Un foramen ovale (FO) perméable est associé à un risque d'accident vasculaire cérébral (AVC) ischémique multiplié par 2 à 3 en période périopératoire, d'après une étude publiée dans le « JAMA » à partir d'une cohorte américaine de 150 198 patients opérés.
L'équipe dirigée par le Dr Matthias Eikermann du centre médical Beth Israel Deaconess et de la faculté de Harvard a analysé la survenue d'AVC ischémique dans les 30 jours après chirurgie chez, au départ, plus de 180 000 patients adultes consécutifs entre début 2007 et fin 2015, au Massachusetts General Hospital (MGH) et deux centres affiliés.
Le FO, un potentiel facteur de risque
Il s'agissait de tout type d'intervention, hors chirurgie cardiaque, réalisée sous anesthésie générale et avec ventilation mécanique et extubation à la fin de l'intervention.
« Il y a eu un intérêt grandissant pour l'association entre un FO et l'AVC ischémique », écrivent les auteurs. Le rôle du FO a été mis en avant dans la survenue d'AVC cryptogénique chez des sujets jeunes. A priori largement sous-diagnostiqué, le FO a une prévalence assez élevée dans la population générale, de l'ordre de 25-27 % d'après une série d'autopsie. L'étude CLOSE dirigée par le Pr Jean-Louis Mas à l'hôpital Sainte-Anne (Paris) a récemment apporté la preuve d'un bénéfice à la fermeture du FO en prévention secondaire.
Une physiologie différente avec la chirurgie
Les auteurs ont formulé l'hypothèse que les modifications de physiologie en contexte chirurgical puissent favoriser la survenue d'AVC ischémique en présence de FO. Le phénomène de shunt de droite vers la gauche pourrait survenir plus facilement suite à « une hémorragie, la ventilation mécanique, le positionnement du patient et la chute des résistances vasculaires systémiques suite à l'anesthésie », proposent les auteurs. Il pourrait y avoir également un état d'hypercoagulabilité et d'inflammation systémique, suite à l'arrêt des antiagrégants plaquettaires et des anticoagulants avant la chirurgie, poursuivent-ils.
Le diagnostic de FO était connu avant l'intervention, ce qui concernait 1 540 (1,0 %) dans l'étude. Ces patients avaient déjà eu une échographie cardiaque et présentaient plus souvent de comorbidités cardio-vasculaires ou thromboemboliques, un biais réel que les auteurs ont essayé de prendre en compte en ajustant leurs résultats.
Sur un total de 850 AVC ischémiques dans les 30 jours post-chirurgicaux, 49 (3,2 %) sont survenus dans le groupe FO et 801 (0,5 %) chez les autres. Le risque estimé d'AVC ischémique était de 5,9 pour 1000 patients avec FO et de 2,2 pour 1000 patients sans FO. Le risque d'AVC dans un territoire à gros vaisseau était triplé en cas de FO avec un risque plus important de séquelles neurologiques.
Mieux évaluer ce risque avant d'agir
Que faut-il faire de ces résultats en pratique ? Pour les auteurs, comme dans l'éditorial écrit par deux neurologues de l'université de Pennsylvanie, il est trop tôt pour recommander quoi que ce soit, en termes de dépistage ou de prise en charge, mais ces nouvelles données intriguent suffisamment pour poursuivre les recherches. La causalité n'est pas démontrée.
« En pratique clinique, un traitement prophylactique antiplaquettaire ou anticoagulant est souvent différé en période périopératoire », écrivent les auteurs en précisant que les patients avec FO ne sont pas retenus comme groupe à haut risque. Il serait intéressant, selon eux, à l'avenir de savoir si ces patients pourraient tirer bénéfice d'intensifier les mesures préventives en périopératoire, « par exemple d'une évaluation risque/bénéfice individualisée du choix et du timing du traitement antithrombotique, de seuils modifiés de transfusion ou de fermeture préopératoire du FO chez des patients sélectionnés ».
Pour les éditorialistes, la prudence est de mise pour minimiser la durée des interruptions médicamenteuses dans l'attente de données supplémentaires. Des approches non pharmacologiques de prévention thromboembolique, « comprenant la mobilisation précoce postopératoire », pourraient être intéressantes, font-ils remarquer.
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