Le déficit de la Sécurité sociale est en repli mais le chemin est encore long avant un retour à l’équilibre des comptes sociaux, estime la Cour des comptes dans son rapport 2012 sur l’application des lois de financement, rendu public ce jeudi. En 2011, le déficit du régime général et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) s’élève à 20,9 milliards d’euros (soit 1 % du PIB), contre 28 milliards d’euros en 2010 (1,4 % du PIB). Un mieux, qui ne saurait pourtant occulter un niveau exceptionnellement élevé du déficit du régime général, à 14,7 milliards d’euros en 2012, supérieur aux objectifs fixés par la loi de financement. « La dette sociale se creuse de nouveau », préviennent les sages de la rue Cambon.
• Comptes sociaux : l’anomalie de la dette
Le retour à l’équilibre s’éloigne pour toutes les branches. Pour l’assurance-maladie, tout dépendra de la maîtrise de l’objectif national des dépenses (ONDAM). Fixé à 2,7 %, l’équilibre n’est envisageable qu’en 2019. Au total, près de 60 milliards d’euros de dettes sociales s’accumuleront d’ici à 2020 en plus des 62 milliards transférés à la caisse d’amortissement (CADES). C’est une « anomalie profonde qui ne peut continuer à être reportée davantage sur les générations futures », estime la Cour. « Les efforts sont certes de grande ampleur, mais en aucun cas hors de portée », estiment les sages. Plutôt qu’une diversification des ressources de la Sécu, ils préconisent l’augmentation des marges d’efficience.
• Agences régionales de santé (ARS) : un pilote qui n’a pas encore les coudées franches
Les 26 ARS, créées en 2009 pour devenir « clé de voûte » de l’amélioration de l’efficacité du système de santé n’ont pas encore toute l’envergure qu’elles devraient avoir. Si la Cour des comptes salue leur installation performante, elle épingle leur capacité à remplir leur rôle en toute autonomie. Premier mis en cause, le conseil national de pilotage (CNP) est jugé « peu stratégique », en ce qu’il donne aux ARS des objectifs trop généraux. Les contrats signés avec les ministères concernés se révèlent mal adaptés aux spécificités régionales et, avec leur succession d’objectifs chiffrés, trop administratifs. La Cour reproche ensuite aux administrations centrales de ne pas prendre en compte la spécificité (notamment leur transversalité) des ARS et de fonctionner comme par le passé en leur transmettant des demandes segmentées (hôpital, soins de ville, etc.) sans passer par le CNP. L’assurance-maladie notamment rechignerait à déléguer ses prérogatives en matière de gestion du risque et les préfets entretiendraient des relations complexes avec les directeurs d’ARS. Enfin la Cour attire l’attention des ARS sur la priorité d’investir dans les systèmes d’information et d’améliorer leurs leviers financiers : elles n’ont un pouvoir de décision que sur près de 3 milliards d’euros de ressources (sur 42 milliards) et devraient voir leur capacité d’arbitrage financier augmenter.
• Respect de la déontologie médicale : l’Ordre ne fait pas la police sur les dépassements
La Cour des comptes dénonce le rôle « trop limité », « inefficace » et « décevant » de l’Ordre des médecins dans le contrôle du respect du tact et de la mesure. Alors que les dépassements représentent près de 2,5 milliards d’euros en 2010, elle estime que les initiatives pour contrer les excès sont insuffisantes, les saisines des instances disciplinaires, rares, et les condamnations, peu sévères et souvent adoucies pour le médecin au niveau national. Les sages soulignent également que, face à une telle inertie, l’assurance-maladie s’est vue dans l’obligation d’élaborer ses propres procédures de contrôles : des dispositifs aujourd’hui redondants.
Par ailleurs, les sages recommandent à l’État de doter le Conseil de l’Ordre de pouvoirs renforcés en matière de contrôle des conflits d’intérêts entre médecins et industrie.
• Prise en charge des cotisations sociales des libéraux : un joli cadeau sans contrepartie
L’assurance-maladie dépense 2,2 milliards d’euros par an pour prendre en charge les cotisations des médecins libéraux des secteurs 1 et 2. Une « contribution substantielle aux revenus », note la Cour : pour les médecins de secteur 1, cela représente 18 % de leur revenu en 2008. C’est 16 % pour le secteur 2. Mais il n’y a pas de contrepartie réelle en termes de facilité et d’équité d’accès aux soins, dénonce-t-elle. Elle recommande donc de recentrer le dispositif sur l’objectif d’une meilleure répartition des professionnels de santé sur le territoire en le modulant en fonction de la zone d’installation. Elle suggère aussi d’exclure de l’assiette des « revenus tirés de catégories d’actes donnant lieu à des dépassements quasi systématiques » et de conditionner cette prise en charge au respect de certains plafonds. Le cas échéant, cette participation pourrait être remise en cause.
• Dépenses de transports des patients : vers un contrôle des prescriptions
En 2010, l’assurance-maladie a consacré 3,5 milliards d’euros à la prise en charge des transports de patients, un montant en forte progression, sans que les raisons en soient analysées. La Cour des comptes table sur 450 millions d’économies réalisables chaque année. Ses pistes : contrôler le respect du référentiel de prescription, notamment en matière de transport en ambulance, onéreux, ou de la vérification du lien avec une affection de longue durée, responsabiliser les médecins des établissements de santé, plus gros prescripteurs, contingenter plus rigoureusement l’offre de transport, instaurer un conventionnement strict des taxis, et systématiser la lutte contre la fraude.
• Soins de suite et réadaptation (SSR) : fluidifier les relations entre sanitaire et médico-social
Les SSR ont coûté 7,8 milliards d’euros en 2012. L’expansion rapide du secteur n’a pas été maîtrisée ni pilotée. Il en résulte aujourd’hui une mauvaise régulation et pour les patients des délais et orientations inadéquats dans leur entrée en SSR comme dans leur sortie. La Cour des comptes appelle les ARS à en faire une priorité et juge « prématuré » le passage à la tarification à l’activité.
• Qualité des soins : évaluer périodiquement les médecins et équipes médicales
Depuis 2004, la Haute Autorité de santé (HAS) mène la procédure de certification des hôpitaux pour la bagatelle de 22,4 millions d’euros. Mais la Cour observe un « risque d’atténuation de son efficacité ». Elle recommande à la HAS de préciser le périmètre de la certification et d’évaluer périodiquement médecins et équipes médicales, tâche qui constitue « actuellement un angle mort de la procédure », ainsi que les activités à risque, et de simplifier les résultats publiés dans ses rapports. Enfin, les contrats d’objectifs et de moyens signés entre ARS et établissements devraient intégrer les résultats de la certification, pour permettre un suivi de l’application des recommandations de la HAS et développer une culture pérenne de qualité des soins.
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