Pour le Dr Frémont, la bataille de Verdun n’est pas encore terminée

Publié le 26/06/2014
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Urgentiste et médecin légiste à l’hôpital de Verdun, le Dr Bruno Frémont vit toujours au rythme de la Grande Guerre : régulièrement appelé au secours de curieux qui se sont blessés, ou tués, en ouvrant des obus ramassés sur le champ de bataille, il identifie aussi les restes de soldats que l’on retrouve encore très souvent dans les zones de combats.

« Il ne se passe pas une année sans un accident mortel avec des obus ramassés dans la forêt », explique le Dr Bruno Frémont, dont la hantise principale reste les obus aux gaz de combats. « De soi-disant passionnés de munitions, souvent des militaires retraités, les recherchent à des fins de collection, et arrivent parfois à les ouvrir sans savoir ce qu’ils contiennent », poursuit-il. Certains de ces « amateurs » ont péri dans les explosions, d’autres se sont aspergés d’ypérite, liquide visqueux occasionnant de graves brûlures. Il y a quelques années, un ancien officier américain s’en est renversé accidentellement sur lui, et est rentré dans son hôtel où il est mort, non sans avoir contaminé tout son étage... Pour cette raison, le personnel de l’hôpital de Verdun est spécialement formé à ce type d’urgences, et les soignants voient donc toujours de la vraie chirurgie de guerre, avec parfois des corps totalement déchiquetés. De plus, le SAMU de Verdun ne compte plus les sorties pour venir aider les touristes imprudents tombés dans les innombrables tranchées, sapes et fortins enterrés du site…

Vingt-six soldats de 14-18 retrouvés

En outre, le Dr Frémont autopsie régulièrement les squelettes retrouvés dans les zones de combat : « Nous devons d’abord nous assurer qu’il s’agit bien de soldats de la Grande Guerre, et non d’un cadavre plus récent », explique-t-il. Souvent, les ossements peuvent être identifiés par des objets retrouvés près d’eux, dont des plaques de soldats, même si celles-ci, sont souvent illisibles. Le travail de légiste se double donc d’une vraie recherche d’histoire, car on sait à peu près où se situaient les régiments lors des combats. L’an dernier, 26 soldats français ont encore été retrouvés sur le site, et le travail du Dr Frémont a permis d’identifier certains d’entre eux, ce qui permet aussi de rendre les dépouilles aux familles, nombreuses à rechercher, aujourd’hui encore, des traces de leurs aïeux disparus.

D. D. B.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9338