Une étude sur l’espérance de vie des Français selon leurs catégories socioprofessionnelles (CSP) met en évidence les inégalités sociales face à la mort et l’impact sur les années passées en retraite. Mené par l’Institut national d’études démographiques (Ined), ce travail montre que, malgré un départ à la retraite plus précoce, les ouvriers bénéficient de deux années de moins à la retraite que les cadres et restent en moyenne 3,4 années de plus au chômage ou en inactivité.
L’étude, publiée dans « Population et Sociétés » (mai 2023), s’est appuyée sur les données de mortalité de 2018. Cette année-là, l’espérance de vie à 35 ans des hommes cadres était de près de 50 ans, contre 44 ans pour les ouvriers, soit 5 ans et 8 mois d’écart, est-il indiqué. Chez les femmes, l’écart s’établit à 3 ans et 5 mois (53,3 ans chez les cadres contre 49,9 ans chez les ouvrières). Ces écarts se réduisent à 62 ans mais restent importants : la différence entre ouvriers et cadres est de 3,5 ans chez les hommes et de 2,7 ans chez les femmes.
Les ouvriers ont 7 % de chances en moins d’atteindre 62 ans
Les trajectoires contrastées selon les CSP s’expriment aussi dans les chances d’atteindre un âge élevé : « sur 100 hommes de 35 ans, 96 peuvent espérer atteindre 62 ans parmi les cadres mais seulement 89 parmi les ouvriers ; ces chiffres sont respectivement de 97 et 94 chez les femmes », lit-on. Ces inégalités se traduisent lors de la retraite. Parmi les hommes, la durée moyenne de la retraite est de 21,1 ans pour les cadres, 21,5 pour les employés et de 19,1 pour les ouvriers. Chez les femmes, la retraite dure en moyenne 24,2 ans chez les cadres, 25 pour les employées et 23,6 pour les ouvrières.
L’étude s’intéresse aussi aux dernières années de la vie professionnelle avant le départ en retraite. « Les années de chômage ou d’inactivité sont fréquentes dans les années précédant l’âge légal pour les ouvriers », est-il relevé. Chez les femmes, l’espérance de vie plus longue se traduit ainsi par davantage d’inactivité (1 à 2 ans de plus selon la CSP). Ces données font « écho aux années de vie en incapacité, déjà présentes entre 50 et 65 ans, qui s’avèrent plus fréquentes pour les ouvriers et employés que pour les cadres, ainsi que pour les femmes comparées aux hommes d’âge égal », est-il souligné.
Les périodes hors emploi au seuil de la retraite « témoignent de fins de carrière complexes et exposent à des niveaux de pension moindres », relèvent les auteurs. Et de conclure : « Avec les paramètres d’âge et de durée de cotisation, les dispositifs protégeant les personnes ayant des difficultés de maintien en emploi, au cours et à la fin de leur carrière, constituent des enjeux majeurs du système de retraite et plus généralement de protection sociale, pour les générations présentes et futures ».
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