La Mash – pour stéatohépatite associée à un dysfonctionnement métabolique – peut avoir une origine génétique ou métabolique. C’est ce qu’a découvert une équipe pluridisciplinaire* coordonnée par l’Inserm au CHU de Lille par le Pr François Pattou, chef du service de chirurgie générale et endocrinienne et directeur de recherche du laboratoire de recherche translationnelle sur le diabète**, dans le cadre du projet de recherche hospitalo-universitaire PreciNASH. Ces deux types de Mash présenteraient des caractéristiques biologiques propres, mais aussi des progressions différentes, permettant ainsi de les distinguer sur la base de six critères cliniques. Les résultats de cette étude, soutenue par le laboratoire Sanofi, sont présentés dans la revue Nature Medicine.
« La progression vers la Mash est variable d’un patient à un autre en termes de sévérité et de complications associées. Cela suggère qu’il en existe différents types », contextualise l’équipe dans un communiqué de presse de l’Inserm. « C’est une observation qui a en réalité déjà été faite dans le diabète de type 2 il y a quelques années. Il a été montré qu’il existait plusieurs profils de diabète de type 2 avec des réponses différentes aux traitements et c’est cette réflexion qui a été appliquée à la Mash dans cette étude », explique le Pr François Pattou pour le Quotidien. Ainsi, « notre travail permet de stratifier les cas de Mash en deux endotypes distincts, caractérisés chacun par des mécanismes biologiques spécifiques et une progression clinique différente », résume le Pr Pattou.
Un type de Mash à risque cardiovasculaire
L’équipe a analysé les données cliniques et anatomopathologiques de 1 389 patients de la cohorte Abos, suivie au CHU de Lille dans le cadre du projet européen Sophia sur la stratification des phénotypes d’obésité ; les biopsies de foie ont ainsi été réalisées durant une chirurgie de l’obésité après accord des patients. L’équipe a réussi à distinguer, grâce à la méthode de data-driven cluster, deux profils de patients à risque de Mash pouvant être différenciés grâce à six variables : indice de masse corporelle, taux d’enzyme hépatique alanine aminotransférase (ALT), âge, taux de LDL-cholestérol, taux de triglycérides et dosage d’HbA1c. Ces résultats ont ensuite été vérifiés par l’équipe dans quatre autres cohortes européennes indépendantes.
Ainsi, un type de Mash d’origine génétique se caractérise par une accumulation d’acides gras dans le foie du fait d’une dysfonction hépatique. Les patients avec ce profil présentent un taux anormal d’enzyme hépatique alanine aminotransférase (Alat), manifestent la pathologie à un âge plus jeune et avec une évolution plus rapide, et sont plutôt à risque de maladies hépatiques. De plus, les auteurs retrouvent une expression plus prononcée d’un variant (PNPLA3) déjà connu pour être impliqué dans la susceptibilité et la progression de la Mash, ainsi qu’un risque polygénique plus élevé.
L’autre type de Mash, d’origine cardiométabolique, résulte d’une accumulation de lipides sanguins dans le foie. Les patients de ce profil ont des taux de triglycérides et d’HbA1c élevés et sont à risque de diabète de type 2 et de maladies cardiovasculaires. Chez ces patients, les auteurs retrouvent une plus grande prévalence de dyslipidémies, d’hypertension artérielle et de dysglycémie, ainsi qu’une augmentation de divers métabolites intestinaux associés habituellement à l’insulinorésistance et à la pathogenèse du diabète.
Les auteurs expliquent cependant que « ces deux formes ne peuvent pas être distinguées par la biopsie hépatique qui sert seulement au diagnostic de la Mash », et que leurs observations prouvent que sont « les mécanismes physiopathologiques conduisant à l’apparition de ces deux formes de la maladie, ainsi que leur progression, qui diffèrent ».
Des pistes thérapeutiques différentes
Pour l’équipe, cette découverte incite à imaginer des prises en charge (notamment des comorbidités et risques associés) et des pistes thérapeutiques différenciées selon le type de Mash. L’un des auteurs, le Pr Philippe Mathurin, hépatologue, fait d’ailleurs remarquer que les médicaments évalués pour le traitement de la Mash donnent actuellement « des résultats hétérogènes » et qu’il serait donc intéressant « de les évaluer de façon distincte selon le type de Mash ». « Les Mash d’origine cardiométabolique pourraient être répondeuses plutôt à des médicaments de l’obésité ou du diabète, tandis que les Mash d’origine génétique le seraient à des médicaments ciblant l’inflammation du foie », propose le Pr François Pattou. Enfin, l’équipe de recherche met à disposition des cliniciens un outil en ligne, l’appli RShiny, un calculateur permettant d’identifier le type de Mash d’un patient donné, à partir des six variables, « et de peut-être pouvoir un jour se passer de la biopsie ».
*Inserm, Université de Lille, CHU de Lille, Institut Pasteur de Lille, CNRS, Inria
**Unité 1190, Inserm, Institut Pasteur de Lille, Université de Lille, CHU de Lille
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