« L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) souhaite vous faire part d’une étude qui suggère une augmentation du risque de troubles neurodéveloppementaux chez les enfants dont le père a été traité par valproate ou ses dérivés (Dépakine, Dépakote, Dépamide, Micropakine et génériques) dans les trois mois avant la conception, comparativement aux pères traités par d’autres antiépileptiques (lamotrigine ou lévétiracétam). » Ainsi débute une lettre d’information du régulateur adressée hier à « l’ensemble des professionnels de santé concernés ».
Un risque compris entre 5,6 % et 6,3 %
Pour rappel, en mai dernier, l’ANSM avait communiqué sur les résultats d’une étude « demandée aux laboratoires pharmaceutiques dans le cadre de la surveillance au niveau européen des médicaments contenant du valproate et ses dérivés ».
Et pour cause : ce travail – fondé sur des données issues de registres norvégiens, danois et suédois – suggérait « une augmentation du risque de troubles neurodéveloppementaux chez les enfants dont le père a été traité par valproate dans les trois mois avant la conception ».
Plus précisément, cette étude estimait ce risque compris « entre 5,6 % et 6,3 % chez les enfants nés de père exposé au valproate ». Soit un chiffre bien inférieur au risque de troubles neurodéveloppementaux liés à une exposition maternelle au valproate (« de l’ordre de 30 à 40 % », rappelle l’ANSM), mais possiblement presque deux fois supérieur à celui retrouvé chez les enfants nés de pères traités par d’autres antiépileptiques (moins de 3,6 %).
Problème : « cette étude présente des limites qui ne permettent pas de tirer de conclusions définitives à ce stade », expliquait en mai l’ANSM. Si bien que l’Agence européenne du médicament (EMA) avait demandé aux laboratoires des données complémentaires et lancé une évaluation européenne.
Cet été, l'enquête est encore en cours. « Nous sommes dans l’attente des conclusions de l’EMA », indique ce vendredi 4 août l’ANSM, qui ajoute avoir toutefois décidé de faire sans tarder « un pas de plus » dans l’information, notamment des professionnels de santé, vis-à-vis de ce nouveau risque. Le but : que les prescripteurs puissent évoquer ce risque avec leurs patients et « en tenir compte le cas échéant ».
Inviter les donneurs de sperme à signaler la prise de valproate
Ainsi, l’instance adresse une lettre d’information aux généralistes, neurologues, neuropédiatres, pédiatres, psychiatres, gynécologues, gynéco-obstétriciens, sages-femmes et pharmaciens.
Y sont notamment résumés le contexte et les principaux résultats de l’étude, et proposés quelques préconisations : informer les patients de ce risque potentiel, discuter de la nécessité d’adopter une contraception adaptée ou « de la possibilité d’alternatives thérapeutiques » en cas de projet de conception, inviter les hommes sous traitement ayant déjà conçu un enfant à « faire part de leurs interrogations », orienter les parents qui s’inquiètent d’éventuels troubles du développement de leur enfant vers les plateformes de coordination et d’orientation, rappeler aux patients de ne pas interrompre d’eux-mêmes leur traitement, ou encore les inviter à « signaler qu’ils sont sous traitement par valproate ou dérivés en cas de don du sperme ».
Une fiche d’information destinée aux patients à remettre lors de la prescription est aussi disponible sur le site web de l’ANSM. « Des exemplaires papier de ce feuillet vous seront transmis prochainement. Dans cette attente, nous vous demandons de bien vouloir (l’) imprimer (…) ou inviter le patient à le lire en ligne », indique l’agence, qui travaille aussi avec l’industrie pharmaceutique autour de ce risque potentiel.
« Nous avons demandé aux laboratoires commercialisant ces médicaments qu’ils nous soumettent dès à présent une demande de modification de leurs autorisations de mise sur le marché afin que ce risque potentiel figure dans le résumé des caractéristiques du produit et dans les notices de ces médicaments. Nous leur avons également demandé de nous soumettre des documents complémentaires afin d’informer au mieux les patients et les professionnels de santé sur ce risque et la conduite à tenir afin de le réduire », précise l'agence.
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