Depuis plusieurs mois, de nombreuses voix exhortaient le laboratoire Gilead à rendre son traitement contre le VIH, le lénacapavir, accessible à tous, partout, via une autorisation pour la fabrication de génériques. À commencer par la directrice exécutive de l'Onusida, Winnie Byanyima, qui jugeait en juillet qu’une telle autorisation permettrait au laboratoire d’« entrer dans l’histoire ». L’antirétroviral promet de révolutionner la prévention de l’infection en ne nécessitant que deux injections par an.
C’est désormais chose faite. L’industriel a annoncé le 2 octobre la conclusion avec six fabricants de médicaments d’accords de licence volontaires « non exclusifs et libres de redevances » pour produire et vendre des génériques du lénacapavir dans 120 pays « à forte incidence et aux ressources limitées ».
Des demandes d’homologation déposées d’ici à fin 2024
Dans un communiqué, Gilead précise que l’exécution de ses accords reste « sous réserve des autorisations réglementaires requises. » Le lénacapavir, un inhibiteur de capside du VIH, est déjà autorisé, notamment en Europe, chez les adultes infectés par une souche multirésistante de VIH-1 en association avec un ou plusieurs antirétroviraux. Le traitement se révèle également très efficace en prophylaxie pré-exposition (Prep) avec seulement deux injections par an, ce qui facilite l’observance, en particulier pour les personnes éloignées des soins. Les résultats positifs s’accumulent mais la molécule n’a pas encore été autorisée dans cette indication. Le laboratoire indique que les demandes d’homologation pour un usage en Prep seront déposées d’ici à la fin 2024.
L’accord avec les six fabricants de génériques (Dr Reddy’s Laboratories Limited, Emcure Pharmaceuticals, Eva Pharma, Ferozsons Laboratories Limited, Hetero Labs et Mylan, une filiale de Viatris) couvre ainsi la production de génériques du lénacapavir en prévention et en traitement. D’ici à ce que la fabrication des génériqueurs soit effective, Gilead s’engage à assurer la production et la vente « sans aucun profit » aux pays les plus pauvres. Le laboratoire annonce un dépôt de ses demandes d’autorisation en priorité dans 18 pays* qui représentent 70 % du fardeau mondial de l’infection.
« Étant donné le potentiel transformateur du lénacapavir pour la prévention, notre objectif est de le rendre disponible aussi rapidement et aussi largement que possible là où le besoin est le plus grand, commente Daniel O’Day, PDG de Gilead. Les équipes de Gilead ont travaillé d’urgence pour associer dès maintenant des fabricants de génériques à haut volume, afin que nous puissions assurer une transition rapide vers ces partenaires de licence volontaire après l’approbation du lénacapavir pour la Prep. »
Encore une partie du monde exclue
L’International Aids Society (IAS) salue les annonces de Gilead, mais regrette que les accords laissent encore de côté des millions de personnes dans le monde. Les accords de licence « constituent une avancée importante, mais de grandes parties du monde en restent exclues, y compris les pays où des essais ont été menés », a réagi Beatriz Grinsztejn, présidente de l’IAS, dans un communiqué. Et d’émettre un vœu : « nous espérons que le reste du monde bénéficiera bientôt d’accords similaires pour rendre le lénacapavir plus abordable et offrir une autre option puissante dans l’arsenal de prévention du VIH. »
*Botswana, Eswatini, Éthiopie, Kenya, Lesotho, Malawi, Mozambique, Namibie, Nigeria, Philippines, Rwanda, Afrique du Sud, Tanzanie, Thaïlande, Ouganda, Vietnam, Zambie et Zimbabwe.
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