Enfin ! Deux semaines après l’annonce de l’accident grave survenu au cours de l’essai BIA 10-2474 à Rennes, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) vient de rendre publique la chronologie de son déroulement. Des éléments qui interpellent les experts et posent encore question.
Ce document revient sur les faits depuis le début de l’essai, le 9 juillet 2015 et le 16 janvier, date à laquelle l’ANSM a été informée de la survenue d’effets indésirables graves par le centre Biotral en charge de l’essai. Celle-ci précise qu’aucun effet indésirable grave n’a été porté à sa connaissance durant les deux premières étapes et sur les quatre premières cohortes de volontaires de la troisième et dernière étape consacrée à l’administration de doses orales multiples et croissantes (MAD : Multiple Ascending dose).
L'hospitalisation du premier patient n'arrête pas l'essai
C’est le dimanche 10 janvier, au 5e jour d’administration d’une dose de 50 mg de la molécule testée à la cinquième cohorte que tout a basculé : des symptômes (non précisés dans le communiqué) apparaissent chez l’un des volontaires qui est hospitalisé le soir-même. Cela ne suffit pourtant pas à empêcher la poursuite des tests : le lendemain matin, les quatre autres personnes de la cohorte reçoivent la même dose. Alors que l’état du volontaire hospitalisé devient critique. Dans la soirée du 11 janvier, celui-ci est dans le coma quand le laboratoire BIAL (promoteur) et BIOTRIAL s’accordent pour interrompre l’essai.
L’ANSM n’en sera alertée que le 14 janvier : trois jours plus tard. « Une alerte plus rapide aurait été appréciée », avait alors déclaré la ministre de la Santé Marisol Touraine informée ce même jour. « Face à un événement aussi grave, on attendait du laboratoire qu'il se manifeste plus rapidement auprès des autorités sanitaires », avait-elle insisté.
Une chronologie qui laisse perplexe
Le protocole de cet essai clinique a, quant à lui, été rendu public le 21 janvier dernier par « le Figaro », avant que l’ANSM ne le publie officiellement, un jour après. Outre le décès d'un homme de 49 ans, l'essai de la molécule avait occasionné cinq autres hospitalisations, dont une par précaution. Les documents rendus publics par l'ANSM ne suffisent pas à expliquer l'accident qui fait l'objet d’enquêtes tant au niveau judiciaire que sanitaire.
« Le protocole en lui-même semble conforme », a affirmé au « Quotidien », le Pr Jean-François Bergmann, chef du service de médecine interne à l’hôpital Lariboisière, ancien vice-président de la commission de mise sur le marché de l’ANSM. « Je l'ai lu très attentivement et n'y ai relevé aucune anomalie particulière. »
C'est la chronologie des événements qui laisse l'expert plus perplexe : « L'hospitalisation d'un volontaire au cours d'un essai de phase I est habituellement considérée d'office comme un effet indésirable grave. » Un événement suffisant en théorie pour stopper sans délai ce type d'essai.
Le pré-rapport de l'IGAS, en début de semaine
Un pré-rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur l'accident sera remis à Marisol Touraine en début de semaine prochaine, a annoncé jeudi la ministre de la Santé. « À partir de là, nous regarderons si nous disposons d'éléments nous permettant de comprendre ce qui s'est passé », a-t-elle déclaré. Elle a rappelé que les essais cliniques dits de phase 1, comme celui de Rennes, « sont ceux qui sont au tout début du parcours du test du médicament » et que « des précautions et des règles internationales encadrent ces essais ».
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