Dépistage des polypes colorectaux bénins

Pour la 1re fois, la prévalence du recours à la chirurgie évaluée

Publié le 17/12/2015
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L’étude a été publiée dans « Endoscopy ». Rétrospective, elle a évaluée pour la première fois dans la vraie vie, à l’échelle d’un département (Ile-et-Vilaine), le taux de recours à la chirurgie et les facteurs prédictifs de ce recours. Ont été retenues 3 475 coloscopies comportant au moins un polype sans cancer invasif, pratiquées par 22 gastro-entérologues réalisées de 2003 à 2012 pour un test Hémocult positif.

La taille du polype a un poids important dans le recours à la chirurgie (plus il est gros, plus il a de risque d’être opéré), puis le siège (côlon droit) et l’histologie. Mais les taux de chirurgie tous polypes confondus (4,5 %) et adénomes (5,5 %), varient respectivement de 0 à 16 % et de 0 à 20 % selon le gastro-entérologue.

À taille, siège et histologie identiques, le type de résection est opérateur dépendant : certains résèquent tous les polypes par endoscopie, d’autres confient près d’un patient sur 2 au chirurgien. Pour les polypes 20 mm, le taux moyen de chirurgie (22,3 %) varie de 0 à environ 50%. Pour des polypes ≥ 30 mm, le taux moyen de chirurgie est de 44 %.

Une expertise endoscopique (centre expert) peut éviter la chirurgie (la morbidité postopératoire est de 23 % soit 1 décès et 8 ré-interventions sur les 156 patients opérés) mais est rarement demandée (aucun opéré dans cette série). « Tout gastro-entérologue devrait avoir les compétences pour enlever les polypes ‹ 20 mm. Pour des polypes plus gros ou difficiles d’accès, des photos et vidéos devraient être systématiques avant de demander un avis auprès d’un expert. Le taux de chirurgie pourrait représenter un indicateur de qualité d’un programme de coloscopie dans une campagne de dépistage », estime le Pr Jean-François Bretagne.

La coloscopie est le seul examen colorectal permettant dans le même temps le diagnostic et le traitement par ablation des polypes. Mais l’examen reste invasif (risque de complications, 1/1 000 examens). D’où un taux de réalisation qui reste faible pour le dépistage en population générale (20 %) et dans la population à haut risque de cancer colorectal (40 %). Proposer plusieurs modalités de dépistage pourrait améliorer les couvertures de dépistage à la fois en population générale (le test fécal immunologique a une couverture nationale de la population cible d’en moyenne 30 %) et chez le sujet à haut risque.

La capsule colique, dans certaines situations

La capsule colique a démontré son intérêt pour le diagnostic des polypes et des tumeurs colorectales en alternative à la coloscopie dans certaines situations. Sa pratique n’est pas d’actualité dans le cadre du dépistage généralisé du cancer colorectal, notamment en raison du coût.

La capsule colique (27 mm de long) s’avale facilement (sauf exceptions). Au fil du trajet digestif, ses 2 caméras d’acquisition (avant et arrière) réalisent 2 films transmis à un récepteur externe qui permettent le diagnostic de polypes, tumeurs colorectales, angiodysplasies, diverticules, maladie inflammatoire. Son utilisation est contre-indiquée en cas de sténose digestive longue (maladie de Crohn et grêle radique notamment). Elle a l’avantage par rapport à la coloscopie d’éviter tout risque de perforation et d’anesthésie. Sa sensibilité pour la détection de polypes d’au moins 6 mm de diamètre (dépistage du cancer colorectal) est évaluée à 90 %. Une excellente préparation colique s’impose car aucun « lavage » des selles résiduelles n’est ici possible.

La capsule colique a été validée par les hépatogastroentérologues dans une cohorte nationale de 1 200 patients (124 centres) suivis pendant 3 ans dans 3 indications : contre-indication à l’anesthésie, impossibilité de terminer la coloscopie (5 % des coloscopies), patient refusant la coloscopie. L’étude a révélé un besoin pratique d’alternative à la coloscopie dans ces situations et permis de former à cet examen de nombreux gastroentérologues. Une procédure de reconnaissance de la capsule colique, puis de remboursement, est en cours auprès de la HAS dans ces 3 indications. L’indication la plus réaliste à court terme concerne les patients fragiles pour lesquels un examen plus lourd avec anesthésie peut ainsi être évité. Les atouts de la capsule colique sont sa sensibilité très acceptable, qualité d’image, quasi-absence de risque médical. Reste à résoudre des problèmes de coût de la capsule et son acceptabilité.

Dr Sophie Parienté

Source : Le Quotidien du Médecin: 9459