La prise de metformine au moment d’une infection aiguë par le SARS-CoV-2 peut-elle limiter le risque de Covid long ultérieur ? C’est en tout cas ce que suggère une étude publiée le 8 juin dans le Lancet Infectious Diseases.
Cet essai de phase 3 visait à tester l’impact de l’administration précoce de différents médicaments (metformine, fluvoxamine, ivermectine) sur l’évolution du Covid. Il a inclus en ambulatoire, plus de 1 000 personnes en surpoids ou obèses âgées de 30 à 85 et présentant une infection documentée par le SARS-CoV-2, avec des symptômes évoluant depuis moins de 7 jours. Ces patients ont été randomisés pour recevoir soit de la metformine plus de l’ivermectine, soit de la metformine plus de la fluvoxamine, soit de la metformine, de l’imervectine ou de la fluvoxamine seules vs placebo.
La dose de metformine était titrée sur 6 jours : 500 mg le jour 1, 500 mg deux fois par jour les jours 2 à 5, puis 500 mg le matin et 1 000 mg le soir jusqu'au jour 14. La posologie d'ivermectine était de 390 à 470 μg/kg par jour pendant 3 jours ; celle de fluvoxamine de 50 mg le jour 1 suivi de 50 mg deux fois par jour jusqu'au jour 14.
Le risque de Covid long réduit de 41 %
De premiers résultats parus en 2022 dans le NEJM avaient déjà montré que la prise de metformine réduisait de 42,3 % le risque de visites aux urgences, d'hospitalisations et de décès dus au Covid à J14.
La nouvelle publication du Lancet Infectious Diseases suggère qu’un bénéfice pourrait aussi être observé à plus long terme, avec un effet préventif de la metformine vis-à-vis du Covid long. Dix mois après l’épisode aigu initial, l'incidence cumulée de Covid long était en effet de 6,3 % dans le groupe de patient traités par metformine (35 sur 564) vs 10,4 % (58 sur 562) chez ceux sous placebo (RR 0,59 ). Lorsque la metformine avait été démarrée dans les trois jours suivant l'apparition des symptômes, l’effet était potentiellement plus important (RR 0,37).
En d’autres termes, « le traitement ambulatoire par la metformine diminue l'incidence de Covid long d'environ 41 %, avec une réduction du risque absolu de 4,1 % par rapport au placebo », résument les auteurs. Aucun bénéfice n’a par contre été mis en évidence avec les autres molécules testées.
Par ailleurs, les patients ayant été traités avant de développer éventuellement un Covid long, le bénéfice potentiel de la metformine ne concerne que la prévention du Covid long et non pas son traitement.
Pour autant, s'ils étaient confirmés, ces résultats seraient « potentiellement marquants » pour la recherche sur le Covid long, a réagi dans un commentaire Jeremy Faust, un médecin de la Harvard Medical School non impliqué dans l'étude.
D’ores et déjà les chercheurs considèrent que la mise en places des « prochaines étapes pour mettre en œuvre la metformine comme traitement du Covid-19 pour prévenir les formes longues » constitue « un besoin urgent de santé publique ».
24 personnes à traiter pour éviter un Covid long
Frances Williams, professeure d'épidémiologie au King's College de Londres, relève toutefois que 564 personnes ont dû prendre ce médicament pour « éviter 23 cas hypothétiques » de Covid long. Ce qui veut dire que « 24 personnes ont pris de la metformine pour prévenir un cas de Covid long ».
Par ailleurs, cet essai ayant exclu les personnes avec un IMC < 25 et celles de moins de 30 ans, ses résultats ne peuvent être extrapolés à l'ensemble de la population.
Alors que l’ANSM a récemment alerté sur le risque d’acidose lactique sous metformine, se pose aussi la question de la tolérance d’un tel traitement. Sur ce point les auteurs se veulent rassurants. « La metformine traite le diabète en grande partie en empêchant la gluconéogenèse hépatique, et non en abaissant les concentrations de glucose dans le sang ; par conséquent, le risque d'hypoglycémie est très faible, y compris chez les personnes non diabétiques », soulignent-ils dans la publication. À noter cependant que dans une autre étude ayant testé la metformine dans le Covid, sans titration progressive du médicament, une proportion importante de participants ne tolérant pas la metformine avait été rapportée.
Un effet sur la réplication virale ?
Sur le plan physiopathologique, le mécanisme d'action par lequel la metformine pourrait réduire l'incidence du Covid long reste mal connu. « Des études antérieures ont montré que la metformine empêche le virus SARS-CoV-2 de se répliquer en laboratoire, ce qui est cohérent avec les prédictions de notre modélisation mathématique de réplication virale, de sorte que cela pourrait être la cause de la réduction à la fois du covid-19 sévère et des diagnostics de Covid long observés dans cet essai », suggère David Odde (Université du Minnesota), co-auteurs de l’étude.
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