En 1985, était créé au CHU et à la Faculté de Médecine de Dijon le Registre Dijonnais des Accidents Vasculaires Cérébraux (AVC) pour combler l’absence des données sur cette maladie en France et ceci grâce à la culture des registres de population présente à Dijon, sous l’impulsion du Pr Jean Faivre. Seules étaient disponibles les données américaines de Framingham et les données anglaises d’Oxford.
Trente ans plus tard, le Registre Dijonnais des AVC demeure en Europe le seul registre de population à fonctionner sans discontinuer, en recueillant de façon spécifique, exhaustive et continue les AVC survenant au sein de la population de la ville de Dijon intra-muros de 150 000 habitants. Il recueille de façon systématique les données cliniques, biologiques, radiologiques et évolutives d’une grande valeur scientifique.
Les apports les plus marquants sont les suivants :
1. Les taux d’incidence stables depuis 30 ans sont en faveur de l’efficacité de la prévention primaire. L’évolution démographique avec le vieillissement de la population aura un impact majeur en termes de nombre absolu de patients atteints (entre 30 et 40 % dans 15 ans) du fait de la relation linéaire entre l’âge et l’incidence des AVC. Cette augmentation touchera les patients de plus de 75 ans qui représentent actuellement 58 % des patients et qui représenteront 70 % des patients dans 15 ans. Les pouvoirs publics devront anticiper l’augmentation du nombre de lits nécessaire pour traiter les AVC dont aucun n’est traitable en ambulatoire.
2. Par contre, l’augmentation du nombre d’AVC avant 55 ans doit inciter à s’interroger sur les causes de cette tendance qu’il faut rechercher du côté de l’Hypertension Artérielle non dépistée ou non traitée, le régime alimentaire riche en sucre, en graisse et en sodas, le tabagisme et surtout la consommation de cannabis entraînant une inflammation des vaisseaux cérébraux, et faisant des AVC une maladie émergente.
3. La baisse de la mortalité à 1 mois de 25 % à 9 % en 30 ans, confirmant l’efficacité de la fibrinolyse de l’AVC ischémique appliquée depuis 2003 dans les 3 premières heures de l’AVC ischémique, et de la prise en charge des malades dans les Unités de Soins Intensifs Neuro-Vasculaires (USINV), donne aux AVC le statut d’urgence médicale.
4. La diminution des taux de récidives au bout de 1 an valide l’intérêt du suivi précoce et renouvelé des patients dans la 1re année au sein de réseaux de soins décloisonnés entre le Ville et l’Hôpital, et justifie la consultation obligatoire du 6e mois instaurée par la DGOS en 2015.
5. Le rôle du niveau socio-économique des patients est démontré à Dijon : l’incidence des AVC est plus élevée en milieu défavorisé tandis que, si la survie est la même en phase aiguë, par contre elle est plus faible à 3 mois en milieu défavorisé, démontrant l’accès aux soins aigus de façon égale pour tous. Par contre, l’accès à l'information et à la prévention déficitaire en milieu défavorisé.
En France, deux autres registres de population sont apparus en 2008, à Lille et dans le Pays Brestois qui démontrent un gradient d’incidence et de mortalité décroissant de Lille à Dijon, comme pour l’infarctus du myocarde.
Enfin, l’arrivée des big data et l’accès au SNIRAM, permettent de connaître le nombre de patients hospitalisés chaque année pour un AVC et le nombre de décès par AVC. Par contre, seul un registre de population pour AVC permet de connaître l’impact immédiat des innovations thérapeutiques et des pratiques médicales sur les taux d’incidence, de mortalité, de handicap et de complications des AVC, et les facteurs étiologiques et pronostiques.
Cette spécificité est mise à profit pour évaluer sur le plan mondial le poids des AVC par pays, le Registre Dijonnais des AVC devant diffuser prochainement en France un score qui devrait permettre à chacun de calculer son propre risque d’AVC et d’appliquer les mesures préventives nécessaires pour le réduire.
* Registre Dijonnais des AVC (INSERM, InVS et EA 4184)
Béjot Y, Daubail B, Giroud M . Epidemiology of stroke and transient ischemic attacks : current knowledge and perpectives. La Revue de Neurologie.2016 ;1 : 59-68 Pr Maurice Giroud Pr Yannick Béjot Registre Dijonnais des AVC (INSERM, Invs et EA 4184)
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation