PERSONNE, ni en Russie ni ailleurs, n’est dupe, des tours de passe-passe auxquels M. Poutine se livre depuis quatre ans et qui lui ont permis d’exercer son autorité absolue sur la Russie depuis 2000. En 2008, comme de nombreux citoyens lui proposaient de se présenter pour un troisième mandat, ce que ne permet pas la Constitution, il a répondu que ce ne serait pas « convenable ». Son parti, Russie unie, exerçant un contrôle complet du pays, il n’a permis l’élection de Dmitri Medvedev à la présidence que parce qu’il savait qu’il en deviendrait le Premier ministre. Tout laisse croire que, à la tête du gouvernement, M. Poutine n’a pas manqué de donner des ordres à M. Medvedev et que celui-ci n’as pu parfois s’écarter des consignes poutiniennes qu’avec le consentement de son mentor, pas fâché par ailleurs de donner l’impression d’une certaine diversité à la tête de l’État.
Medvedev n’a pas osé.
On ne dénoncera jamais assez cette manipulation des institutions par un parti et par son chef. Dmitri Medvedev a tenté à plusieurs reprises de marquer sa différence. Il n’a pas osé sacrifier sa confortable relation avec Poutine à ses convictions. Il s’est donc contenté de devenir le président qui dénonce tout ce qui ne va pas dans le pays. Et les sujets sont nombreux : une corruption qui empoisonne le développement économique et compromet les investissements dans l’industrie, une fuite des capitaux, une baisse alarmante de la démographie (la Russie va perdre 10 millions d’habitants dans les années qui viennent), de dangereux écarts de revenus, avec une classe de nouveaux riches qui dépensent excessivement pendant que souffrent les ruraux, et les problèmes liés à l’alcoolisme. Le chef de l’État russe s’est donc transformé en commentateur lucide qui discerne les maux de son pays mais ne peut commencer à les guérir qu’avec l’assentiment de M. Poutine. Lequel, censé, pour le moment, être son subordonné, exerce la réalité du pouvoir. Comme il contrôle la carrière de M. Medvedev, il peut bien le laisser s’égosiller. Il n’est d’ailleurs pas hostile à un peu d’autocritique si elle suffit à engendrer les changements auxquels, malgré ses attitudes viriles, il n’ose pas procéder. Mais comme il est le produit de l’ancien KGB, de ses amis de Saint-Petersbourg, sa ville natale, et de divers lobbies noyautés par les ex-communistes, il opte le plus souvent pour le statu quo.
Popularité.
Par exemple, Vladimir Poutine ne se dressera jamais contre les anciens de la nomenklatura qui se sont emparés de secteurs entiers de l’économie, comme le pétrole. En jetant en prison l’ancien patron du conglomérat Ioukos, Mikhaïl Khodorkowski, et en l’y maintenant grâce à la complicité d’une justice aux ordres, il a tout simplement dépossédé un homme pour confier sa fortune à d’autres hommes avec lesquels il s’entendait. Il soigne son image en se faisant photographier torse nu et à cheval ou en blouson noir sur sa moto, et il est donc aussi vaniteux qu’autoritaire tout en prétendant respecter les principes démocratiques. La Russie, en réalité, a furieusement besoin d’une réforme. À ce jour, elle a très peu diversifié son industrie, au point qu’une baisse du prix du pétrole au-dessous de 80 dollars le baril la rendrait insolvable. Les méthodes scandaleuses de ses policiers ou fonctionnaires corrompus font de tout investissement étranger une procédure à risque maximal. Les assassinats politiques, notamment ceux dont sont victimes des journalistes, ne sont jamais élucidés. Les juges obéissent au pouvoir et la presse libre est réduite à quelques titres.
POUTINE, OU LE POUVOIR PERMANENT
Incontestablement, Vladimir Poutine est populaire, même si les inégalités sociales ont fini par faire baisser sa cote légèrement. Il peut se targuer d’apparaître comme l’homme providentiel d’un pays où très peu de gens auraient été choqués de ce qu’il restât indéfiniment au Kremlin. Tout le monde pense qu’il se fera réélire pour deux mandats successifs, donc jusqu’en 2020, avec une option pour le poste de chef du gouvernement au-delà. Assurément, c’est une façon un peu simpliste de concevoir l’histoire : M. Poutine fera tout pour s’accrocher au pouvoir, mais, tôt ou tard, son incapacité à faire de la Russie une nation moderne, libre et prospère aura raison de son talent de manipulateur.
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