SANS ENTRER dans le détail des multiples renseignements dont le journal du soir a l’exclusivité, l’impression que l’on retire de cette lecture est que l’arbitrage a été monté de toutes pièces par Bernard Tapie lui-même, par son avocat, Maurice Lantourne et par Stéphane Richard, alors chef du cabinet de Christine Lagarde, avec la complicité active de l’un des trois juges arbitraux, Pierre Estoup. MM. Lantourne, Estoup et Richard ont été mis en examen pour « escroquerie en bande organisée », chef d’inculpation particulièrement sévère. L’autre impression est que Mme Lagarde a pu être dupée (sa signature figure au bas d’un document qu’elle estime ne pas avoir lu), et que les deux autres juges, Pierre Mazeaud et Jean-Denis Bredin, ont joué un rôle particulièrement discret, abandonnant à M. Estoup l’examen des pièces du dossier et se contentant, au terme du processus, d’approuver l’indemnisation.
Une affaire d’État.
C’est une affaire d’État dès lors qu’il y a un doute sérieux sur les conditions dans lesquelles la somme de 403 millions d’euros a été établie, que la ministre de l’Économie de l’époque aurait été très mal informée par son directeur de cabinet, qu’un président de la République aurait milité pour que M. Tapie obtînt ce qu’il réclamait et que l’État incarné par le pouvoir socialiste d’aujourd’hui entend récupérer la somme par le biais d’un nouveau procès. Jusqu’à présent, Nicolas Sarkozy, particulièrement silencieux sur cette affaire, n’a pas encore été inquiété par les juges, alors que, dans le cadre de l’instruction portant sur l’abus de faiblesse dont Liliane Bettencourt aurait été victime, il semble sur le point de sortir indemne de ses démêlés avec la justice.
On éprouve un malaise intense devant le spectacle qu’offre la classe politique. Elle réagit avec des arguments inconsistants à sa mise en cause dans nombre de scandales, depuis celui qu’a causé Jérôme Cahuzac jusqu’à celui des indemnités versées à M. Tapie. On n’est pas rassuré non plus par le comportement des juges : dans le cas de l’instruction de l’affaire Bettencourt à Bordeaux, la partialité du juge Jean-Marie Gentil a été mise en cause par les avocats des nombreuses personnes qu’il poursuit. À Paris, sans que l’on remette en cause le professionnalisme du « Monde », on voit bien que le journal est régulièrement alimenté en informations par des sources que l’on ne souhaite pas désigner mais qui se situent probablement au niveau de la justice. Si les journalistes ne sont pas tenus de respecter le secret de l’instruction, les juges, eux, y sont astreints.
UN SCANDALE, CERTES, MAIS AUSSI L’ACHARNEMENT DE LA JUSTICE
En d’autres termes, la bataille entre magistrats et politiciens poursuivis semble recouvrir des arrière-pensées et un combat politique d’une toute autre nature que l’exercice serein de la justice.
Sans céder à la thèse du complot, l’on constate aussi que, quel que soit le degré de culpabilité de Nicolas Sarkozy (pour le moment, et en dépit de la publication de longs et foisonnants articles, il se situe entre « nul » et « très élevé »), on perçoit un acharnement démesuré du pouvoir contre l’ex-président. Quatorze mois après l’alternance, le président et son gouvernement continuent à expliquer leurs difficultés par l’héritage empoisonné que leur a laissé M. Sarkozy ; ils se flattent d’éviter toute intrusion dans le travail de la justice, sans mentionner le fait que, en ce moment, tout ce qu’elle fait leur est utile. Il se peut qu’il s’agisse d’un simple hasard, que la corruption soit dix fois pire à droite qu’à gauche ; et ils tentent de prouver qu’ils n’interviennent pas dans l’instruction de l’affaire Cahuzac. Mais la gauche n’est pas exempte de ses propres travers. Et il y a, dans l’argumentation du pouvoir, une hypocrisie embarrassante pour lui et exaspérante pour ceux qui l’observent. Il faut qu’il veille à ne pas sembler excessivement vindicatif : l’électorat finira par croire que M. Sarkozy, son possible retour en politique et les moyens de l’empêcher sont devenus l’obsession du président Hollande.
Enfin, on attend impatiemment la réponse à une question simlple : pourquoi Nicolas Nicolas Sarkozy aurait-il accordé tant de mansuétude à Bernard Tapie ? Comment le soutien politique de l’homme d’affaires en 2007 pouvait-il valoir 403 millions d’euros ? De quelle manière l’ancien ministre de François Mitterrand, le radical de gauche, l’homme au passé et au présent sulfureux pouvait-il avoir prise sur un président de droite ? Si la justice n’apporte qu’une partie de la vérité, le problème de la corruption en France ne sera pas résolu. C’est la vérité tout entière qu’il nous faut.
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