L’une des grandes questions actuelles concerne le moment optimal pour débuter l’épuration extrarénale (EER), en dehors des situations d’urgence métabolique mettant en jeu le pronostic vital à court terme où elle doit bien sûr être immédiatement mise en route. Dans les autres cas, ce « timing de l’EER » fait l’objet de débats; deux études randomisées publiées en 2016 ont tenté de répondre à cette question.
Précoce ou tardive
L’étude AKIKI, essai multicentrique français, n’a pas montré de différence de mortalité entre un début précoce de l’EER (défini comme l’atteinte du stade KDIGO 3) et un démarrage très tardif, après avoir attendu la survenue d’une urgence métabolique ou le développement d’une surcharge hydrosodée majeure. « Les résultats de cet essai nous incitent à temporiser avant d’initier l’EER, qui a ses risques propres », explique le Pr Thomas Rimmelé, anesthésiste réanimateur à l'hôpital Édouard Herriot, Hospices civils de Lyon.
Mais l’étude ELAIN, travail monocentrique allemand ayant inclus majoritairement des patients en postopératoire de chirurgie cardiaque, souligne à l’inverse les bénéfices d’un démarrage précoce, dans les 8 heures suivant l’atteinte du stade KDIGO 2. Il s’accompagne en effet d’une réduction de 15 % de la mortalité à J 90, comparativement à un démarrage plus tardif, dans les 12 heures suivant l’atteinte du stade KDIGO 3. « La question n’est donc pas tranchée et on espère que les résultats de deux autres études, en cours d’inclusion, IDEAL-ICU et STARRT-AKI, permettront d’apporter une réponse plus claire », précise le Pr Rimmelé.
Continue ou intermittente
Une autre question concerne l’éventuel impact de l'effet de l’EER, continue ou intermittente, sur la récupération rénale après AKI sévère. « Il semble très difficile de conduire une grande étude randomisée comparant les deux stratégies. Les études observationnelles suggèrent, les unes après les autres, une association entre l’EER continue et une meilleure récupération rénale », indique le Pr Rimmelé.
En revanche, dans le domaine de l’anticoagulation des circuits d’EER continue, des études randomisées sont venues confirmer les bénéfices indiscutables de l’anticoagulation régionale au citrate, qui a certes ses propres complications métaboliques, mais qui permet de diminuer le risque hémorragique et d’accroître la durée de vie des hémofiltres.
Enfin, parmi les évolutions récentes, il faut se réjouir de la prise de conscience des réanimateurs de l’importance de la dose d’épuration réellement administrée au patient, celle-ci devant être la plus proche possible de la dose prescrite. « Les équipes sont devenues plus réactives, ce qui permet d’optimiser au mieux la dose d’épuration », conclut le Pr Rimmelé.
Entretien avec le Pr Thomas Rimmelé, anesthésie-réanimation, hôpital Édouard Herriot, Hospices civils de Lyon
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