LE TRIBUNAL correctionnel d’Épinal a accepté de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative au harcèlement moral, qui suspend l’ensemble des procédures en France, a indiqué Me Stéphane Giuranna, l’avocat ayant soumis la QPC. La notion de harcèlement moral est aussi floue que celle concernant le harcèlement sexuel, dont la loi a été censurée, explique-t-il : « le tribunal a estimé que le motif d’inconstitutionnalité soulevé était sérieux et a transmis la requête à la Cour de cassation ».
Selon l’avocat, les raisons qui ont conduit les Sages à censurer la loi sur le harcèlement sexuel doivent produire les mêmes effets sur celle relative au harcèlement moral. « Le Conseil constitutionnel a estimé que la définition de harcèlement n’était pas bien définie. Il en va exactement de même pour le harcèlement moral, puisque les deux infractions sont issues de la même loi, du 17 janvier 2002 », a-t-il poursuivi. « Le fait de "harceler autrui", c’est flou. La notion d’"agissements répétés", on ne sait pas ce que ça veut dire : il y a un problème de précision de la loi, puisqu’on ne sait pas quels agissements peuvent tomber sous le coup de la loi ». La Cour de cassation a désormais trois mois pour se prononcer sur la QPC, avant une éventuelle transmission au Conseil constitutionnel. Durant ce délai, toutes les procédures en cours pour harcèlement moral sont suspendues.
En attendant une nouvelle loi
Du fait de la décision du Conseil constitutionnel, le 4 mai, d’abroger la loi sur le harcèlement sexuel (l’article 222-33 du Code pénal), toutes les procédures en cours pour harcèlement sexuel sont annulées. En réponse, la Chancellerie a indiqué aux parquets la marche à suivre afin de poursuivre sur la base d’autres qualifications les procédures annulées. Dans sa circulaire, la Chancellerie distingue les possibilités de poursuite en fonction de l’avancement des procédures. « Au stade des poursuites, avant saisine de la juridiction répressive, il vous appartiendra d’examiner si les faits initialement qualifiés de harcèlement sexuel peuvent être poursuivis sous d’autres qualifications », telles que celles relatives aux violences volontaires, précise la circulaire. « La qualification de tentative d’agression sexuelle pourra également, le cas échéant, être retenue », ajoute le texte. « Dans le cadre de l’information judiciaire, le juge d’instruction ou le parquet pourront (...) saisir la chambre de l’instruction aux fins d’annulation de la mise en examen sur le fondement de l’article » abrogé. « Lorsque la juridiction correctionnelle est déjà saisie (...) il vous appartiendra de requérir la nullité de la qualification juridique retenue, la poursuite étant désormais dépourvue de base légale ». « Dès lors qu’une requalification est envisageable », la Chancellerie précise là aussi la procédure à observer.
Le ministère précise par ailleurs que le Conseil constitutionnel ne s’est pas prononcé sur la conformité à la Constitution des articles du Code du travail sur le harcèlement sexuel (L.1153-1 et L.1155-2), lesquels restent donc valables, au moins pour l’instant, « dans l’attente d’une éventuelle QPC ou d’une intervention du législateur ». Mais, ajoute-t-il, « force est de constater que l’incrimination issue (...) de ces articles du Code du travail n’est pas rédigée de manière plus précise » que l’article 222-33 du code pénal abrogé par les Sages. « Dans un souci de sécurité juridique, il sera donc opportun de privilégier les poursuites sous d’autres qualifications » conseille la Chancellerie. Enfin, la circulaire souligne que la décision du Conseil constitutionnel « n’a aucune incidence sur l’aspect non pénal de la question » comme, par exemple, l’interdiction de licencier celui qui refuse du harcèlement ou qui témoigne. Le président François Hollande a promis une nouvelle loi dans les plus brefs délais.
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