Passer sa petite enfance dans une ferme est associé à un risque plus faible de développer des allergies à l’âge adulte. C’est ce que suggère une étude publiée le 26 septembre dans Thorax, une des revues liées au BMJ.
Hausse des allergies : l’hypothèse de l’hygiène
Plusieurs théories ont été débattues pour tenter d’expliquer la nette augmentation de la prévalence de l’asthme et des allergies depuis quelques décennies. Les recherches récentes ont mis en évidence que l’exposition en bas âge à une grande variété de potentiels allergènes pourrait avoir un effet protecteur. C’est ce que les spécialistes appellent l’hypothèse de l’hygiène.
Afin de mieux quantifier l’influence de l’environnement où se déroule la croissance sur les fonctions respiratoires et la survenue de l’asthme une fois adulte, des scientifiques de l’université de Melbourne ont tiré parti de l’enquête European Community Respiratory Health Survey II qui inclut plus de 10 000 personnes âgées entre 26 et 54 ans venant de 14 pays différents (l'Europe et l’Australie). Les données ont été prélevées entre 1998 et 2002.
L’équipe a demandé aux participants où ils ont vécu avant l’âge de 5 ans : dans une ferme, un village de campagne, une petite ville ou en banlieue, et en centre-ville. D’autre part, un score « de biodiversité » a également été établi entre 0 et 5. Celui-ci se base sur les réponses que les personnes interrogées ont fournies sur leur exposition aux animaux domestiques comme les chiens ou les chats, le fait d’avoir des frères et sœurs plus âgés, la fréquentation d’autres enfants en garderie, à la crèche ou à l’école et sur le nombre d’enfants avec qui ils ont dû partager leur chambre. Leur capacité respiratoire et leur niveau d’IgE ont aussi été testés. Enfin, les participants ont rempli un questionnaire concernant les symptômes d’allergies dont ils pourraient souffrir notamment l’asthme, la fièvre des foins, le wheezing, l’hyperréactivité bronchique ou l’écoulement nasal.
Rien ne vaut l’air de la ferme
D’après les chiffres, près des deux tiers des individus ont passé leur enfance dans un village rural, une petite ville ou en banlieue avant l’âge de 5 ans. En peu plus d’un quart ont grandi en centre-ville et moins d’un dixième dans une ferme. Les enfants ont plus de chance d’avoir été en contact avec des animaux, comme d’avoir à partager leur chambre s’ils ont grandi dans une ferme. Parallèlement, une fois adulte, ils présentent moins de risques d’être sensibilisés à des allergènes.
Plus précisément, les personnes qui ont passé leurs 5 premières années dans une exploitation agricole voient leur risque diminuer de 54 % de développer de l’asthme et de 57 % de souffrir d’écoulement nasal par rapport aux enfants ayant vécu en centre-ville. Les analyses ont démontré que les enfants élevés dans des fermes voient leurs risques d’être sensibilisés aux allergènes réduits de 53 % contre 26 % seulement pour les enfants grandissant dans les villages par rapport aux enfants vivant dans des zones urbaines.
Vivre dans un village, ou en banlieue avant 5 ans diminue à peine les risques de développer de l’asthme ou la fièvre des foins à l’âge adulte et ne réduit en rien ceux d’avoir des écoulements nasaux par rapport à ceux qui ont grandi en centre-ville. En tout, grandir dans une ferme réduit de 50 % les risques d’asthme allergique ou non comparé aux autres groupes.
De plus, les scientifiques ont fait une autre découverte intéressante. Les femmes auraient un meilleur VEMS si elles ont grandi dans une ferme par rapport à celles qui ont vécu en centre-ville. Ce fait a été observé dans les 14 pays. L’équipe pense que des facteurs environnementaux pourraient expliquer ces disparités entre les genres. Il est notamment possible que les hommes soient exposés à des allergènes sur des périodes plus longues.
Les spécialistes soulignent qu’il s’agit d’une étude observationnelle et qu’aucun lien de cause à effet ne peut en être déduit directement. Les auteurs admettent aussi qu’aucune mesure objective de la biodiversité n’est disponible pour comparaison. On peut néanmoins conclure que : « la cohérence des résultats obtenue dans plusieurs pays suggère que les effets de la vie à la ferme peuvent être dus à des mécanismes biologiques plutôt que des effets socioculturels qui sont différents entre les pays ».
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