LE CONSTAT peut sembler paradoxal. En piètre santé financière, avec des déficits chroniques d’exploitation qui dépassent souvent plusieurs centaines de milliers d’euros, les centres de santé franciliens restent précieux pour maintenir l’offre médicale dans certains territoires fragiles (grâce notamment au tiers payant et aux tarifs de secteur I). Ils constituent même une voie d’avenir, sous réserve d’une réorganisation profonde et d’une optimisation de leurs ressources. C’est en tout cas le message positif de l’ARS d’Ile-de-France qui vient de présenter les résultats de sa mission d’accompagnement des centres de santé franciliens. Il en existe 302 en activité (1) dans la région (1500 pour toute la France) salariant plus de 9 000 professionnels.
L’objectif de cette étude (qui a consisté en l’analyse de 30 centres polyvalents et médicaux volontaires) était d’identifier les handicaps les plus fréquents et de mettre en œuvre des leviers d’amélioration. Loin de penser que ces structures sont condamnées, l’ARS-IDF entend « créer une dynamique », explique Pierre Ouanhnon, directeur du pôle ambulatoire de l’agence, à l’heure où les installations en libéral isolé se raréfient.
Gestion ruineuse du tiers payant.
Les résultats de la mission sont éloquents. La pratique des centres est « peu adaptée » à une source presque exclusive de financement par le paiement à l’acte, qui ne valorise pas les activités de prévention, de coordination, les actions sociales ou encore les actes longs fréquents dans ces structures. Plus surprenant, la nomenclature utilisée pour le codage des actes serait largement « méconnue » des professionnels (et des secrétariats) avec des actes sous facturés au sein des centres de santé. La mission a aussi repéré une gestion calamiteuse du tiers payant avec des coûts de gestion « mal maîtrisés », et extrêmement variables (d’un à 22 euros par consultation selon les cas !). En cause : des défauts d’organisation ou d’informatisation.
La gestion des plannings est aléatoire. « On constate un fort absentéisme des patients. De nombreux rendez-vous sont non concrétisés et non remplis », résume Pierre Ouanhnon. L’ARS pointe également une hétérogénéité dans le management avec une amplitude horaire d’ouverture inégale des centres et des ratios soignants/administratifs « déséquilibrés ».
D’autres handicaps des centres de santé sont mis en exergue par l’ARS comme les difficultés de recrutement de spécialistes (ophtalmologie, gynécologie pédiatrie), une mauvaise optimisation des achats ou encore des activités « insuffisamment encadrées et valorisées » (imagerie, dentaire).
Au final, il ressort de cet « audit » volontaire une fragilité financière préoccupante des centres de santé franciliens qui, pour nombre d’entre eux, périclitent (la situation est similaire au niveau national). Le risque est de conduire certains gestionnaires (municipalités, associations, mutuelles) à creuser la dette ou, au contraire, à abandonner ces structures dans un avenir proche. Quelques-uns ont déjà fermé.
Rationaliser les achats.
Pour inverser la tendance, l’ARS présente des pistes pour améliorer la gestion médico-administrative des centres de santé. Il s’agit d’augmenter le taux d’occupation des cabinets, d’optimiser le codage, de réorganiser l’accueil et les appels téléphoniques, de mieux suivre les impayés des patients, de revoir la gestion du tiers payant ou encore de centraliser les achats. Un plan d’action a été mis en place pour trois ans. Une « boîte à outils » devrait permettre aux gestionnaires d’améliorer les procédures. Des groupes de travail thématiques seront lancés (tiers payant, codage...).
Côté ressources, Pierre Ouanhnon estime qu’il ne faut pas s’interdire une réflexion sur le « modèle économique » des centres de santé dès lors que « le paiement à l’acte n’est pas adapté » aux activités et missions de ces structures. La démarche a commencé puisque nombre de centres de santé ont souhaité être éligibles aux nouveaux modes de rémunération (NMR). Ces expérimentations consistent à verser un forfait rémunérant la structure, au titre de la coordination, de la prévention et de l’éducation thérapeutique. Mais les budgets font défaut. Prévue dans le PLFSS 2013, la rémunération d’équipes coordonnées pluridisciplinaires pourrait apporter un ballon d’oxygène. « L’article est intéressant, nous attendons de voir les décrets », commente-t-on prudemment à l’ARS.
Mais l’Agence francilienne va plus loin en souhaitant encourager, le cas échéant, les projets de création de centres de santé dans les territoires prioritaires. « Nous restons à l’affût des opportunités, note Pierre Ouanhnon. Sur le premier recours, il faut faire feu de tout bois ». Cette politique « au cas par cas » exige au minimum l’implication des communes, l’existence d’un vrai projet de soins et l’engagement des professionnels.
Les 302 centres de santé d’Ile-de-France se répartissent ainsi : 92 centres médicaux exclusifs, 60 centres dentaires exclusifs, 131 centres polyvalents et 19 centres de soins infirmiers. À Paris, les centres de santé réalisent 15% des consultations en ambulatoire.
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