LE QUOTIDIEN - Quelles sont les recommandations actuelles concernant le THS ?
Dr ALAIN TAMBORINI - Les publications en juillet 2002 puis en août 2003 de deux grandes études, l’une américaine, la Women’s Health Initiative (WHI) et l’autre britannique, la Million Women Study (MWS), ont remis en question le rapport bénéfices-risques favorable du traitement hormonal substitutif (THS). A la suite de ces publications, l’EMEA, agence européenne du médicament, et l’AFSSAPS ont émis, le 3 décembre 2003, de nouvelles recommandations encadrant et restreignant l’emploi du THS (voir encadré).
Ces recommandations sont toujours en vigueur et régulièrement rappelées par les autorités de santé. Elles vont dans le sens de la prudence, de la vigilance et de l’emploi de THS justifiés, personnalisés, à doses réduites, chez des femmes informées et volontaires.
Existe-t-il des données concernant le risque mammaire des traitements employés en France ?
L’étude E3N (étude épidémiologique de l’Education Nationale) est une étude de cohorte prospective française de l’INSERM entreprise pour évaluer les facteurs de risque de cancer du sein. La cohorte se compose de 100 000 femmes de la MGEN, âgées de 40 à 65 ans en 1990, date de début de l’étude. Il s’agit donc de femmes françaises traitées par des THS « à la française ». Dans cette étude, il apparaît une différence de risque suivant les traitements employés : il n’y a pas d’augmentation du risque de cancer du sein avec les THS associant un estrogène à la progestérone naturelle micronisée ou à son isomère (la dydrogestérone), même lors de traitements de longue durée (six ans et plus) ; en revanche, E3N retrouve une élévation significative du risque de cancer du sein avec les THS employant les autres progestatifs.
Y a-t-il une durée limite au THS ?
Il n’y a pas de durée limite, « couperet », fixée arbitrairement et qui s’appliquerait à toutes les femmes quels que soit l’âge de leur ménopause, leurs symptômes, leurs facteurs de risque et aussi leurs desiderata. Un THS peut donc être poursuivi tant que persistent des troubles climatériques gênant et altérant la qualité de vie, chez une femme informée et volontaire. On peut, chaque année, suspendre le traitement pendant un ou deux mois, sans autre inconvénient que la réapparition éventuelle des bouffées de chaleur. Si les symptômes redeviennent gênants, on pourra reprendre le traitement.
Doit-on diminuer les doses d’hormones prescrites ?
Dans la grande majorité des cas, on peut utilement réduire les doses d’estrogènes habituellement prescrites. Les demi-doses sont aussi efficaces que les doses dites standard sur les troubles vasomoteurs et la sécheresse vaginale et peuvent préserver la densité minérale osseuse, tout en étant mieux tolérées. On peut toujours commencer par un traitement à demi-doses à l’essai sur une courte durée : dans environ 80 % des cas les troubles climatériques s’amendent rapidement dès le premier mois.
Comment informer les patientes ?
La patiente traitée doit toujours être informée et volontaire et il ne faut jamais imposer un traitement à une femme réticente. Compte tenu de la médiatisation des résultats défavorables des études anglo-saxonnes, l’inquiétude de nos patientes est compréhensible et perceptible lors des consultations. Il faut toujours les laisser exprimer leurs interrogations et leurs doutes éventuels et évaluer avec elles la pertinence de l’instauration ou de la poursuite du traitement hormonal. Il faut leur dire qu’on emploiera un traitement à la dose minimale efficace, limité dans le temps à la durée des troubles gênants et qu’elles seront bien surveillées au plan gynécologique et mammaire.
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