Naissance prématurée, petit poids gestationnel, prééclampsie, troubles hypertensifs et diabète gestationnel durant une grossesse unique sont tous associés indépendamment au risque de mortalité toutes causes ou de causes spécifiques chez les femmes, et, ce, jusqu’à 40 ans après l’accouchement. C’est la conclusion que livrent, dans le JAMA Internal Medicine, des auteurs suédois qui ont mené une étude sur 2 195 667 femmes ayant accouché entre 1973 et 2015 au terme d’une grossesse unique. La littérature avait déjà mis en évidence que les femmes ayant connu des complications durant leur grossesse (30 % des parturientes) ont un surrisque futur de troubles cardiométaboliques. Les facteurs familiaux ne réduisent que partiellement ce surrisque.
La présente étude a révélé que 30 % des femmes (667 774) avaient rencontré au moins une complication durant une grossesse unique et 8 % (181 783) au moins deux complications, pas toujours durant la même grossesse. Pour les auteurs, ces résultats montrent la nécessité « de faire des bilans préventifs chez ces femmes, ainsi que d’être attentifs à réaliser des dépistages pour des troubles chroniques, afin d’initier les traitements ».
L’association naissance prématurée et petit poids gestationnel est la paire la plus fréquente
Les complications les plus rencontrées étaient le petit poids gestationnel, qui concernait une naissance sur 10, et les naissances prématurées, 5 % des naissances ; cette « paire de complications rencontrées par la même femme » est la plus commune (1,4 % des femmes). L’âge médian à l’accouchement était de 27 ans. Ces femmes étaient généralement plus jeunes lors de leur premier accouchement, de niveau d’études ou de revenus plus bas et/ou fumeuses. Concernant les autres complications, les femmes avec une prééclampsie avaient également un niveau d’études ou de revenus plus bas, un indice de masse corporelle (IMC) élevé et/ou étaient fumeuses ; celles avec des troubles hypertensifs ou du diabète gestationnel étaient plutôt plus âgées lors de leur premier accouchement, avaient un IMC plus élevé et/ou étaient fumeuses.
Les auteurs retrouvent, jusqu’à 46 ans après l’accouchement, des hazard ratios (HR) significatifs pour une association indépendante de la mortalité toutes causes avec le diabète gestationnel (HR = 1,52), l’accouchement prématuré (HR = 1,41), le petits poids gestationnel (HR = 1,30), les troubles hypertensifs (HR = 1,27) et la prééclampsie (HR = 1,13). Ils précisent que « les hazard ratios étaient significativement élevés même entre 30 et 46 ans après l’accouchement ». Enfin, si les femmes avaient plus d’une de ces complications, le surrisque de mortalité en était augmenté.
Les hazard ratios associés aux naissances prématurées étaient les plus élevés dans les 10 ans qui suivaient l’accouchement, avant de diminuer dans le temps. Les hazard ratios des autres complications restaient plutôt stables, avec une augmentation en cas de suivi prolongé.
Âge médian de 59 ans au décès
Au cours des 56 millions personnes-années de suivi, 88 055 femmes (4 %) sont décédées, dont 33 dans les 7 premiers jours et 117 dans les 28 premiers jours suivant l’accouchement. L’âge médian au décès était de 59 ans et, au terme du suivi en 2018, de 52 ans. Si le diabète gestationnel était associé à plus de décès en excès (116/100 000 personnes-années), le petits poids gestationnel et l’accouchement prématuré étaient associés à une part plus large de décès. Cependant, dans leur discussion, les auteurs signalent que durant la période d’étude, la Suède ne possédait pas de consensus national sur le dépistage du diabète gestationnel.
Enfin, les auteurs ont identifié les causes majeures de décès, parmi lesquelles sont retrouvés les cancers (49 % des décès), les diabètes (1 %), les troubles cardiovasculaires (14 %) et les affections respiratoires (4 %). Les cinq complications étaient particulièrement associées à un décès de cause cardiovasculaire, en comparaison avec les femmes n’ayant pas rencontré de complication durant leur grossesse. Les femmes ayant accouché prématurément ou dont l’enfant avait un petit poids gestationnel avaient plus de risque de décès par cancer ou pathologies respiratoires. Pour les accouchements prématurés, la prééclampsie et le diabète gestationnel, c’est la mortalité liée au diabète qui était la plus importante.
Selon les auteurs, « la grossesse a été considérée comme un test naturel de stress qui permet de récolter des informations précieuses pour la compréhension des risques de santé » ; ils se questionnent d’autre part sur la façon dont « ces complications peuvent démasquer des risques soit préexistants, soit nouveaux ».
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