JAZZ-ROCK
Par Didier Pennequin
H ENRI SALVADOR, « M. Henri », à 83 ans, est un éternel adolescent. Sans jamais se départir de son légendaire rire - qui en fait cache une certaine timidité et beaucoup de pudeur -, Henri Salvador a traversé avec un certain bonheur près de soixante années de la chanson française. Parfois avec un immense talent, souvent grâce à quelques facéties et personnages - l'inoubliable « Zorro est arrivé » de 1965 - qui ont fait sa réputation d'amuseur public au détriment de celle de compositeur-interprète de classiques de la variété de qualité.
Né à Cayenne (Guyane) en juillet 1917, Henri Salvador, qui a d'abord été guitariste, est remarqué en 1941 par le célèbre chef d'orchestre français Ray Ventura, alors qu'il se produit dans un cabaret de la Côte d'Azur. Pour cause de guerre et d'antisémitisme, Ray Ventura emmène ses Collégiens en Amérique latine pendant cinq ans et le jeune Henri est du voyage. A son retour en France, après la dissolution de l'orchestre de Ventura en 1947, Henri Salvador se lance plus complètement dans la chanson avec deux compositions qui seront ses premiers succès : « Clopin clopant » et « Maladie d'amour » (1947).
Chanteur-caméléon
A partir de la fin des années 1940, l'auteur-compositeur va se transformer en chanteur-caméléon, une constante dans sa carrière. Ainsi il alternera la chanson rythmée, type jazz-swing et plus tard rock'n'roll, la chanson sentimentale grâce à une belle voix de crooner, la chanson amusante - celle qui retiendra le plus le grand public à partir des années 1960 - et, pour ne pas renier ses origines antillaises, la chanson exotique.
Il sera l'un des premiers, avec la complicité de Boris Vian, avec qui il écrira plus de 400 chansons, à introduire le rock'n'roll en France grâce à des tubes parodiques comme « Rock'n'rollmops » - interprété sous le pseudonyme de Henri Cording - ou « le Blues du taxi ».
Les années 1960 seront celles des grands succès populaires qui feront rire la France entière, suivis d'émissions de TV comme « Salves d'Or », qui feront exploser l'audimat dès 1970.
Après des années de silence et un dernier disque enregistré en 1994, M. Henri a retrouvé en l'an 2000 le chemin des studios pour un nouvel album, très dilettante, « Chambre avec vue » (Source/Virgin), qui s'est vendu à plusieurs centaines de milliers d'exemplaires et a valu à son interprète - enfin ! - deux récompenses aux dernières Victoires de la Musique (Artiste de l'année et Album de l'année). Pour ce CD, le chanteur a fait appel à Art Mengo et à Françoise Hardy, a invité l'harmoniciste de jazz Toots Thielemans, pour un authentique flirt avec la bossa et les musiques des îles.
En marge de cette nouveauté, le label Frémeaux & Associés, poursuit la réédition des premiers enregistrements d'Henri Salvador, dans des double CD supervisés par le collectionneur Daniel Nevers. Cette intégrale - dont le second volet, « Le loup, la biche et le chevalier », couvrant la période 1946-1950, vient de voir le jour - permet de retrouver d'autres aspects et facettes de la vie d'un artiste extrêmement appliqué et créatif, sérieux et fécond. Très éloigné de son personnage public.
Paris, Olympia, du 24 au 28 avril, 20 h 30.
Paris : le jazz fait la foire
L A première édition de la Fête des jazz de la Foire de Paris, l'année dernière, avait été un franc succès à la fois musical et populaire. Musical, car des centaines de jazzmen français et étrangers avaient pu s'exprimer sur trois scènes différentes. Populaire, car la Foire de Paris, à la porte de Versailles, draine environ 800 000 visiteurs chaque année et certains auront ainsi pu écouter du jazz pour la première fois de leur vie !
Forts de cette expérience, les organisateurs, avec l'aide d'André Francis comme directeur artistique, ont décidé de remettre ça du 27 avril au 8 mai. Cent quinze formations, 615 musiciens, 139 concerts : voici quelques chiffres pour la deuxième édition, qui déclinera différents thèmes et qui invitera toutes les formes de jazz.
Pour fêter à la fois le 75e anniversaire de la naissance et les 10 ans de la disparition de Miles Davis, la journée de clôture du 8 mai sera entièrement consacrée au divin trompettiste, avec des formations emmenées par des trompettistes (François Chassagnite, Eric Le Lann, Flavio Boltro) et le Big Band Lumière de Laurent Cugny. Autres thèmes : une journée autour de la batterie (6 mai), avec Daniel Humair, Bertrand Renaudin, André Ceccarelli et le trio Sud, Simon Goubert ; une soirée Femmes des jazz (1er mai), avec la jeune Américaine Sarah Morrow (trombone), Deborah Seffer (violon), Natalie Lorier et Sophia Domancich (piano) ; et une journée consacrée à la nouvelle génération des jazzmen hexagonaux (29 avril), avec notamment Jean-Michel Pilc (piano). Sans oublier un concert de prestige en nocturne avec la rencontre entre Didier Lockwood (violon) et le grand orchestre d'Antoine Hervé (4 mai).
Du New Orleans au néo-be-bop, de la fusion au modern jazz, du jazz biguine à la musique gitane, tout ce que la France compte de formes de jazz seront présentes pendant 12 jours, à travers entre autres des musiciens comme Alain Jean-Marie, Claude Bolling, Claude Tissendier, Marcel Zanini, Patrick Saussois, André Villeger, Christian Escoudé, Stan Lafferrière, Biréli Lagrène, Laurent de Wilde ou Mukta.
Paris, Porte de Versailles, du 27 avril au 8 mai, concerts à partir de 13 heures tous les jours.
BLOC-NOTES
Michel Portal/Richard Galliano
Multi-instrumentiste - il pratique les clarinettes, les saxophones et même le bandonéon, cet étrange accordéon venu d'Argentine mais originaire d'Allemagne -, Michel Portal est un musicien-compositeur-interprète très connu pour son éclectisme musical, allant de la musique classique et contemporaine au jazz et à la musique improvisée la plus expérimentale, et pour ses associations insolites. Après avoir goûté récemment aux joies d'une musique particulièrement funky avec une pléiade de jazzmen made outre-Atlantique, il retrouve un ancien complice, l'accordéoniste Richard Galliano, pour un duo acoustique dont les maîtres mots sont l'échange et le dialogue. Une rencontre toujours explosive car réunissant deux Sudistes, l'un de Bayonne, l'autre de Nice, et surtout deux grands instrumentistes jamais en mal d'inspiration.
Paris, Cité de la Musique (01.44.84.44.84), 27 avril, 20 h.
CD : Richard Galliano, « Gallianissimo ! » (The Best of R.G.) (Dreyfus Jazz). Michel Portal, « Minneapolis » (Universal Jazz).
Archie Shepp
Un vent de liberté a soufflé cet hiver sur les principaux festivals de jazz et a ramené le grand saxophoniste-ténor Archie Shepp, héros du free jazz et de la new thing (nouvelle chose), voici plus de 35 ans, au tout premier plan, notamment avec son vieux complice Roswell Rudd (trombone). A bientôt 64 ans, Shepp, qui chante et joue de plus en plus du piano, reste une figure légendaire d'un jazz qui se voulait révolutionnaire et revendicatif des droits des Afro-Américains. Aujourd'hui, ces combats font partie de l'Histoire et Archie Shepp, avec comme invités Glen Ferris (trombone) et Eric Le Lann (trompette), poursuit un travail de recherches fondé sur le répertoire et le blues.
New Morning (01.45.23.51.41), 27 avril, 21 h.
CD : « Line in New York » (avec Roswell Rudd) (Universal Jazz).
Michele Hendricks
Digne fille de son père, Jon, Michele est une importante chanteuse dans le domaine des standards et autres classiques du jazz, même si son nom n'apparaît que rarement dans les promotions et le marketing. Sa filiation est une garantie et son timbre de voix colle parfaitement à sa personnalité.
Paris, Maison de Radio France (01.56.40.15.16), 28 avril, 17 h 30 (avec en première partie le trio du contrebassiste Jean-Philippe Viret).
Laurent Cugny & Big Band Lumière
Le pianiste-chef d'orchestre-compositeur-arrangeur et écrivain Laurent Cugny, qui vient de lancer la Maison du jazz, poursuit avec une très grande opiniâtreté son travail de recherche à la tête de son grand orchestre, baptisé Lumière. Un travail et une constante qui permettent d'entendre une des meilleures et plus régulières grandes formations françaises.
New Morning (01.45.23.51.41), 24 avril, 21 h.
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