Priorité pourtant affichée dans la stratégie de santé (au moins depuis 2013), la réduction des inégalités sociales (ISS) n'a guère été au cœur des politiques publiques et des recommandations des experts lors de la crise liée au Covid-19, dénonce le Haut Conseil de santé publique (HCSP) dans un rapport daté du 22 juillet et publié ce 14 septembre.
Pourtant, plus que jamais, la crise a creusé ces ISS, « socialement construites, évitables et injustes », ainsi que les inégalités territoriales de santé (ITS), qui au-delà de la problématique de l'accès aux soins recouvrent aussi les conditions de vie dans l'environnement chimique, physique et social.
La pandémie a eu des conséquences sanitaires très diverses selon les populations. La surmortalité a ainsi été particulièrement marquée en Seine-Saint-Denis (+118,4 %, au printemps 2020, par rapport au printemps 2019) ou dans les départements denses de du Grand Paris. Autre exemple tiré de l'enquête Sapris, les mesures de lutte contre l'épidémie (confinement) ont davantage profité aux cadres supérieurs qu'aux catégories populaires. En outre, le Covid-19 a eu de nombreuses répercussions indirectes (santé mentale, comportements addictifs, temps devant les écrans, effets économiques, difficultés d'accès aux soins) qui ont frappé plus durement les populations défavorisées.
Des recommandations marginales et peu prises en compte
Quelle fut la réaction des pouvoirs publics à l'aggravation prévisible des ISS lors de la crise ? Selon le HCSP, nombreuses sont les agences sanitaires (Anses, HAS, ANSM) ou sociétés savantes qui n'ont pas émis de recommandations sur les ISS. Quant aux structures qui se sont penchées dessus (Conseil scientifique, HCSP, Académie de médecine, Conférence nationale de santé…), leurs avis ont été peu pris en compte par le gouvernement. La priorité est restée la maîtrise de l'épidémie dans une population homogène.
« La démocratie sanitaire a été pratiquement absente au cours de la crise du Covid. Dans la mesure où les doctrines de santé ont été définies au niveau national ou préfectoral, il a été très difficile d'y impliquer la population », regrette encore le HCSP.
Le rapport salue la créativité et les initiatives des associations et de certaines collectivités territoriales, voire d'Agences régionales de santé comme celle d'Île-de-France qui a mis en place précocement des centres Covid pour les précaires ou des actions dans les foyers de travailleurs migrants. Mais dans de nombreux territoires, « une lenteur administrative a été observée ». Sans compter que la gestion de la crise a souvent été confiée aux préfectures, qui ne travaillent pas sur les ISS.
Toute crise sanitaire doit être considérée comme une crise globale
Le HCSP formule une vingtaine de recommandations portant sur la gestion d'une crise, et son anticipation, en insistant sur l'importance de considérer toute crise sanitaire, y compris infectieuse, comme une crise globale. Par conséquent, l'impact des recommandations ou politiques mises en œuvre sur les ISS et les ITS doit être évalué a priori. Pour ce faire, les comités scientifiques divers doivent intégrer les sciences humaines et sociales et des représentants de la société civile.
Le HCSP insiste aussi sur l'application du principe de justice distributive, qui veut que les efforts des politiques publiques soient adaptés aux besoins des différents groupes sociaux. « La vulnérabilité, concept ambigu entre le sanitaire et le social, a été un terme souvent mobilisé. Cela n'a pas favorisé le développement d'une politique inclusive » croisant interventions pour toute la population, et gradation de certaines mesures pour des publics ciblés.
Enfin, dans une perspective de plus long terme pour la lutte contre les ISS, le HCSP appelle à développer le dispositif de suivi statistique et celui d'évaluation des conséquences des politiques nationales et locales.
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