Par un incroyable hasard du calendrier, où plus vraisemblablement une volonté de ne pas être le second à publier, 2 articles publiés ce lundi décrivent les 3 premiers cas de patients souffrant d'une paralysie complète des membres inférieurs consécutive à une lésion médullaire, marchant à nouveau grâce à une association de stimulation électrique épidurale et médecine de réadaptation intensive.
Le cas du premier patient est décrit dans une lettre publiée dans « Nature Medicine » par les chercheurs de la Mayo Clinic, celui des 2 autres, pris en charge par l'institut Frazier de réhabilitation de l'université de Louisville (Kentucky), est décrit dans une communication brève publiée dans le « New England Journal of Medecine ».
Dans tous les cas, les patients avaient subi une lésion de la moelle épinière suffisante pour entraîner un déficit moteur et sensitif complet, caractérisé par un score Asia A, sans possibilité d'amélioration par la rééducation. Le patient traité à Rochester « a été pris en charge en médecine physique pendant 4 ans sans aucun résultat, explique le Pr Christin Zhao, du département de médecine physique et réhabilitation de la Mayo Clinic, ce n'est qu'après la greffe d'un dispositif de neuro stimulation que la même prise en charge a donné des résultats ».
Une technique à visée antalgique
La stimulation électrique épidurale a été, à l'origine, mise au point à visée antalgique. Plusieurs équipes ont récemment réalisé son potentiel thérapeutique. Le principe est de glisser via une incision au niveau du pelvis, deux électrodes dans l'espace épidural de la zone située entre les vertèbres L1 et les vertèbres sacrées. Le principe est de stimuler, au cours de la rééducation, les corps cellulaires des neurones contrôlant les muscles des jambes. Les électrodes sont placées sous la région lésée de la moelle épinière reliée à une batterie greffée sous la peau de l'abdomen. Après cette installation, des séances de rééducation intensives ont permis dans un premier temps aux patients de se tenir debout et de recouvrer une forme de stabilité thoracique puis, dans un deuxième temps, de marcher de nouveau.
De l'aveu même du Pr Zhao, et du Pr Kendall Lee, neurochirurgien et second coauteur de la lettre publiée dans « Nature Medicine », les mécanismes expliquant comment la stimulation électrique facilite les mouvements volontaires sont encore inconnus. « C'est un mystère qu'il faudra impérativement éclaircir, affirme le Pr Zhao. Nous devons comprendre la nature de l'interaction entre la rééducation et la stimulation électrique ». Cette dernière ne passe en tout cas pas par le rétablissement de nouvelles connexions nerveuses entre le tronc cérébral et les motoneurones des membres inférieurs, une autre approche testée chez la souris par les chercheurs de l'École polytechnique de Lausanne.
Entre 15 et 85 semaines d'entraînement
Le patient de la Mayo Clinic a été suivi pendant 43 semaines, et pouvait à la fin marcher sur un tapis roulant sans aide extérieur. Les 2 patients soignés dans le Kentucky ont, eux, bénéficié de respectivement 278 sessions d'entraînement sous stimulation pendant 85 semaines, et 81 sessions pendant 15 semaines. Tous deux parvenaient, selon les auteurs, à marcher, même en dehors du cadre très sécurisé d'un tapis roulant.
L'approche de la stimulation électrique épidurale suscite beaucoup d'espoir dans d'autres domaines de la rééducation. En juin dernier, des médecins californiens avaient décrit 6 cas de patients paralysés qui avaient regagné un certain niveau de contrôle de leur continence grâce à l'électrostimulation épidurale.
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