« Un professionnel de santé qui va bien, c’est un professionnel qui soigne bien », a martelé Agnès Firmin Le Bodo ce lundi après-midi, en visite à la Villa M à Paris. Pendant près de deux heures, la ministre déléguée aux Professions de santé a arpenté les couloirs de cet hôtel parisien, qui mêle salle de conférences, salle de sport et centre de prévention innovant dédié à la santé des soignants, financé par le groupe Pasteur Mutualité (GPM). Une visite réalisée à trois jours du lancement, ce jeudi, de la stratégie visant à améliorer la santé des professionnels de santé.
Particulièrement exposés aux risques sanitaires, les soignants « sont près d’un quart à se déclarer en mauvaise santé », souligne le ministère. Dans le cadre du Conseil national de la refondation (CNR) lancé à l’automne, Agnès Firmin Le Bodo est chargée d'élaborer une feuille de route dédiée à la santé des professionnels de santé, « qu’ils soient libéraux, hospitaliers ou issus du médico-social », a détaillé la ministre ce lundi.
Premiers résultats fin mai
Ces travaux, qui doivent durer un peu moins d’un an, visent d'abord à quantifier les problèmes de santé auxquels sont exposés les soignants. « La direction statistique du ministère de la Santé [Drees] va nous accompagner pour identifier clairement ces enjeux car ils sont peu documentés, notamment chez les libéraux », détaille Agnès Firmin Le Bodo.
Addictions, travail de nuit, cancers, impact de la crise Covid… « Nous allons lancer un questionnaire et, en fonction des réponses, nous proposerons des pistes de travail », précise la ministre. Les premiers résultats de cette enquête devraient être dévoilés fin mai. Jeudi, l’avenue de Ségur annoncera les lauréats de l’appel à manifestation d’intérêt « recherche sur la santé des professionnels de santé », lancé par la Drees et la Fondation MNH mi-novembre.
« Il faut lever les tabous, les barrières »
Une fois le constat posé, le gouvernement devrait annoncer des premières mesures d'ici à la fin de l'été. « La santé des soignants concerne la qualité de vie au travail, mais pas que ! souligne Agnès Firmin Le Bodo. Combien de soignantes de plus de 50 ans ne font pas leur mammographie ? », illustre-t-elle.
Le plan d’action de l’exécutif visera aussi à sortir médecins, pharmaciens, infirmières ou encore vétérinaires « du déni » vis-à-vis de leur propre santé. « Peut-être se croient-ils à l’abri, pensent-ils avoir le temps… Il faut lever les tabous, les barrières qui les empêchent parfois de s’adresser à un autre professionnel de santé, la peur du jugement ou du regard des autres », illustre la pharmacienne.
110 médecins déjà reçus à la Villa M
Pour établir sa feuille de route complète – attendue pour la fin de l'année 2023 – le gouvernement compte s’inspirer d’initiatives locales, comme celle mise en place à la Villa M. Fin 2021, le groupe Pasteur Mutualité a construit son « Programme M », articulé autour d'un centre de prévention ouvert aux soignants « en souffrance ». Un plan de prise en charge personnalisé, inspiré du Programme d’aide aux médecins du Québec né dans les années 1990.
Burn-out, anxiété, troubles du sommeil, gestion du stress mais aussi troubles musculosquelettiques : l’année dernière, 110 médecins, dont 8 internes, ont bénéficié de ces consultations gratuites et anonymes à la Villa M. « Le programme permet aux professionnels de santé d’être accompagnés en toute discrétion, en dehors de structures plus classiques que sont les Ordres ou les syndicats par exemple », souligne Michel Cazaugade, premier vice-président du groupe mutualiste d'assurances. Un accompagnement complet lancé « suffisamment tôt, pour éviter la catastrophe », précise-t-il.
Le programme M se déploie aussi hors les murs, par le biais de cours de boxe organisés à l'intérieur même de l'hôpital. « Cela permet aux soignants d’avoir confiance en eux, de se défouler », se félicite Michel Cazaugade. Déjà, 4 000 soignants ont été initiés à ce sport de combat, dans une quarantaine d’hôpitaux.
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