Diabète de type 2

Antidiabétiques, enfin un effet démontré sur la mortalité cardio-vasculaire

Publié le 09/10/2015
Article réservé aux abonnés
Avec l’essai EMPA-REG, l’empagliflozine devient le seul antidiabétique à avoir montré une réduction significative de la morbi-mortalité cardiovasculaire dans une étude dédiée. Une première qui a créé l’événement lors du récent congrès européen de diabétologie. La présentation des nouvelles guidelines sur la NASH et de nombreuses communications sur les hypoglycémies du diabète de type 2 ont été aussi à l’ordre du jour.

Crédit photo : GARO/PHANIE

Sans conteste, la présentation des résultats plutôt inattendus de l’essai de morbi-mortalité EMPA-REG* a constitué le fait marquant du récent congrès européen de diabétologie (European Association for the study of Diabetes, Stockholm 14-18 septembre 2015). Alors qu’aucun antidiabétique, jusqu’à présent, n’avait fait la preuve spécifique de son efficacité en matière de mortalité cardiovasculaire, cette étude (publiée depuis dans le NEJM) marque la rupture en montrant que l’empagliflozine réduit de près d’un tiers la mortalité cardiovasculaire et la mortalité toutes causes dans le diabète de type 2.

L’empagliflozine est un inhibiteur du cotransporteur sodium-glucose de type 2 (SGLT2) qui cible la réabsorption rénale du glucose et augmente son excrétion urinaire. Comme tout nouvel antidiabétique, elle a dû répondre devant l’EMA et la FDA de son innocuité cardiovasculaire, d’où l’essai de sécurité cardiovasculaire EMPA-REG*. Mais là où les autres antidiabétiques récents (inhibiteurs de la DPP-4 : itagliptine dans l’essai TECOS et saxagliptine dans SAVOR TIMI 53 ; analogue du GLP1 lixisenatide dans ELIXA) n’ont fait la preuve que d’une « simple » neutralité cardiovasculaire, l’empagliflozine va plus loin et montre qu’elle infléchit le risque de décès cardiovasculaire, de décès toutes causes et d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque.

Le risque de décès cardiovasculaire réduit de 38%

L’essai EMPA-REG a été mené chez 7?020 diabétiques de type 2 à haut risque cardio-vasculaire modérément déséquilibrés (HbA1c à l’inclusion autour de 8 %) bénéficiant d’un traitement antihyperglycémique habituel auquel s’ajoutaient soit 10 ou 25 mg/jour d’empagliflozine, soit un placebo. À l’issue d’un suivi moyen de 3,1 ans, les auteurs rapportent une diminution de -14 % sur le critère composite (décès cardiovasculaires, infarctus du myocarde et accident vasculaire cérébral non fatals), de -38 % du risque de décès cardiovasculaires, de -32 % du risque de décès toutes causes et de -35 % du risque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque, avec des résultats comparables quels que soient les sous-groupes analysés (âge, sexe, débit de filtration glomérulaire, contrôle de la pression artérielle, contrôle de la glycémie, IMC…). Côté tolérance, on observe, comme attendu, plus d’infections génitales (et non urinaires) dans le bras empagliflozine (6,4 % versus 1,8 % dans le bras placebo) sans pour autant conduire à l’arrêt du traitement.

Un effet au-delà de la glycémie

Sans analyses complémentaires, difficile pour l’instant d’imputer ces résultats majeurs à un mécanisme précis. « Les courbes d’événements divergent assez tôt, analyse le Pr Paul Valensi, (hôpital Jean-Verdier, Bondy), dès trois mois de traitement, laissant penser que la baisse de pression artérielle (-4/2 mm Hg) obtenue grâce à l’empagliflozine, jouerait potentiellement un rôle ». Les SGLT2 font baisser régulièrement la pression artérielle systolique (PAS) de 4 à 5 mmHg.

L’autre argument en faveur de cette hypothèse est la réduction considérable de 35 % des hospitalisations pour insuffisance cardiaque alors même que la baisse des AVC et des infarctus du myocarde n’est pas significative. Par ailleurs, l’HbA1c différant peu selon les groupes, un meilleur contrôle glycémique ne peut expliquer de tels résultats, a fortiori aussi rapides. Quoi qu’il en soit, « traiter 1?000 patients par empagliflozine en plus d’un traitement antidiabétique pendant 3 ans, permet de sauver 25 vies », résume le Pr Valensi.

Du « jamais vu » qui promet de rebattre les cartes de la stratégie dans le diabète de type 2. D’autant que les SGLT-2 peuvent être de toutes les associations thérapeutiques du fait de leur mécanisme d’action indépendant de la sécrétion endogène d'insuline. Pour le moment, l’empagliflozine a une AMM européenne mais n’est pas disponible en France.

Hélène Joubert

Source : lequotidiendumedecin.fr