L’analyse des eaux usées pourrait être un outil pour la surveillance de l’épidémie de Covid-19. Alors que des études ont déjà révélé la présence du SARS-CoV-2 dans les selles de patients contaminés, des éléments du génome du virus ont été détectés dans les eaux usées des zones de contamination.
Le SARS-CoV-2 présent dans les eaux usées
Début avril, dans une correspondance publiée dans « The Lancet gastroenterology hepatology », des chercheurs du Centre de contrôle des maladies infectieuses des Pays-Bas ont annoncé avoir décelé des traces du SARS-CoV-2 dans des échantillons d’eaux usées collectées à l’aéroport Schiphol d’Amsterdam, quatre jours après l’identification des premiers cas de Covid-19 dans le pays.
Des tests menés sur des échantillons d’eaux usées prélevés à Tilburg, où les premiers cas néerlandais sont apparus, ont également révélé la présence du virus quelques jours après l’identification des premiers malades. « La surveillance des eaux usées, en particulier dans les zones où les données sont rares, pourrait être informative, comme nous l'avons montré précédemment dans le suivi de la résistance aux antibiotiques à l'échelle mondiale », concluent les auteurs. Des études similaires sur les eaux usées ont été menées en Australie, aux États-Unis ou encore en Suède.
Suivre la dynamique de l'épidémie
En France, une étude, menée par laboratoire de la régie municipale Eau de Paris, en collaboration avec Sorbonne Université et l’Institut de recherche biomédicale des armées (IRBA), mise en ligne sur le site de prépublication MedRxiv (non revu par les pairs), s’est également attachée à analyser les eaux usées.
« Alors que de nombreux cas d’infection par le Covid-19 sont peu ou pas symptomatiques, l’idée était de disposer d’un marqueur épidémiologique pour quantifier la circulation du virus », explique au « Quotidien » le Pr Vincent Maréchal, virologue à Sorbonne Université.
Les chercheurs ont ainsi analysé 23 échantillons d'eaux usées brutes et huit échantillons d’eaux traitées, qui ont été prélevés, du 5 mars au 7 avril, dans trois grandes stations d'épuration de la région parisienne. « Tous les échantillons d'eaux usées brutes ont obtenu un résultat positif pour le SARS-CoV-2, constatent-ils. Six échantillons sur huit des eaux usées traitées ont obtenu un résultat positif. »
Leur analyse a également permis de démontrer, pour la première fois, que « la quantité d’unités virales (génomes vivants ou fragments) dans les eaux usées est étroitement corrélée au nombre de cas de Covid-19 », souligne le Pr Vincent Maréchal. Ainsi, la surveillance des eaux usées apparaît comme un outil potentiel fiable pour le suivi de l’épidémie.
Des résultats préliminaires, non publiés dans une revue scientifique mais cités par « The Conversation », semblent par ailleurs indiquer une décroissance récente de la charge virale dans les eaux usées. « Pour nous, c’est un argument d’ordre virologique qui confirme l’impact du confinement », souligne le Pr Maréchal.
Le scientifique et ses collègues plaident ainsi, notamment auprès du Comité analyse recherche et expertise (Care) qui conseille les autorités, pour la mise en place d’un réseau Sentinelle national de surveillance des eaux usées pour « suivre la dynamique de l’épidémie », indique le Pr Vincent Maréchal, avec une dimension locale, chaque station d’épuration correspondant à un territoire déterminé. Cette approche pourrait être extrapolée à l’ensemble des pays concernés par l’épidémie.
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