SUR L’AFFICHE, on voit Adama, Romain, Sébastien, Maurice. Chacun d’entre eux nous regarde droit dans les yeux, sans agressivité, mais les sous-titres, en bulles, sont fermes. « Moi, je ne décide pas pour elle. Si t’es un homme, tu ne la traites pas comme ça. »
Ce serait la première fois, du moins en France, qu’une campagne contre les violences faites aux femmes, donne autant la voix à des hommes, qui s’adressent directement et essentiellement à d’autres hommes. « J’affirme, je m’affirme, je ne reste plus neutre, je deviens acteur car moi aussi je peux avoir une influence », analyse le Dr Gilles Lazimi, généraliste au Centre municipal de santé de Romainville, en Seine Saint-Denis. Il fait partie des coordonnateurs de la campagne. « Très peu d’hommes osent s’afficher contre le sexisme, très peu participent aux réunions. Or nous avons besoin d’eux. Ce n’est pas encore dans l’air du temps mais je crois que cela va le devenir. »
Une femme sur dix.
Il aura fallu attendre 2000 pour disposer enfin de chiffres, « qui sont encore sous-évalués, nuance le Dr Lazimi, car les réponses ont été données au téléphone par des femmes interrogées au hasard ». L’ENVEF (Enquête nationale sur les violences envers les femmes en France) révélait qu’environ une femme sur dix avait été victime de violences conjugales au cours des douze derniers mois ; 7 % avaient subi un harcèlement psychologique et 3 % un tel harcèlement assorti d’agressions physiques, verbales et sexuelles de la part de leur petit ami, concubin ou mari. Trois à quatre millions d’enfants étaient alors considérés comme exposés, témoins et victimes dans cette même période.
L’Observatoire national de la délinquance estime, quant à lui, que tous les deux jours, une femme meurt du fait de violences conjugales. Dans une enquête plus récente, intitulée « Contexte de sexualité en France »(2006), 16 % des femmes déclaraient avoir été victimes de tentatives de viol (9,1 %) ou de viol (6,8 %) au cours de leur vie. L’année suivante, l’AMET (Association pour la prévention et la médecine du travail) avait mené une étude qui montrait que 32 % des femmes ont été victimes d’une violence sexiste ou sexuelle dans le cadre professionnel, 0,4 % d’attouchements sexuels et 0,6 % d’un viol. Et puis, un mémoire de DU (diplôme d’université de victimologie), présenté cette année par Cécile Sarafis, conseillère conjugale, indique qu’une demande d’IVG sur quatre est liée à des violences de la part d’un homme.
« Que la honte change de camp »
.
« On peut constater qu’entre 2000 et 2009, les victimes ne sont pas plus nombreuses mais elles parlent plus », se réjouit le Dr Lazimi, convaincu de l’utilité des campagnes de prévention. « Il faut aider ces femmes à dire les violences qu’elles ont subies. Ces femmes ont peur, elles ont honte. Il faut que la honte change de camp. Pour cela, il faut aussi que les professionnels soient sensibilisés, formés, parce que pour qu’une femme parle, il faut savoir lui poser la question. Mais toute la société est concernée, nous avons tous un rôle à jouer, pas seulement les soignants mais aussi les avocats, les juges, les professionnels, qui doivent apprendre à accueillir les victimes. S’il fallait trouver d’autres arguments, on peut ajouter que ces violences ont un coût : deux milliards et demi par an, près de quatre années de vie en bonne santé pour les victimes, dont 50 % présentent d’ailleurs des syndromes dépressifs et sont 25 fois plus exposées aux tentatives de suicide. »
La campagne lancée en Seine Saint-Denis implique 26 communes : Aubervilliers, Bobigny, Le Raincy, les Lilas, Villepinte... Dans le département, les spécialistes estiment à un millier le nombre annuel de femmes victimes. Lancée à l’occasion de la Journée mondiale contre les violences faites aux femmes (le 25 novembre), cette campagne s’étale tout au long de l’année, bien sûr, mais elle s’accompagnera d’une multitude d’actions (débats, théâtre, journées de formation, comme le 23 novembre à Bobigny,…) proposées par les communes, avec deux points forts, fin novembre et autour du 8 mars 2010, journée de la femme.
Cancer colorectal chez les plus de 70 ans : quels bénéfices à une prise en charge gériatrique en périopératoire ?
Un traitement court de 6 ou 9 mois efficace contre la tuberculose multirésistante
Regret post-vasectomie : la vasovasostomie, une alternative à l’AMP
Vers un plan Maladies rénales ? Le think tank UC2m met en avant le dépistage précoce