Aux universités d’été de transplantation, qui ont eu lieu à Lyon début juillet, les intérêts de la perfusion hépatique normothermique et hypothermique oxygénée ont été discutés pour la préservation du foie avant transplantation.
« Du fait de l’inadéquation entre le nombre de patients sur la liste d’attente de greffe de foie et les greffons hépatiques disponibles nous sommes obligés d’accepter des foies à critères élargis dits “marginaux” à risque plus élevé de complications après la transplantation », souligne le Pr Mickaël Lesurtel, chirurgien à la Croix-Rousse à Lyon. Or, le stockage statique dans le froid n’est pas adapté à ce genre de greffons plus sensibles à l’ischémie.
« Entre le moment où le foie est prélevé et le moment où il est implanté, nous le transportons dans la glace, sans oxygène, à 4°C. Or, le foie est comme une pile électrique : il se vide pendant l’ischémie froide et lorsqu’on l’implante, il peut avoir du mal à redémarrer », détaille le chirurgien. Pour éviter cela et « recharger la pile » avant l’implantation chez le receveur, une possibilité est de perfuser le greffon hépatique par une pompe hypothermique oxygénée en circuit fermé. « Dans ce cas, le foie voyage classiquement dans la glace et n’est perfusé que quelques heures sur le site de la greffe avant l’implantation », souligne le Pr Lesurtel.
L’autre possibilité est d’utiliser une machine de perfusion normothermique. Ceci impose alors une perfusion au sang avec une logistique plus lourde et nécessite souvent un perfusionniste au pied de la machine. Néanmoins, la normothermie permet au foie d’être métaboliquement actif. Il est alors possible de tester sa viabilité, d’imaginer des traitements médicamenteux appliqués directement au greffon sans impact sur le receveur, voire de faire de la thérapie génique. « Les difficultés avec ce genre de machines sont triples : encombrantes, coûteuses et possiblement dangereuses pour l'organe. Au moindre problème sur la machine, on risque de le perdre car il est métaboliquement actif alors qu’en hypothermie oxygénée, le foie est dans le froid, donc protégé et potentiellement transplantable dans tous les cas », souligne le chirurgien.
Première étude sur la normothermie en France
La perfusion hypothermique oxygénée est utilisée dans le cadre d’une étude européenne, « HOPE study », à laquelle participent trois centres français, dont Lyon. « Le greffon est placé sur la machine pendant au moins une heure et reste dans le froid. Le problème de cette étude, c’est que nous y incluons tous les greffons, bons comme mauvais », pointe-t-il. En France, une étude va être lancée en septembre sur les donneurs marginaux, avec six centres, Rennes, Strasbourg, Villejuif, Beaujon, Lille et Lyon. Les donneurs marginaux, qui représentent plus de 50% des donneurs, ont au moins un des critères suivants : plus de 60 ans, plus de 7 jours en réanimation, une stéatose de plus de 30%, des transaminases élevées ou une ischémie froide de plus de 12 heures.
Concernant la normothermie, une étude publiée dans « Nature » en 2018 par Nasralla, P. Friend* et leurs collègues a montré que son utilisation permettait de diviser par deux le pic de transaminases, et qu’il y avait deux fois moins de foies non utilisés. En revanche, aucune différence n’a été observée concernant les complications des voies biliaires, ni sur la survie du greffon et du patient.
« L’AP-HP va réaliser une étude pilote sur 20 greffons. Les greffons incertains seront placés sur une machine de normothermie pendant au moins 4 heures pour les tester avant éventuelle implantation. Ce sera la première expérience de normothermie en France », annonce le Pr Lesurtel. Pour lui, « les machines de perfusion pour le foie vont devenir la routine, mais la question se pose encore sur la manière de les utiliser ».
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