Les urgences ferment la nuit à Moissac : les urgentistes en sous-effectif sont débordés par l’afflux des consultants que la désertification médicale fait se rabattre sur leur service. Ce qui se passe à Moissac se voit maintenant en bien des lieux affectés du même mal.
Le médecin généraliste en devenant Spécialiste de médecine générale (oxymore) a fait disparaître l’homme du praticien qui faisait le bonheur des familles et limiter le recours aux urgences. La durée des études médicales, dont l’accès privilégie les baccalauréats scientifiques, a été prolongée à 10 ans ! Pour quel avantage ?
Auparavant, l’accès était conditionné par l’obtention du P.C.B. (certificat de physique, chimie, biologie) délivré par la faculté des sciences, à la portée des littéraires. Après quoi, les études de base en vue du doctorat en médecine duraient six ans, exigeant la présence le matin à l’hôpital pour un enseignement clinique validé en fin de stage, les après-midi étant réservés aux cours et travaux pratiques. Cinq ans durant, tous les matins à l’hôpital (...) Et pour couronner le tout, une sixième année d’internat dans un service hospitalier.
L’étudiant faisait ainsi valablement le tour de la pathologie usuelle nécessaire pour exercer en omnipraticien. Sous ce régime, les étudiants de 5e année étaient autorisés à effectuer les remplacements dont l’offre ne manquait pas. C’est ainsi, que élève de l’école du service de santé militaire, je fus soumis à cette scolarité dans les hôpitaux de Lyon, puis Paris. Reçu docteur en médecine en 1954, je fus à même de mettre au monde mes enfants et de les soigner lorsqu’il le fallait.
La vocation n'est plus ce qu'elle était
De nos jours, nous ne manquons pas de médecins : 312 172 inscrits à l’Ordre au 1er janvier 2021, dont les deux tiers en activité régulière. La démographie médicale est complexe, avec un grand nombre de retraités dont beaucoup conservent une certaine activité, et une féminisation croissante. Mais la vocation n’est plus ce qu’elle était, et les 35 heures ont profondément modifié l’exercice professionnel.
La désaffection en certaines régions ne touche pas que les généralistes mais aussi des spécialistes : entre Castelsarrasin et Moissac, ces dernières années, dans le secteur libéral, les trois radiologues ont cessé leur activité sans être remplacés, et aussi deux pédiatres, trois gynécologues, deux dermatologues etc.
Dans l’urgence, car les réformes vont prendre du temps, le recours au service national, qui n’est que suspendu, pourrait plus rapidement que toute autre mesure mettre à la disposition des régions en difficulté les quelques milliers de médecins, hommes et femmes, indispensables pour éviter le pire.
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