Pour la première fois en France, une femme de 34 ans, infertile, a pu bénéficier d'une greffe d'utérus, vient d'annoncer l'hôpital Foch de Suresnes. Cette intervention a eu lieu dimanche 31 mars. Elle a été réalisée avec l'utérus d'une donneuse vivante, la mère (57 ans) de la receveuse, par l'équipe du Pr Jean-Marc Ayoubi, chef de service de gynécologie-obstétrique et médecine de la reproduction de l'hôpital Foch. Cette première greffe française est le résultat de plus de 10 ans de recherche et de collaborations, en particulier avec le Pr Mats Brännström de l'université de Göteborg, en Suède. La première naissance au monde après une greffe d'utérus a eu lieu en Suède en 2014 par cette équipe suédoise.
La patiente greffée, atteinte du syndrome de Rokitansky (MRKH), est née sans utérus, une affection qui touche une femme sur 4 500 à la naissance.
Pas encore enceinte
« La patiente transplantée n'est pas encore enceinte et le transfert d'embryons préalablement congelés pourrait se faire dans dix mois », a indiqué le Pr Jean-Marc Ayoubi à l'AFP. Dans les autres équipes, à l'international, « cela s'est fait entre six et douze mois ». Quant au traitement immunosuppresseur, il est « moins lourd » que pour d'autres transplantations d'organe. Il est adapté à la grossesse, comme on le fait chez les greffées du rein enceintes. « On travaille avec l'équipe pionnière suédoise depuis 7 à 8 ans (...). Nous avons apporté notre expertise en chirurgie robotique qu'ils ont utilisée pour leurs cinq dernières greffes », afin d'effectuer le prélèvement de l'utérus, poursuit le Pr Ayoubi, en soulignant que cela facilitait la récupération de la donneuse.
14 heures d'intervention pour les 2 opérations
La durée opératoire a été de l’ordre de 14 heures pour les deux interventions, celle du prélèvement étant la plus longue. Le prélèvement doit être très méticuleux pour que l'utérus soit réimplantable. Le robot, offrant une meilleure vision, en 3D, facilite la dissection de vaisseaux très fins. La greffe se fait par chirurgie classique.
Cette greffe n'a pas vocation à être permanente en raison du traitement antirejet. Il s'agit d'une greffe provisoire pour avoir un enfant. Cependant, deux ou trois femmes dans le monde auraient conservé l'utérus greffé pour mener une deuxième grossesse.
L'équipe du Pr Ayoubi a reçu l'autorisation de l'Agence de la biomédecine et de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé de conduire un essai clinique pour dix greffes avec donneuses vivantes apparentées. Une autre équipe au CHU de Limoges a eu l'aval pour huit greffes avec donneuses en état de mort cérébrale.
En tout, 15 naissances dans le monde
Ce type de greffe, réalisée auparavant dans d'autres pays, a déjà permis quinze naissances dans le monde. D'après le Pr Brännström : « 9 en Suède dont la dernière il y a quatre jours, deux aux États-Unis, une au Brésil, en Serbie, en Chine et en Inde », a-t-il détaillé à l'AFP. Parmi les 13 pays, avant la France, qui ont pratiqué cette greffe figurent aussi selon cet expert le Mexique, le Liban, l'Arabie Saoudite, l'Allemagne, la République Tchèque et la Belgique.
La première naissance au monde après une greffe d'utérus en 2014, survenue un an après la transplantation, avait fait l'objet d'une publication dans The Lancet par l'équipe du Pr Brännström de l'université de Göteborg. La donneuse vivante avait 61 ans.
Trois ans plus tard, au Brésil, une naissance avait été obtenue grâce à une greffe d'utérus de donneuse décédée chez une femme également née sans utérus. La naissance, datant du 15 décembre 2017, avait été révélée un an après par l'équipe du Dr Dani Ejzenberg de l'hôpital de Sao Paulo.
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