Toux chronique

Quand la radio pulmonaire est normale

Par
Publié le 14/02/2019
Article réservé aux abonnés
radio pulmonaire

radio pulmonaire
Crédit photo : PHANIE

Lorsqu’elle survient après une infection virale, la toux initialement incoercible finit par céder. Une toux chronique post-infectieuse ne relève pas d’antibiothérapie (y compris la coqueluche) et si une cure de corticoïdes est envisagée, elle doit être de courte durée et à dose moyenne. En cas de tabagisme, l’arrêt du tabac s’impose.

Le Dr Roger Escamilla, pneumologue au CHU de Toulouse recommande de « toujours se poser la question de l’imputabilité d’un médicament (inhibiteur de l’enzyme de conversion, sartan, bêta bloquant…) sachant que la toux peut survenir des mois après l’instauration du traitement ». L’asthme, les toux d’origine ORL (principalement jetage postérieur, rhinosinusite, dysfonction des cordes vocales) et le reflux gastro-œsophagien sont les principales causes de toux chronique à radiographie pulmonaire normale. Souvent ces causes sont associées. Le syndrome d’apnée du sommeil doit également être évoqué surtout chez la femme obèse.

L’interrogatoire minutieux et dirigé du patient et l’examen clinique recherchent des éléments en faveur de ces principales étiologies. Notion d’atopie, circonstances de survenue, signes évocateurs d’allergie pour l’asthme ; typiquement pyrosis et régurgitations acides pour le reflux ; céphalées matinales, sommeil non réparateur, ronflements, somnolence diurne, HTA pour l’apnée du sommeil, etc. Ces diagnostics seront ensuite confirmés par les examens complémentaires appropriés (spirométrie, scanner des sinus…), ou par un traitement d’épreuve (IPP pour le reflux), avant le recours à une consultation de spécialiste.

Hypersensibilité à la toux

Quand la toux chronique reste inexpliquée réfractaire, elle peut être liée à un syndrome d’hypersensibilité à la toux (ou Cough Hypersensibility Syndrom). « Celui-ci correspond à un dérèglement transitoire ou permanent du réflexe de la toux (hypersensibilité des récepteurs périphériques, hypersignalisation cérébrale et défaut de régulation corticale). Cette neuropathie sensitive altère la qualité de vie des patients. La toux survient à un seuil plus bas pour des stimuli tussigènes (fumée de cigarette, odeurs fortes) et pour des stimuli inhabituels (rire, parole prolongée, certains aliments). Elle est sèche, invalidante, survenant volontiers par quintes incontrolables qui chez la femme peuvent déclencher des fuites urinaires », explique le Dr Escamilla.

Le diagnostic est à évoquer dans deux situations. Lorsque le bilan étiologique négatif fait envisager une toux psychogène et quand le traitement de la cause identifiée (sinusite, reflux gastro-œsophagien, asthme…) ne calme pas la toux. « La prise en charge de la toux change. Elle était toujours un symptôme associé à une maladie. Elle est désormais parfois un syndrome dans lequel les antitussifs habituels sont inefficaces et où il faut si besoin recourir aux antitussifs centraux. Des neurorégulateurs sont en développement (essais en cours avec la gabapentine, émergence de nouvelles molécules antiP2X3, récepteurs de l’ATP) », note le Dr Escamilla.

Enfin, de façon générale, dans un contexte de toux chronique où l’effet placebo est très fort, le spécialiste invite à ne rien négliger « la rééducation en cas de dysfonction des cordes vocales, les méthodes alternatives (acupuncture…), sans oublier les bonbons à la menthe, car le menthol agit sur des récepteurs de la toux avec un possible effet transitoire qui peut rassurer le tousseur : cette sédation de la toux peut être utile en société ».

Dr Sophie Parienté

Source : Le Quotidien du médecin: 9724