Alors qu'en France, ce 30 juin marque la dernière étape de la stratégie de « réouverture » du gouvernement avec notamment la fin des jauges dans les restaurants et les lieux culturels, la menace du variant Delta plane, laissant déjà présager une quatrième vague à la rentrée après une trêve estivale, comme l'a souligné le Pr Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique Covid-19, au micro de « France Inter » ce 30 juin.
« Je crois qu'on aura une quatrième vague mais qu'elle va être beaucoup plus nuancée que les trois premières parce qu'il y a un niveau de vaccination qui n'est pas du tout le même. Mon message est de dire "Anticipons, sachons-le, et vaccinons-nous un maximum durant les mois de juillet et d'août" », a-t-il déclaré.
Un schéma vaccinal complet pour lutter contre le variant Delta
Comme l'an dernier, cet été sera propice au relâchement, alors que les chiffres de l'incidence sont bas en France. Mais le président du conseil scientifique appelle à être « réalistes » et « conscients », rappelant les rebonds épidémiques de septembre et du début d'année avec l'arrivée du variant Alpha (britannique), et alors que le variant Delta - qui représente 20 % des nouveaux diagnostics réalisés - est associé à un niveau de transmission plus élevé de 50 à 60 % par rapport au variant Alpha et va probablement s'étendre progressivement au cours de l'été.
Concernant l'efficacité des vaccins contre ce variant Delta, le Pr Delfraissy a insisté sur l'importance d'une vaccination complète : « Les vaccins sont efficaces contre le variant Delta quand on a eu deux injections pour les vaccins qui nécessitent deux injections. C'est non quand on a eu qu'une seule injection ». Il invite ainsi les Français à se faire vacciner au cours de l'été pour avoir leurs deux injections à la rentrée de septembre.
Il a par ailleurs affirmé que le vaccin AstraZeneca était également efficace contre ce variant : « On le sait avec ce qu'il se passe en Angleterre, nous avons finalement un modèle anglais qui nous précède, comme cela avait été le cas avec le variant anglais aux mois de novembre et décembre. » D'après lui, le variant Delta représente désormais 70 % des infections en Angleterre et en Écosse et commence à avoir un retentissement sur le système de soins. « Et on voit progressivement une augmentation des hospitalisations dans ces deux pays », rapporte-t-il, précisant qu'il s'agit de patients non vaccinés ou bien n'ayant reçu qu'une seule dose quand deux étaient nécessaires.
Une concertation sur la vaccination obligatoire des soignants
Au sujet de l'intérêt d'une éventuelle troisième dose pour les patients les plus fragiles notamment, les preuves scientifiques manquent encore. Toutefois, « le fond de ma pensée, c'est qu'on ira à une troisième dose pour stimuler un système immunitaire qui est un peu défaillant quand on a un certain âge (...). Je pense qu'au-dessus de 60 ou 70 ans, une troisième dose sera probablement envisagée à partir de l'automne », avance-t-il.
Après Olivier Véran et Alain Fischer, et alors que Jean Castex a annoncé ce 30 juin le lancement dans les jours à venir d'une concertation autour de la vaccination obligatoire des soignants, le Pr Delfraissy a lui aussi abondé en ce sens. « J'ai changé d'avis, reconnait-il. Je le dis très franchement. J'étais contre l'obligation, et il me semble que maintenant, on a atteint le niveau où on doit envisager une obligation au niveau des soignants ». Et sans attendre la rentrée : « Si on veut anticiper ce qu'il se passe en septembre c'est maintenant. »
Déployer la stratégie de l'aller vers
Tandis que la campagne de vaccination stagne, pas seulement chez les soignants mais dans la population générale, le président du conseil scientifique a toutefois salué son succès, avant d'évoquer le « plafond de verre » contre lequel buttent nombre de pays et qui pourrait entraîner un impact du variant Delta sur le système de soins à l'automne. Dans ce cadre, il a rappelé que le Covid était une « maladie socialement injuste, profondément injuste ». « Ce sont les populations les plus socialement défavorisées qui ont une difficulté à se faire vacciner », précise-t-il.
Après une stratégie de vaccination massive, il invite à une stratégie de l'aller vers, « avec des explications beaucoup plus spécifiques » : « il faut des camions de vaccination dans les cités, dans les endroits qui sont peu médicalisés », note-t-il. Et de poursuivre : « C'est notre responsabilité, c'est bien sûr aussi celle du gouvernement, de ne pas montrer du doigt ceux qui hésitent mais au contraire de les accompagner, de leur expliquer à la fois l'intérêt pour eux-mêmes et pour les autres ».
Et alors que les données ne sont pas encore disponibles concernant la vaccination des enfants de moins de 12 ans, il estime que l'enjeu dans cette population sera davantage le dépistage massif au niveau des écoles.
« On en aura fini avec le Covid quand 100 % de la population aura été soit vaccinée, soit contaminée, et c'est probablement en 2022, en tout cas dans les pays européens riches », prédit-il. Il invite à se préparer au contraste qui va se dessiner encore davantage à cette échéance « entre les 40 à 50 pays les plus riches du monde qui auront été vaccinés et le reste du monde qui ne l'aura pas été » et à réfléchir à la manière de « maintenir un dialogue et une communication entre ces deux mondes ».
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