LA PRISE en charge médico-sociale des personnes à la rue est une longue marche. En 1994, à l’initiative du Dr Xavier Emmanuelli, le premier centre d’hébergement d’urgence avec soins infirmiers (CHUSI) ouvrait ses portes à Paris. Ces lits infirmiers, agréés par la Caisse primaire d’assurance-maladie, accueillent aujourd’hui toute personne sans domicile fixe qui présente à la fois des problèmes d’hébergement et des problèmes de santé, sans relever de l’hospitalisation traditionnelle. Des soins infirmiers, un suivi médical et une orientation sociale y sont dispensés.
En2006, cette offre de soins était complétée par les lits halte soins santé. Là encore, étaient concernés les patients qui ne justifient pas d’une admission en hôpital général. Des patients qui doivent cependant garder la chambre, rester au chaud, être allongés. Et bénéficier de soins quotidiens, médicaux et paramédicaux. Mais la durée de leur séjour ne peut excéder une période de deux mois, éventuellement reconductible une fois (« le Quotidien » du 23 janvier 2007).
Voici donc les LAM, qui viennent compléter la gamme des possibilités de dispenser des soins aux personnes sans domicile fixe : ils s’adressent à « une population extrêmement marginale atteinte de pathologies chroniques de pronostic sombre (Korsakov, Alzheimer, schizophrénie, psychose, cancers évolués) ». Des exclus qu’aucune structure n’accueille, ni les FAM (foyers d’accueil médicalisé), ni les EHPAD (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), ni les CSSR (centres de soins de suite et de réadaptation). Et que les LHSS sont normalement contraints de remettre à la rue, une fois dépassé le délai réglementaire de deux ou quatre mois.
Trois structures ont été choisies pour lancer cette expérimentation : le SAMU Social de Paris (24 places), l’APEJ (Association baptiste pour l’entraide et la jeunesse) de Lille (15 places) et le Foyer aubois de Saint-Julien-les-Villas, dans l’Aube (6 places). C’est l’assurance-maladie qui assurera leur financement, précise l’arrêté ministériel cosigné par Roselyne Bachelot, Brice Hortefeux et Christine Boutin, les ministres de la Santé, du Travail et du Logement (« Journal officiel » du 28 mars). « Avec 182,65 euros par jour et par lit, se félicite Rolande Ripeaucourt, cadre infirmière, responsable de L’APEJ, alors que la dotation des LHSS est limitée à 100 euros, nous pourrons fonctionner avec des personnels médicaux et paramédicaux bien plus présents qu’en LHSS, renforcés si besoin par des partenariats extérieurs (hôpitaux, pharmacies, libéraux, réseaux). »
Prise en charge médicale complète.
En plus d’un plateau technique, « les LAM bénéficieront d’équipes pour stimuler physiquement et psychiquement les patients, note Valérie Parigi, directrice générale du SAMU Social, avec des ergothérapeutes, des kinésithérapeutes et des aides médico-psychologiques. Bref, la prise en charge médicale pourra être complète. Et elle sera accompagnée d’un suivi social, avec des assistantes sociales chargées d’élaborer des modes de sortie, en travaillant en réseau avec les structures adaptées. »
Les LAM pourront fonctionner « à la manière d’un sas, note Rolande Ripeaucourt : si une personne à la rue a les plus grandes peines à être admise, par exemple, dans une maison de retraite médicalisée, nous pouvons espérer que son cas sera mieux pris en compte dès lors qu’elle réside en LAM. »
Comme les précédents dispositifs médico-sociaux des LS ou des lits infirmiers, les LAM risquent toutefois d’être exposés à la stigmatisation : « Il ne faut pas que les lits d’accueil médicalisés soient considérés comme des hôpitaux de pauvres, prévient la responsable lilloise. C’est un danger à conjurer avec d’autant plus de vigilance que toutes les structures de droit commun affichent largement complet pour les personnes non exclues. » De fait, l’arrêté ministériel mentionne, dans la liste des pathologies chroniques concernées par les LAM, la schizophrénie et les autres troubles psychotiques, et Mme Ripeaucourt ne voudrait « surtout pas que ces lits soient destinés à suppléer aux carences des lits en établissements psychiatriques, alors que nombre de personnes sans domicile sont atteintes d’affections psychiques ».
Quand même, les responsables des structures chargées de l’expérimentation, qui attendaient depuis des années la publication de l’arrêté ministériel, se réjouissent de pouvoir enfin assurer un suivi au long cours de personnes à la rue. Des personnes, constate Valérie Parigi, qui sont de plus en plus dégradées médicalement, quel que soit leur âge. À Paris et à Lille, les LAM ouvriront dès le mois prochain dans des sites dédiés. Pendant trois ans, les rapports d’évaluation vont vérifier l’intérêt du projet.
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