Révolutions médicales - Les réponses à vos questions

Réflexions autour des nouveaux mode de procréation - l’énigme du désir d’enfant

Publié le 26/04/2016

Les questions des internautes du Quotidien du Médecin :

Peut-on/a-t-on tirer/tiré des enseignements du suivi psychologique des enfants nés de dons d'ovocytes ou de sperme anonymes ?

Réponse du Dr Reboul :
Les enfants des couples qui ont eu recours aux PMA ne sont pas désignés par la technique de leur conception. Ils sont des témoins de vie nés de l’élan de création que le désir et l’amour des parents ont mobilisé pour leur existence. L’expérience clinique nous rappelle tous les jours qu’il n’y a que des cas particuliers. Et qu’en tant que sujet humain, quel que soit le mode de sa conception, un enfant trouvera les ressources pour aborder l’énigme de l’origine et le mystère de la vie pour construire son destin. Notre rôle, si nous  le rencontrons, cet enfant, n’est-il pas de le reconnaître à cette place-là pour qu’il trouve à son tour cet élan de vie, source de liberté ?

Que pensent le Pr Frydman et ses invités du prêt d'utérus sans rétribution. Ne peut-il pas être une réponse au débat éthique sur la GPA ?

Réponse du Dr Reboul :
L’enfant n’est pas un dû mais un don. Certes, la gratuité est un progrès. Mais elle ne résout pas la question. D’autant qu’un don « oblatif » laisse surgir parfois une imprévisible agressivité. Pas de réponse pour tous. L’éthique n’est pas la morale, elle ne concerne que le singulier. C’est du cas par cas dont il s’agit. Et puis le risque physiologique de la mère porteuse est imprévisible et les conséquences d’une grossesse, nous le savons tous, peuvent être graves.

Réponse du Pr Frydman :
Il ne faudrait pas que l’arbre cache la forêt. Le prêt d’utérus sans rétribution est tout à fait exceptionnel. C’est un leurre. La rétribution étant officielle ou non officielle mais l’aliénation d’autrui pour son propre intérêt elle, est toujours présente, et c’est suffisant pour condamner toutes les formes d’oppression et d’utilisation de l’autre.

Quelles que soient ses causes, l'absence de descendance n'est-elle pas une question de société plutôt qu'une question médicale ?

Dr Reboul :
Un couple qui décline les variations de son désir d’enfant évoque la transmission, l’amour, la continuité. Le fantasme d’immortalité est aussi contenu dans le désir d’enfant. Influencé par le discours de la société, avoir un enfant est une reconnaissance. La société fait entendre même que la féminité dépend de la maternité. Ne pas « avoir » est donc, pour certains, une insupportable distinction. La frénésie du comblement dans une société de consommation situe le bonheur au niveau du besoin qui destitue le désir d’exister… mais la clinique me rassure toujours car une femme appréhende sa féminité avec son manque, son désir, son vide créateur, source de toute vie.

Quelles sont les perspectives ouvertes par la greffe d'utérus ?

Dr Reboul :
Les pas scientifiques vers la greffe d’utérus sont moins rapides que prévu… Le Professeur Frydman est mieux placé que moi pour en parler.

Pr Frydman :
La greffe d’utérus se développe. 18 équipes dans le monde se sont lancées mais il est trop tôt pour en faire le bilan même si l’équipe suédoise annonce 5 naissances sur 7 transferts d’embryons pour 9 utérus greffés. Incontestablement c’est une voix d’avenir.

L'utérus artificiel : science-fiction ou pas ?

Dr Reboul :
L’utérus artificiel est un matériel au service du développement de la vie. Cette perspective fait naître une espérance, mais la crainte aussi  d’une dérive d’exclure le sujet humain. Confier la vie à un matériel contenant est un danger. Le désir du sujet et du couple doit être interrogé au cas par cas. Le bonheur ne peut-être prédictible par une illusoire perfection supposée le contenir. Le corps est un corps parlant, influencé par le langage. Ce point est essentiel pour inventer sa vie et occuper son espace de liberté. La grossesse et le discours ambiant occupent un temps privilégié.

Pr Frydman :
C’est de la science fiction sans aucun doute car la placentation est très difficle à envisager artificiellement et de toute façon se pose la question des conséquences d’une telle évolution en milieu déshumanisé.

Pour écouter l'émission, c'est ici :


Source : lequotidiendumedecin.fr