un élément favorisant la pénétration s d’antigènes alimentaires et bactériens qui déclenche une réponse inflammatoire locale avec afflux de médiateurs de l’inflammation capables à leur tour de sensibiliser les neurones afférents primaires. Le stress joue également un rôle via l’un de ses médiateurs, le CRF (cortico-releasing-factor) qui majore cette perméabilité intestinale.
Les nouvelles pistes physiopathologiques
› Les perturbations du microbiote. Des données de plus en plus nombreuses renforcent cette hypothèse physiopathologique. Avec plusieurs arguments :
– les bactéries intestinales agissent sur la sensibilité et la motricité digestive ;
– le SII peut apparaître après une infection intestinale. L’existence de SII post-infectieux est désormais admise, ils représenteraient 15 à 20 % des SII après une infection bactérienne ou parasitaire. Le risque relatif de développer un SII est multiplié par 5 après une infection intestinale. Plusieurs facteurs influencent ce risque (durée longue de l’épisode, âge jeune, terrain anxieux ou dépressif) (2) ;
– au cours du SII, le microbiote peut être différent de celui de sujets témoins. Quantitativement, une pullulation microbienne endo-luminale est probable chez certains malades, notamment chez ceux souffrant de troubles de la motricité du grêle et peut contribuer au ballonnement. Qualitativement, des études font état de modifications de la flore endo-luminale.
Ces anomalies du microbiote pourraient être une explication à la fermentation colique excessive au cours du SII mais la confirmation du rôle délétère ne pourra être apportée que par des études interventionnelles avec des probiotiques et/ou des prébiotiques ou des antibiotiques.
› Un excès d’acides biliaires endo-luminaux. Cette piste physiopathologique très récente considère qu’une malabsorption des acides biliaires expliquerait l’accélération du transit chez au moins 30 % du patient soufrant d’un SII diarrhéique.
Le rôle des facteurs psychologiques et du stress
Le terrain psychologique et les troubles de l’humeur interfèrent avec la perception et l’intégration des informations sensitives d’origine digestive, en entretenant notamment un état d’hypervigilance à ces stimuli. Il est difficile de déterminer leur caractère primitif ou secondaire du retentissement de la symptomatologie sur la qualité de vie quotidienne.
Les communications bidirectionnelles entre le tube digestif et le système nerveux central impliquent les voies du système nerveux autonome ; des troubles psychologiques ou de l’humeur, fréquents au cours du SII, peuvent être responsables de perturbations de l’activité de ce système nerveux autonome.
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