Il parle de sa retraite

Moment de vérité pour Sarkozy

Publié le 12/03/2012
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Crédit photo : AFP

EN 2002, nombre de socialistes ont reproché à Lionel Jospin de tirer les conclusions de sa défaite au premier tour et d’annoncer son retrait de la vie politique. À nos yeux, il lui fallait plus de courage à renoncer qu’à rester à la tête de son parti. Pour d’autres, il s’agissait d’une débâcle qui laissait le PS dans un état indescriptible. La suite a montré que les socialistes se sont déchirés sur le leadership du parti et sur sa vocation. De la même manière, M. Sarkozy abandonnerait l’UMP aux divisions qui se creusent déjà en son sein, avec une Droite populaire qui pourrait rejoindre le Front national ou tenterait de faire alliance avec lui, et des élus ou des militants qui se verraient en meilleure compagnie avec le centre.

Une droite divisée.

Mais M. Sarkozy est libre. On lui a adressé à ce jour suffisamment de blâmes pour que, quand il s’exprime avec sincérité, on lui en fasse le crédit. Il n’a pas hésité une fraction de seconde lorsque la question de son départ lui a été posée. Il n’y a jamais de honte à envisager ou à prendre acte d’une défaite, et il n’y a aucun sérieux à ne pas la reconnaître, comme ce fut le cas pour Ségolène Royal en 2007. Tout au plus peut-on penser que M. Sarkozy, qui, en 2011, sous-estimait François Hollande et croyait dur comme fer qu’il allait remonter la pente, aurait dû comprendre qu’il ne serait peut-être pas le meilleur candidat de la droite. Certes, il lui aurait été difficile de gouverner pendant qu’un autre se serait battu dans les joutes électorales. Mais les candidats, qui ne cessent de mentionner l’intérêt général, brûlent toujours d’en découdre et croient à leur baraka.

IL N’Y A PAS DE HONTE À ENVISAGER UNE DÉFAITE

De toute façon, l’exposition aux médias des candidats entraîne de nos jours une dérive de la démocratie : on s’intéresse plus aux acteurs de la campagne qu’à leurs programmes. À la force des revendications, s’ajoute l’aversion pour l’un ou la sympathie pour l’autre. Si l’on aditionne les scores des candidats, on voit que le pays est majoritairement à droite, mais qu’une sorte de ressentiment populaire fractionne la droite en trois blocs, extrême droite, droite et centre droit, ce qui entraînera la victoire probable de la gauche. Les triomphes de la gauche, à commencer par celui de Mitterrand en 1981, sont aussi le résultat des divisions de la droite (Chirac contre Giscard il y a 31 ans ou Barre contre Chirac en 1988). Les candidatures du FN et du MoDem pourraient porter cette année un coup fatal à M. Sarkozy. S’il était battu, l’UMP se posera fatalement la question de son orientation vers François Bayrou ou, hélas, vers Marine Le Pen. Elle risque d’exploser. La présence de la gauche au pouvoir pourrait donc durer, même si elle est minoritaire. D’autant qu’elle s’est imposée lors des élections intermédiaires. La semaine dernière encore, un porte-parole socialiste revenait sur le thème de l’État-UMP. Épouvantail classique ou anachronisme volontaire. La gauche tient une majorité de municipalités, de régions et, depuis septembre dernier, le Sénat. Si M. Hollande l’emporte le 6 mai et si les Français lui donnent la majorité parlementaire dont il a besoin pour appliquer son programme, ne pourra-t-on pas parler plutôt d’État-PS ? Et s’il y a de vives frictions entre le gouvernement actuel et les collectivités locales, n’est-ce pas parce que Paris est engagé dans une réduction des dépenses quand les régions et les mairies rejettent toute forme d’austérité ? Imaginons ce qui se passera lorsque le gouvernement, les villes et les régions seront tous sur la même longueur d’onde idéologique.

La baisse de la dépense publique est pourtant le cœur du problème. M. Bayrou s’enorgueillit d’en avoir fait son cheval de bataille depuis plus cinq ans. On le félicite pour sa prémonition, mais, pas plus que les autres candidats il ne nous rassure par un chiffrage clair et précis de ses recettes et de ses dépenses. Il n’est pas possible, comme il l’affirme, de geler les budgets en valeur absolue, ce qui nous permettrait d’économiser sur la richesse nationale les 2 % d’inflation annuels, soit 40 milliards. Il faut élaguer, pas scier le tronc. Qui le dira clairement, de tous les candidats  ?

RICHARD LISCIA

Source : Le Quotidien du Médecin: 9096