Laits 2e âge

Souvent trop protéinés

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Publié le 01/04/2019
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LAITS BEBE

LAITS BEBE
Crédit photo : PHANIE

Inventé au début du XXe siècle, le lait en poudre a connu au fil des décennies de nombreuses évolutions technologiques pour s’adapter aux besoins nutritionnels des bébés et présenter des formulations les plus proches possible du lait maternel.

Au début des années 1970, la technique de cracking permet aux industriels d’affiner la composition de ces poudres et correspond à l’apparition des laits 1er âge et 2e âge (ou préparations de suite). Pour le docteur Alain Bocquet, pédiatre membre de la commission de Nutrition de la Société française de pédiatrie (SFP) et responsable du groupe de gastro-entérologie et nutrition pédiatrique de l’Association française de pédiatrie ambulatoire (Afpa), les raisons qui président à la création des laits 2e âge sont essentiellement dues à la nécessité de « permettre un apport suffisant en fer et maintenir la consommation de formules infantiles par l’enfant au-delà des six premiers mois en évitant le passage au lait de vache ».

L’utilisation du lait de vache coupé avec de l’eau et sucré en guise de transition alimentaire vers le 6e mois, en fin d’allaitement maternel, longtemps largement répandue, était problématique. « Le lait de vache contient trois fois et demie plus de protéines que le lait maternel. Il ne contient pas les bons lipides. Il apporte trop peu de fer à l'enfant. Enfin, il présente une teneur en sel trop élevée », explique le Dr Bocquet qui rappelle que ce lait « est fait pour des veaux qui ont un développement musculaire rapide, mais pas cérébral ». Les préparations de suite doivent être introduites dans l’alimentation de l’enfant entre le 4e et le 6e mois, en l’absence d’allaitement maternel, au moment où intervient la diversification alimentaire. Elles permettent de continuer l’apport lacté dont l’enfant a besoin et d’éviter d’avoir recours à des produits inadaptés.

Apports protéiniques 4 fois trop importants

Dans les faits, « il n’y a pas de différence majeure entre un lait 1er âge et un lait de suite et certains scientifiques estiment qu’on pourrait donner sans risque le premier jusqu’à trois ans sans jamais avoir recours au lait 2e âge », explique le Dr Bocquet qui tient cependant à préciser que « l’apport en fer majoré dans le lait de suite par rapport au lait 1er âge est un point important qui répond à la baisse des réserves en fer que l’enfant avait constituées avant sa naissance ». En revanche, les teneurs plus importantes en protéines de ces préparations de suite « ne sont absolument pas justifiées d’un point de vue scientifique et ne relèvent que de la décision des industriels », regrette le Dr Bocquet.

Si les compositions des différentes marques de laits 1er âge sont assez proches, « les fourchettes commencent à s’agrandir lorsque l’on passe aux laits de suite », fait remarquer le Dr Bocquet : « Là où les bons élèves présentent des teneurs en protéines de 1,2 g/100 ml, proches du lait maternel, d’autres montent jusqu’à 2 g/100 ml ». Bien que « la teneur en protéines de ces laits n’ait cessé de baisser grâce à nos interventions auprès des industriels, elle demeure généralement trop élevée », déplore le pédiatre qui rappelle que « toutes les enquêtes montrent que les enfants français en bas âge ont des apports quatre fois trop importants en protéines », notamment parce que les parents « donnent trop viande » et passent trop vite au lait de vache. Afin d’informer aux mieux les médecins et de leur fournir une aide à la prescription, l’Afpa a mis en ligne un site entièrement dévolu aux laits infantiles dans lequel sont notamment recensées et actualisées toutes les références commerciales et leur composition (www.laits.fr).

Benoît Thelliez

Source : Le Quotidien du médecin: 9737