LE GOUVERNEMENT ne nie pas que le mécontentement des Français soit parvenu à un paroxysme. Des sondages ont montré que le nombre des insatisfaits atteint 70 %. Le sens politique de Nicolas Sarkozy lui a fait dire récemment, à propos de la journée du 29 janvier, que les Français ont la liberté constitutionnelle de manifester, façon d’admettre que, s’ils exercent leurs droits, c’est parce qu’ils n’ont pas beaucoup de raisons de se réjouir.
Des risques considérables.
Il n’empêche que, si cette grande journée de mobilisation fédère les mécontentements, la dimension qu’elle a prise mélange et dilue les objectifs : les enseignants et les lycéens, les chercheurs, les étudiants, les fonctionnaires, les salariés, les chômeurs, les pauvres ont des objectifs différents. S’ils s’associent pour crier leur colère, ils n’ont pas les mêmes motivations et dès lors qu’ils semblent réclamer une autre politique, une autre façon de procéder aux réformes, une autre manière de lutter contre la crise, ils semblent exiger une alternance dont l’heure n’est pas venue. L’exécutif n’a pas d’autre choix, pour le moment, que d’attendre que l’orage passe et de s’abriter derrière sa légitimité. Un succès sans précédent de la grève, sa prolongation éventuelle, les désordres auxquels elle peut conduire à cause d’éléments récemment arrivés sur la scène de la protestation et qui tentent de créer l’anarchie par la violence, toutes ces raisons font que nous sommes dans la saison de tous les dangers et qu’il n’est pas question de négliger cette expression puissante du malaise national.
Dans les débats très vifs qui ont précédé le mouvement d’aujourd’hui, l’ultime argument des syndicats et de la gauche, c’est l’absence de dialogue. Est-elle suffisante à justifier la paralysie du pays, même si l’on admet que le dialogue mérite d’être approfondi ? Certes, il ne faut pas conduire au désespoir ceux, et ils sont nombreux, que la crise fait énormément souffrir. De droite ou de gauche, aucun d’entre nous ne demeure insensible aux licenciements massifs, à la destruction du tissu industriel français par une conjonction de phénomènes nocifs, à la paupérisation de la classe moyenne. L’exercice auquel M. Sarkozy se livre le plus souvent, la rencontre avec les sinistrés de tous ordres, a montré ses limites. Il passe, leur parle et s’en va ; et l’intendance, accablée de tâches, ne suit pas. La question, aujourd’hui, n’est plus de savoir qui a raison, de la majorité ou de l’opposition. Le gouvernement ne peut pas être tellement sûr d’avoir en tous points raisons qu’il en devient sourd à la souffrance populaire et qu’il ne tienne pas compte des propositions de la gauche. Certes, celle-ci a contribué à l’égocentrisme et au réformisme majoritaires parce qu’elle a été incapable, jusqu’à ce qu’enfin Martine Aubry présente un plan de relance (qui n’a d’ailleurs bouleversé personne), de dire quelles réformes lui semblent acceptables et quelles mesures seront efficaces contre la crise.
Un malaise politisé.
En outre, la gauche a bien senti que, si elle se contentait de se rallier à la journée du 29 janvier, elle ne faisait que suivre les syndicats. C’est pourquoi, dans un geste à la fois inattendu et peu convaincant, le PS a politisé le malaise en déposant une motion de censure dont chacun savait qu’elle n’aurait aucun effet, sinon d’aggraver encore le sentiment d’impuissance chez les mécontents et le sentiment de toute puissance dans la majorité. La motion de censure n’étant qu’un épisode sans conséquence, le débat est de nouveau dans la rue. Si le gouvernement craint un dérapage et un vent de colère aussi puissant que la tempête de la semaine dernière, doit-il consentir à donner quelques gages à l’opposition et aux organisations syndicales ? S’il campe sur ses positions, c’est parce que l’argumentation de la gauche n’est pas de bonne foi. Pendant dix-huit mois, elle a fondé sa critique sur le TEPA (le plan travail, emploi, pouvoir d’achat), décrit comme le péché originel du sarkozysme, alors qu’il semble bien avoir différé les effets de la crise de quelque six mois en France. Jusquà septembre dernier, le TEPA a été la pomme de discorde permanente entre le gouvernement et l’opposition, comme si celle-ci n’avait rien d’autre à dire. Ensuite, c’est à peine si la gauche n’a pas déclaré que M. Sarkozy était responsable de la crise mondiale ; elle s’est encore raccroché aux branches du TEPA pour affirmer que son application avait privé le pouvoir d’une marge de manuvre. Après quoi, le gouvernement avait tout faux, alors que l’énergie de M. Sarkozy, la rapidité avec laquelle il a pris des mesures vigoureuses, l’autorité avec laquelle il a engagé l’Union européenne à réagir ont été célébrés dans le monde entier. Les Français continuent à traîner leur président dans la boue, les médias à railler ses tics, les journalistes à le présenter comme un clone de Bush, alors que Tony Blair publie dans « Newsweek » une ode à sa gloire, que les commentateurs allemands l’ont jugé meilleur que leur chancelière, que les Américains, et ce n’est pas coutume, sont subjugués par son analyse et ses actions. Et là encore, il est combattu en France par la mauvaise foi, si ce n’est par le mensonge : il n’a jamais fait de cadeaux aux banques, il leur a prêté de l’argent qu’elles doivent rembourser avec intérêts.
Y a-t-il toutefois, dans le plan socialiste, matière à modifier le plan gouvernemental (jugé insuffisant par la gauche) ? Oui. L’idée socialiste de donner 500 euros à chaque foyer pauvre (environ sept millions de Français) est bonne parce que l’augmentation du pouvoir d’achat de ceux qui ne disposent que de revenus de subsistance nuira peu à la balance commerciale et à la stabilité des prix. Mille dollars, c’est ce que Barack Obama s’apprête à donner à 95 % des Américains et, tant que nous y sommes, pourquoi ne pas soulager ceux qui souffrent en augmentant le déficit budgétaire, qui n’est plus, depuis six mois, l’incarnation du Mal ? Ne serait-ce que pour montrer aux mal lotis la sollicitude du gouvernement et la solidarité de leurs citoyens, qui sont dans la même épreuve mais n’y sont pas préparés de la même façon.
LE POUVOIR NE NIE PAS LE MÉCONTENTEMENT POPULAIRE
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