Comment définir le panier de soins remboursables ?

De l’intérêt de l’évaluation cout/efficacité

Publié le 28/11/2012
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LE LÉGISLATEUR a chargé la Haute autorité de santé (HAS) d’évaluer les soins et les prescriptions au plan médico-économique. Depuis 2008, la HAS formule des recommandations sur les prises en charge « les plus efficientes ». À charge pour le politique d’arbitrer ensuite. Ce chemin, qu’ont emprunté les pays développés en vue de concilier qualité des soins et maîtrise des dépenses, est-il le bon ?

La HAS vient d’organiser un colloque sur le sujet. À la tribune, des experts ont débattu de l’intérêt de l’évaluation économique, une discipline apparue il y a une quarantaine d’années, et qui s’applique à des secteurs aussi divers que la prévention routière ou la lutte contre le réchauffement climatique.

Dans le champ médical, les questions soulevées sont notamment de nature éthique. Est-il pertinent d’engloutir des millions d’euros pour développer des techniques innovantes ? « Est-ce bien nécessaire ? Le sacrifice est-il compensé ? », questionne Mark Sculpher, un économiste à l’université de York qui a travaillé pour le NICE, l’équivalent de la HAS au Royaume-Uni. À titre d’exemple, le NICE a comparé le coût et l’efficacité des médicaments et de la chirurgie laparoscopique dans la prise en charge des reflux œsophagiens. Ont été mesurés le temps passé au bloc, le volume de médicaments consommé, le nombre de visites au médecin, ainsi que le traitement de la douleur. Au final, le choix de société doit toujours revenir au politique, rappelle Mark Sculpher : « Le NICE utilise la comparaison coût/efficacité non pour dicter les décisions, mais pour les nourrir. Il faut faire le bilan critique de cette analyse, qui ne peut pas remplacer les délibérations entre décideurs ».

Nécessité fait loi.

Peter Smith, professeur de politique de santé à l’Imperial College, à Londres, juge l’approche intéressante, et « équitable ». Cela « pousse les médecins et les patients dans la bonne direction », argumente-t-il. L’économiste rappelle que les systèmes de santé ont une incidence directe sur l’espérance de vie des patients. « La France, vu ses dépenses de santé, a un système de santé efficace qui rajoute six mois de durée de vie à ses citoyens. A contrario, le système aux États-Unis enlève quatre années de vie ».

Gilles Johanet, procureur général à la Cour des comptes, et ancien président du CEPS, estime qu’en France comme ailleurs, « nécessité fait loi ». « L’état des finances est tel qu’on va être obligé de compter. (...) Mon expérience au CEPS m’a convaincu que nous sommes en France obligés d’adopter les QALY [l’acronyme anglais de « Quality Adjusted Life Year » ou « année de vie ajustée par sa qualité »] pour fixer le prix des médicaments. Ce n’est pas la doctrine officielle, mais on y viendra ».

DELPHINE CHARDON

Source : Le Quotidien du Médecin: 9197