Ils étaient encore 18 000 il y a cinq ans. Ils ne sont plus que 14 000 aujourd’hui… Aucune profession du secteur santé n’aura été aussi malmenée que la Visite Médicale (VM) ces dernières années. Pourtant, la dernière enquête de l’Aqim (Association pour la qualité de la visite médicale) montre que, malgré les restructurations qui les ont affectés, les VM y croient encore.
Un profil qui n’a pas beaucoup changé
La première surprise de l’enquête est d’ailleurs que le profil du délégué médical n’a pas beaucoup changé. 50 % de cette population affiche encore plus de 20 ans de carrière au compteur et si 63 % disposent actuellement du diplôme de visite médicale, 37 % n’en sont pas dotés, ce qui signifie qu’ils ont été embauchés avant 1998. L’image du VM, pour l’essentiel dédié aux médecins de ville est en revanche obsolète : 60% ont désormais pour cible principale des PH, 29 % des généralistes et 11 % des spécialistes libéraux.
En fait, si quelque chose a changé pour la VM, c’est plutôt du côté des médecins qu’il faut la chercher. Tout délégué médical vous le dira : il est de moins en moins facile de décrocher un rendez-vous. Les 246 délégués qui ont répondu à l’Aqim conviennent dans leur grande majorité (66 %) que la proportion de visites dans leur activité s’est réduite (48 %), voire pour certains (18 %) effondrée . À l’heure de la crise démographique, ils font une constatation similaire concernant le temps qui leur est accordé dans les cabinets médicaux : six sur dix mentionnant une dégradation et un dixième de la profession une forte dégradation. Par choix ou par nécessité, les médecins recevraient donc moins souvent ou moins longtemps.
Le VM des années 2010 doit tenir compte de cette moindre disponibilité, mais aussi du fait que les pôles d’intérêt de leurs interlocuteurs ont changé. Parmi les informations qu’ils délivrent, les délégués médicaux ont relevé dans leur majorité une plus forte appétence pour les informations économiques ou destinés directement ou indirectement aux patients. D’après l’enquête, il semble aussi, dans une moindre mesure, que, pour retenir l’attention du médecin, il faille aborder les données de pharmacovigilance et les recos. À l’inverse, les praticiens seraient plutôt moins réceptifs qu’avant sur les études cliniques présentées lors de la visite. Tout se passe en fait, comme si la pression économique et les impératifs de sécurité sanitaire avaient fait évoluer le corps médical, jusque dans ses attentes de la visite médicale.
Le VM 2012, bien dans sa peau
Le plus étonnant sans doute est que, face à tous ces bouleversements, le VM semble encore plutôt bien dans sa peau. 81 % estiment en effet que leur niveau de formation est correct pour répondre aux exigences des médecins et, en dépit des attaques dont la VM fait l’objet depuis l’affaire Mediator, les trois quarts des délégués n’imaginent pas que leur profession puisse disparaître, même si 65 % concèdent que le métier devra forcément évoluer.
Tout est-il si rose pour autant dans ce métier ? Pas forcément, selon Marie-Noëlle Nayel qui juge que le VM doit absolument réorienter son discours, de la démarche purement commerciale vers l’information et les missions de santé publique. La présidente de l’Aqim évoque d’ailleurs une dégradation de la qualité de la visite médicale, perçue par les médecins. Et elle en veut pour preuve, la baisse de l’indice qualité de la VM, mesuré par l’Aqim auprès des médecins depuis 2007 sur quelque 22000 visites et qui croise des critères comme la déontologie du visiteur, ses connaissances scientifiques ou la remise de documents aux médecins. Depuis 2012, cet indicateur est clairement à la baisse. Un signal que l’industrie ne doit pas prendre à la légère, selon elle. « Globalement, les laboratoires n’investissent pas assez dans l’intelligence de leurs VM et sur leurs connaissances dans l’environnement du système de santé », souligne-t-elle. « C’est pourtant la seule façon de sauver cette activité qui, sinon, court le risque de ne plus apporter grand-chose aux médecins », poursuit cet expert du secteur.
La future charte de la VM actuellement en renégociation entre le Leem et le comité économique des produits de santé répondra-t-elle à ce défi ? Selon l’Aqim, 68 % des VM considèrent que la charte actuelle « est allé dans le bon sens », 6 % seulement qu’elle a « révolutionné » leur exercice. Le nouveau dispositif devrait aller plus loin dans l’encadrement du métier : on parle de prise en compte de critères qualité dans la rémunération variable, on évoque la certification du discours oral du délégué ou la création d’un droit d’alerte pour des réseaux de médecins sentinelles et une implication plus forte des réseaux dans les remontées de pharmacovigilance...
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