À la fin des années 1970, devenus conscients de l’importance du phénomène qu’est la violence domestique ; en Californie, à Boston, à Minneapolis, à Chicago… Les infirmiers organisent des prises en charge locales. Ainsi, en 1977, aux urgences de l’hôpital Brigham and Women, à Boston, ils sont les premiers aux États-Unis à établir un protocole d’identification et d’intervention pour les femmes battues. Ils publient un manuel trois ans plus tard. En 1977 également, les personnels paramédicaux urgentistes du centre médical Hennepin, à Minneapolis, créent, en collaboration avec l’hôpital, une unité de soin auprès du refuge pour les femmes Harriet Tubman, grâce en particulier à la participation d’infirmières volontaires.
Au début des années 1980, Jacquelyn Campbell, une infirmière – maintenant professeure à l’université John Hopkins, à Baltimore – qui étudiait alors la violence domestique à Wayne State University, à Detroit, pour son doctorat, découvre avec ses collègues que la plupart des femmes victimes d’homicides domestiques ont fréquenté le système de soins de santé avant leur meurtre, confirmant l’importance de ce milieu pour leur prêter assistance. « C’était un endroit si important où ces femmes pouvaient être identifiées et être mises en contact avec les merveilleux services d’aide contre la violence domestique », a-t-elle expliqué lors de la conférence au siège des instituts nationaux de la santé (NIH), dans le Maryland.
En 1985, des associations de professionnels paramédicaux commencent à se constituer au niveau national. « En 1987, ils ont créé une centaine de programmes de formation pour le personnel hospitalier », a précisé Catherine Jacquet, professeure adjointe d’histoire américaine à l’université d’État de Louisiane et responsable de l’exposition à la bibliothèque nationale de médecine américaine.
Enfin, les associations de médecins se joignent à eux. En 1989, le collège américain des obstétriciens et gynécologues introduit une définition de la « femme battue » pour ses membres et annonce une campagne contre la violence domestique. En 1992, le journal de l’association médicale américaine publie des principes directeurs concernant la violence domestique. L’un des auteurs est le Dr Anne Flitcraft, une pionnière dans ce domaine parmi les médecins.
Diane Bohn, une sage-femme, directrice de l’initiative pour la prévention de la violence domestique et des agressions sexuelles, pour le service de Santé indien - une branche des services de santé publique américains – à Cass Lake, dans le Minnesota, indique au « Quotidien » : « Depuis les trente dernières années, nous avons parcouru un long chemin pour faire comprendre aux professionnels de santé qu’à cause de ses impacts, la violence contre les femmes est un problème sanitaire crucial qui doit être pris en charge, au même titre que l’on prend en charge l’hypertension ou l’hyperglycémie. »
De fait, « la nouvelle loi de santé (Obamacare), inclut, en principe, une disposition pour le dépistage de la violence domestique avec chaque examen périodique de santé des femmes », note Jacquelyn Campbell au cours de la conférence des NIH.
Pourtant, beaucoup reste à faire comme le constate Diane Bohn : « Il continue à y avoir de nombreux professionnels de santé qui, pour de multiples raisons, ne sont pas à l’aise pour confronter la violence domestique… Néanmoins, la vie de nombreuses femmes a été littéralement sauvée, et de nombreuses autres ont reçu le soutien nécessaire pour prendre des décisions informées par rapport à leur situation de vie, grâce aux services fournis dans des établissements de soin. Ne vous y trompez pas, ajoute-t-elle, ce sont presque toujours les infirmières qui font ce bon travail. » Et Catherine Jacquet de conclure : « La violence domestique n’a pas disparu. Les temps changent, nous avons besoin de nouvelles méthodes, de nouvelles approches et de nouvelles perspectives. »
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