Pourquoi certaines personnes vont développer un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) à cause du Covid quand d'autres n'auront aucun symptôme ? Une étude parue dans « Science Translational Medicine », combinant analyse multi-omique et intelligence artificielle (IA), a permis de mettre en cause le gène Adam9 dans cette différence d'évolution de la maladie. Ce gène réprésente une cible thérapeutique intéressante.
Ce travail a été mené par des chercheurs de l’Inserm et de l’université de Strasbourg, en collaboration avec des cliniciens‑chercheurs des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, des chercheurs de l’entreprise américaine Genuity Science* (Boston) et de l’université de Californie du Sud à Los Angeles.
Une équipe franco-américaine avait déjà mis en évidence des anomalies génétiques et immunologiques conduisant à un déficit d'expression de l’interféron de type 1.et à l'origine de 25 % des formes sévères de Covid.
Exclusion des facteurs de risque
Au total, 94 patients, jeunes (moins de 50 ans) et ne présentant pas de comorbidités majeures, ont été inclus au cours de la première vague épidémique : 47 patients Covid pris en charge en soins intensifs pour SDRA et placés sous ventilation mécanique, 25 patients Covid hospitalisés en secteur conventionnel ainsi que 22 sujets sains.
« Nous avons fait le choix de nous pencher sur une cohorte de patients restreinte mais très bien définie, en excluant les facteurs confondants comme l’âge ou certaines pathologies, afin de pouvoir vraiment étudier les mécanismes moléculaires et génétiques directement associés aux formes graves, qui soient exclusivement liés à l’infection virale et non à d’autres facteurs de risque préexistants », explique Seiamak Bahram, dernier auteur de l’étude.
Les chercheurs se sont intéressés à un grand nombre de données biologiques et génomiques au sein de cette cohorte (séquençage du génome entier et des ARNm, données protéomiques, virologiques, sérologiques…). Ils ont d'abord pu confirmer, sans surprise, qu'une inflammation exacerbée était observée chez les patients SDRA.
Des résultats in vivo intéressants
Et grâce à des techniques avancées d'IA, ils ont analysé l'ensemble des données et ainsi mis en évidence une signature génique spécifique des patients critiques. Quelque 600 gènes impliqués dans l'évolution vers une forme sévère du Covid ont été identifiés. En particulier, cinq gènes surexprimés chez les patients SDRA ont été identifiés, dont le gène Adam9 codant pour une métalloprotéase.
Ce gène a particulièrement retenu l'attention des chercheurs, car de précédentes études ont montré qu'Adam9 interagissait avec des protéines du SARS-CoV-2. Son rôle a pu être validé à l'aide d'une deuxième cohorte indépendante incluant 81 patients sévères et 73 patients guéris du Covid et confirmé au niveau transcriptionnel et protéique. « Nous avons identifié Adam9 comme étant un "driver" de la sévérité de la maladie et comme étant une cible thérapeutique potentielle », soulignent les auteurs.
En inhibant l'expression du gène Adam9 in vivo au sein de cellules épithéliales pulmonaires infectées, les chercheurs ont pu observer une diminution de la quantité de SARS-CoV-2 et de sa réplication, ce qui soutient l'intérêt potentiel de cette piste thérapeutique.
*Devenue société HiberCell
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