Information judiciaire contre 17 associations

La générosité à l’épreuve des escroqueries et de la crise

Publié le 15/10/2009
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L’HORIZON des associations, en ce début de 4 e trimestre, d’habitude le plus faste en termes d’appel à la générosité du public, est déjà passablement chargé. Un sondage effectué auprès de 3 408 donateurs par le syndicat France Générosités, qui regroupe 70 organismes caritatifs, augure d’une mauvaise fin d’année : 19 % des donateurs disent « réduire beaucoup » le montant de leurs dons sous l’effet de la crise, 22 % prévoient de le « réduire un peu ». France Générosités en déduit que la collecte 2009 pourrait être inférieure à celle de 2008.

Et voilà que l’opinion est interpellée par une affaire d’escroquerie et d’abus de confiance aggravés. La procédure vise 17 associations. L’information judiciaire, qui a été ouverte l’an dernier et que révèle « Le Parisien », a donné lieu à diverses commissions rogatoires, notamment aux États-Unis. Des sociétés américaines de marketing direct, chargées de gérer les envois de courriers aux donateurs et de centraliser les dons, seraient au centre des investigations. Les associations visées n’auraient pignon sur rue en France qu’à travers des boîtes à lettres, de simples domiciliations commerciales, parfois communes à plusieurs structures caritatives. Des millions d’euros, selon les enquêteurs, auraient été détournés vers des sociétés écrans basées outre-Atlantique, qui représenteraient jusqu’à 90 % des montants collectés. Des organismes français de recherche se partageraient au passage des sommes résiduelles, versées en trompe-l’œil.

Des noms portant à confusion.

La plupart des associations impliquées entretiennent la confusion par leurs acronymes, avec des structures identifiées de longue. C’est le cas de l’Association pour la recherche sur le diabète (ARD), dont l’Association française des diabétiques, quant à elle bien connue pour son indépendance et sa transparence, avait déjà dénoncé « les liens américains aux contours imprécis, la faiblesse des sommes reversées à la recherche en regard de l’évaluation des dons collectés, ainsi que l’opacité ».

À Médecins du monde, on dénonce les courriers de NDM (nourriture du monde), ou de MAM (Mission d’aide mondiale). Président de MDM, le Dr Olivier Bernard exprime sa « colère contre ces structures dont les premières victimes sont les bénéficiaires de nos actions, à l’étranger comme en France, qui seront privés des sommes détournées ». Médecins sans frontières, qui a connu dans le passé plusieurs alertes et qui veille de près, avec un service juridique, à la protection de la marque MSF, accuse cependant le coup : « Cette affaire nous interpelle gravement car elle crée le doute et la suspicion dans l’opinion », estime Felipe Ribeiro, directeur général.

Une ONG plus modeste, comme Aide médicale internationale, se voit touchée aussi avec l’utilisation de l’acronyme Mission médicale internationale, mais « surtout, estime Frédéric Marc, son porte-parole, nous sommes solidaires de l’ensemble des humanitaires qui, après cette affaire, pourraient pâtir solidairement d’un climat de défiance. Dans ces conditions, peut-être, envisage-t-il, allons-nous rejoindre le Comité de la Charte, l’organisme d’autocontrôle constitué par une soixantaine d’associations. »

Un autre regroupement caritatif, le syndicat France générosités (dont les membres revendiquent 60 % de la collecte de fonds en France), prend les devants en lançant une campagne nationale de communication ; pour promouvoir le don des particuliers, son message mettra l’accent sur les avantages de la fiscalité relative au don, l’une des plus incitatives au monde : France Générosité va tenter de remonter les courants contraires en expliquant qu’un don ne coûte en réalité que 34 % du montant que reçoit l’organisme, grâce à la réduction d’impôt (66 %) à laquelle il ouvre droit.

* Association Mère Teresa (AMTE), Association pour la recherche sur le diabète (ARD), Association pour la recherche sur la dégénérescence maculaire liée à l’âge (ARDMLA), Association pour la recherche sur la maladie d’Alzheimer (AIRMA), Ligue européenne contre la maladie d’Alzheimer (LECMA), Mission d’aide mondiale (MAM), Mission médicale internationale (MMI), Cancer et résilience (CER), Fonds de recherche et de soutien pour le cancer du sein (FRSCS), Doctors with a mission (DWAM), Opération sauvetage enfants (OSE), Agir pour les enfants du monde (AEM), Village du monde pour enfants (VMPE), Pain et eau pour l’Afrique (PEA), Nourriture du monde (NDM), Lumière d’espoir, World assistance (WA).

CHRISTIAN DELAHAYE

Source : lequotidiendumedecin.fr