Mort de Georges Duhamel, médecin, écrivain et poète, membre de l’Académie Française. L’auteur de la « Chronique des Pasquier » a grandi dans le XIIe arrondissement de Paris où son père Pierre-Emile, personnage fantasque, après avoir été marchand de bonbons et herboriste s’était découvert sur le tard une vocation pour la médecine, obtenant son diplôme de docteur à 50 ans après avoir présenté une thèse sur « L'alcoolisme chez les enfants et contribution à l'étude de l'alcoolisme chez les adultes ». Parmi les membres du jury se trouvait un Dr Proust qui n’était autre que le père de l’auteur d’« A la recherche du temps perdu ».
Malgré divers déménagements en grande partie dûs à la carrière médicale cahotique de son père – une quarantaine en quelques années, de Paris à Montreuil-sous-Bois en passant par Le Havre et Nevers –, le virus de la médecine va à son tour toucher le jeune Georges, d’abord sous forme de jeu avec sa sa sœur Louise qu’il opère « d'une maladie heureusement imaginaire en tâchant de lui introduire un caillou long et d'ailleurs trop volumineux pour pénétrer vraiment par la narine et lui faire le moindre mal » ou avec les serrures de la maison familiale sur lesquelles il fait des expériences chirurgicales, « le couvercle de la boîte à lait fixé au front par le moyen d'un ruban, aux doigts l'une de ces petites lampes à essence que l'on appelait alors lampes pigeons ».
Après avoir passé son baccalauréat en 1902, Duhamel tout en commençant à s’adonner aux plaisirs de la littérature, commence ses études à la Faculté de médecine où il a parmi ses maîtres, un certain Dr Renon dont il se souviendra plus tard affectueusement : « Son infirmité n'était pas sans exercer une influence indirecte sur ses entreprises thérapeutiques. Tout le monde, en ce temps-là, prescrivait le cacodylate de soude en injections hypodermiques. M. Renon renonça presque tout de suite à ce bon médicament parce qu'il
ne pouvait en prononcer le nom sans de douloureux accrochages ». Ce professeur fit aussi comprendre à Duhamel que « les sciences de la vie sont souvent condamnées à de multiples tâtonnements » et « qu'il ne faut jamais rire des pratiques des ancêtres, que la médecine périodiquement reprend toujours les mêmes expériences en s'appuyant sur de nouvelles notions théoriques ».
« Ah, mon pauvre, qu’il est douloureux de gagner sa vie ! »
Puis après un stage d’obstétrique à l’hôpital Saint-Louis, arrive le temps des remplacements et on le retrouve à Prunay, dans le Cher, où il s’ennuie fermement écrivant à un de ses condisciples dans une lettre qu’il signe « Georges Duhamel, devenu pour les nécessités actuelles Dr Georges Duhamel » : « Ah, mon pauvre, qu’il est douloureux de gagner sa vie ! »
Le 25 novembre 1909, Duhamel présente sa thèse de médecine qui a pour sujet « L'acide thyminique dans la thérapeutique des maladies goutteuses ».
La même année, il se marie avec l’actrice Blanche Albane dont il aura trois fils, Antoine qui deviendra un célèbre compositeur , les deux autres épousant la carrière médicale : Bernard comme chirurgien pédiatre et Jean comme proctologue infantile.
Duhamel avait dédié, outre ses parents, sa thèse à George Rebière, un pharmacien de première classe qui va le faire entrer à mi-temps au laboratoire Clin-Comar où il va travailler sur les métaux et métalloïdes en solution colloïdale.
« J’ai le grand bonheur et le grand honneur d’être médecin »
Mais, bientôt, en 1914, la première Guerre mondiale éclate et Duhamel s’engage dans l’active alors qu’il avait été auparavant réformé en raison de ses problèmes de vue. Pendant quatre ans, il va occuper les fonctions de médecin aide-major dans des unités d’auto-chirurgie, se retrouvant en plein cœur des combats comme à Verdun en 1916. Il expliquera bien plus tard les raisons de son engagement : « J'ai le grand bonheur, le grand honneur d'être médecin, d'avoir été tout au long de la Première Guerre employé comme médecin. Enfin, nommé officier dès le début des événements, je n'ai pas eu à souffrir de certaines épreuves qui, pour l'homme du rang, s'ajoutent à toutes les tristesses et toutes les humiliations de la guerre. Je n'ai pas été
parmi ceux de qui le terrible devoir était de donner la mort. Je n'ai donc pas le droit de me plaindre et je n'y ai pas songé. »
Rendu à la vie civile en 1918, Duhamel va désormais se consacrer à plein temps à son immense œuvre littéraire qui lui vaudra d’être élu à l’Académie Française le 21 novembre 1935 au fauteuil n° 30. Il sera également élu à l’Académie de médecine en 1937.
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